Par Bénédicte Kumbi Ndjoko
L’état de siège est un fiasco. Depuis son établissement plus de 300 personnes ont été tuées. Il a été pensé pour faire taire des Congolais qui commençaient à ouvrir les yeux des Congolais encore endormis sur la nature réelle du régime mis en place à Kinshasa.
Des voix partisanes du mensonge institutionnel se sont élevées pour contrer tout discours discordant, tout discours qui aurait pu les forcer à s’avouer à eux-mêmes qu’ils faisaient partie du problème, que leur volonté d’aveuglement pour soi-disant protéger une solidarité identitaire factice, faisait d’eux des criminels au même titre que le paralytique de Kigali soutenu par les officines occidentales. Ainsi, on a éprouvé un plaisir ineffable à répéter comme un perroquet imbécile à qui voulait l’entendre qu’il fallait sortir des groupes armés. On s’est délecté en disant et en pensant avoir un argument imparable que les enfants de Beni étaient manipulés par leurs parents. Toute idiotie assénée pour blesser a fait jouir la horde des déficients de la République.
Pourquoi tant de personnes sont là à parler de la CENI, à préparer des manifestations pour une CENI dépolitisée alors que la mort elle ne cesse de faucher des vies? Qu’est-ce qui ne va pas dans nos têtes? N’avons-nous jamais appris ce qu’est une priorité? Ne pouvons-nous évaluer une situation avec lucidité? Qu’avons-nous à dire au monde? Que nos morts ne comptent pas et on s’énerve quand Kagame instrumentalise son génocide?
Aujourd’hui c’est la voix d’un député du Nord Kivu qui nous relate l’étendue du désastre qui se déroule dans cette région du Congo. Il nous dit sans peur et sans ambages que la colère gronde au sein de la population, que certains se demandent à quoi ça sert d’être Congolais, que les populations sont interdites de pleurer les leurs par des gouverneurs à la solde des agresseurs. Les mêmes gouverneurs militaires dont le pédigrée criminel aurait fait lever tous les boucliers. Mais au Congo non, au contraire, on nous a parlé de leur conversion au bien, qu’ils devaient être pardonnés car ils étaient décidés à s’amender. Une vaste blague!
Alors ma question est la suivante: pourquoi tant de personnes sont là à parler de la CENI, à préparer des manifestations pour une CENI dépolitisée alors que la mort elle ne cesse de faucher des vies? Qu’est-ce qui ne va pas dans nos têtes? N’avons-nous jamais appris ce qu’est une priorité? Ne pouvons-nous évaluer une situation avec lucidité? Qu’avons-nous à dire au monde? Que nos morts ne comptent pas et on s’énerve quand Kagame instrumentalise son génocide?
Nous sommes décevants comme individus. Plus de deux décennies de boucheries innommables et nous ne sommes même plus capables de sortir manifester, de montrer à ceux que nous appelons compatriotes qu’ils comptent. Pourquoi se mentir à soi-même et faire comme si la question congolaise pouvait se résoudre en faisant de la politique politicienne de bas étage? Est-ce que l’on a vraiment accepté que toute cette bande de vauriens, sous-éduqués même si diplômés nous arrivaient à la cheville? Comment lorsque l’on a passé je ne sais combien d’année sur les bancs de l’apprentissage, on s’insulte en faisant des courbettes à des faussaires, des tricheurs et des menteurs?
Pas étonnant que ceux qui regardent tout ceci de loin se disent que l’on mérite bien nos malheurs. La vérité est que nous avons perdu tout sens de l’honneur d’abord et toute réflexion ensuite. Si on ne se réveille pas, il ne faudra pas pleurer. Personne ne respecte quelqu’un qui se déteste.
Bénédicte Kumbi Ndjoko