Par Jean-Pierre Mbelu
Pourquoi nous plaçons-nous spontanément dans la position des coupables et de « collabos » sans analyser en profondeur les conditions de réalisabilité de notre « collaboration »?
Il arrive que, quand nous touchons de manière critique à nos rapports avec »l’Etat profond anglo-saxon » qui nous mène la guerre depuis l’assassinat de Lumumba en 1961 (et même avant), il y ait des réactions spontanées du genre : cet »Etat profond » ne ferait rien si les Congolais(es) n’avaient pas collaboré. Cette réaction est juste. Mais partiellement. Elle ne rend pas compte du refus de collaborer dont plusieurs de nos aïeux ont fait montre au point de payer de leur vie. Bien que réelle, la spontanéité avec laquelle nous dénonçons »notre collaboration » donne à penser. Pourquoi nous plaçons-nous spontanément dans la position des coupables et de »collabos » sans analyser en profondeur les conditions de réalisabilité de notre « collaboration »?
Sur cette question, un monsieur congolais, habitué aux salons des livres, réagit autrement. Il s’agit de monsieur Evariste Pini-Pini. Lui écrit ce qui suit : « Il est indéniable que nous sommes arrosés par tous ces discours misérables qui dénigrent la classe politique congolaise en général. Les apôtres de cette idéologie oublient qu’il y a de nombreux leaders et bien d’autres citoyens qui croupissent dans les geôles de la kabilie-kagamie, mais surtout que le Congo dont on parle ainsi c’est celui de Kimpa-Vita, Kimbangu, Lumumba, Busana, Malu, Bimwenyi, Ngali, Mudimbe, etc., dont certains sont des Maîtres parmi les Maitres. Notre misère actuelle ne doit pas nous faire perdre la raison complètement, ni tout espoir non plus. »
Quand il arrive de parler de notre « collaboration d’hier », nous ne devrions pas oublier de lire « Le discours sur le colonialisme » de Césaire. Cette question est étudiée en profondeur par l’un d’entre nous, Fweley Diangitukwa dans son récent livre intitulé « L’Afrique doit renaître ».
Evariste Pini Pini atteste que lui, contrairement à plusieurs d’entre nous, n’est pas encore tombé dans »la désorientation existentielle » causée par l’assassinat de Lumumba. Il se garde d’une culpabilisation collective et globalisante. Il sait, lui, voir, que plusieurs de nos aïeux n’ont pas »collaboré » et ont payé un pris fort. Qu’ils méritent d’être mentionnés dans nos débats au ton misérabiliste sur notre classe politique. Il voit, lui, qu’il y a, dans les geôles de la kabilie-kagamie, des compatriotes ayant refusé de collaborer avec »pouvoir-os-occupant ». Il voit, lui, que les Congolais(es) comptent, encore aujourd’hui, des »Maîtres parmi les Maîtres » pouvant nous donner des raisons d’espérer en un avenir meilleur pour le Congo-Kinshasa. Bravo à lui !
Disons que cela n’exonère pas nos compatriotes »collabos ». Mais Evariste Pini Pini pose la question de notre attachement au discours idéologique dénigrant »notre classe politique » sans un effort de relecture de notre histoire collective et sans discernement quant à la situation de plusieurs de nos compatriotes croupissant dans les geôles du »pouvoir-os-occupant ».
Et quand il arrive de parler de notre »collaboration d’hier », nous ne devrions pas oublier de lire »Le discours sur le colonialisme » de Césaire. Cette question est étudiée en profondeur par l’un d’entre nous, Fweley Diangitukwa dans son récent livre intitulé »L’Afrique doit renaître ». Evariste Pini Pini semble nous rappeler que la fréquentation des salons des livres peut corriger notre approche de notre présent et de notre avenir.
Babanya Kabudi
Génaration Lumumba