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La Bonne foi ne suffit pas : Il faut maîtriser les enjeux congolais et réinventer la pensée congolaise

La Bonne foi ne suffit pas : Il faut maîtriser les enjeux congolais et réinventer la pensée congolaise

La Bonne foi ne suffit pas : Il faut maîtriser les enjeux congolais et réinventer la pensée congolaise 768 557 Ingeta

L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu décrypte le contexte de l’arrestation des activistes sénégalais, burkinabé et congolais à Kinshasa, le 15 mars 2015, analyse le sens du terme ‘terroriste’ utilisé pour qualifier ces jeunes activistes, met en perspective l’implication américaine dans les activités citoyennes au Congo et dans le monde, et explique pourquoi nous devons réinventer la pensée congolaise et africaine.

Sur le contexte de l’arrestation des activistes sénégalais, burkinabe et congolais à Kinshasa le 15 mars 2015 lors d’une conférence de presse

Depuis que la population congolaise est descendue dans la rue le 19, 20 et 21 janvier 2015, la Kabilie est sur ses gardes et a peur. Elle croit qu’à tout moment, elle peut être déstabilisée de l’intérieur. C’est cette peur qui justifie cette arrestation. Mais en étudiant la question de plus près, on réalise qu’il y a eu une combinaison de plusieurs facteurs :
Vous avez des jeunes qui ont envie de rencontrer d’autres jeunes et d’échanger sur leurs expériences. Ils voulaient s’initier à des méthodes non violentes pour travailler au changement dans leur pays.
Mais il y avait derrière une main qui n’a pas hésité à donner son identité, ce qui fait que les jeunes, malgré leur bonne foi, aient été manipulés par des forces extérieures. Ces forces extérieures ont décidé de jouer, cartes sur table, à visage découvert, et il faudra étudier comment ces forces pourront être un handicap à la récupération de l’initiative historique par les congolais.

Sur les déclarations de Mende qui qualifie les jeunes activistes de terroristes

Mende a utilisé le mot terroriste pour qualifier les jeunes qui ont été arrêtés. Terroriste est un mot passe partout qui signifie, en profondeur, que ceux qui sont qualifiés de terroristes sont en principe voués à la mort.
Les congolais doivent savoir que leurs jeunes peuvent être tués d’un moment à un autre. Et plusieurs de ces jeunes sont maintenant rentrés dans la clandestinité.
A supposer que ces jeunes aient été des terroristes, la meilleure des choses à faire, si nous avions un gouvernement responsable, serait de les juger au vu et au su de tout le monde.
Il y a eu là un piège dans lequel les jeunes sont tombés, un piège qui les livre à leur extermination. Nos jeunes doivent apprendre que leur bonne foi ne suffit pas. Ils doivent apprendre à identifier leurs collaborateurs et ceux qui financent leurs actions pour savoir ce qu’ils poursuivent réellement. Ce qui vient de se passer engage l’avenir proche de la RD Congo. Tous ceux qui voudront désormais se rassembler pour parler de la politique ou de l’avenir du pays risquent d’être rapidement assimilés à des terroristes, et les fameuses « élections » de 2016 sont déjà compromises par cette façon d’approcher les questions politiques.

Sur le rôle des USA dans cette affaire

Quand on étudie les activités financées par l’agence de développement américaine, USAID et d’autres instituts qui lui sont proches, on se rend compte que ces financements ont été à la base de ce qu’on a appelé « les révolutions de couleurs ». Est-ce une révolution de couleur qui est en train de se préparer au Congo ? Attendons de voir. Mais les jeunes qui sont venus d’autres pays vers Kinshasa ont déjà participé, ne serait-ce qu’au Burkina Faso, à une révolution de couleur. Au Sénégal, ils ont participé au départ de Wade.
Si Lambert Mende qualifie ces jeunes de terroristes, il devrait aussi qualifier le gouvernement des USA, qui dit avoir financé ces activités là, de terroriste aussi. Pourquoi il y a –t-il eu de la part de Lambert Mende et mêmes des services secrets congolais, deux poids deux mesures ?
Le diplomate américain qui a été appréhendé en même temps que les jeunes a été libéré ? Pourquoi a-t-il été libéré ? Aujourd’hui, les USA acceptent de jouer à visage découvert en disant c’est nous qui finançons ce genre d’activités. Si les USA sont les partenaires du Congo, le gouvernement congolais, s’il est responsable, a tout intérêt à aller échanger avec les diplomates américains pour qu’ils leur disent pourquoi ils financent ces activités au lieu de garder nos jeunes.
Pourquoi ceux qui disent officiellement avoir soutenu ces jeunes là ne sont pas du tout inquiétés contrairement aux jeunes ? Pourquoi ne pas s’en prendre aux commanditaires, à ceux qui ont orchestré ce financement ? Est-ce par peur des rapports de force qui leur sont défavorables ? N’est-ce pas un montage de la part de ces partenaires américains pour pouvoir livrer les jeunes en pâture au gouvernement fantôche de Kinshasa.

Sur le contrôle de la pensée congolaise

La pensée politique et la pensée sociale au Congo sont contrôlées de l’extérieur. Le fait que toutes ces ONG de la société de la société civile bénéficient des financements extérieurs est une façon de contrôler la pensée de la société civile, et la pensée de ce qui nous reste encore de classe politique.
Comme la pensée sociale, politique, culturelle congolaise est en grande partie prise en otage par ceux qui connaissent l’importance de la bataille des idées, il sera très difficile à la société civile congolaise (et à la plupart de ses partis politiques).
Il y a une urgence de pouvoir réinventer la pensée congolaise et africaine. Nous avons besoin en tant qu’individus de pouvoir retravailler notre âme. Les pays qui sont en train d’émerger et d’aller de l’avant aujourd’hui sont des pays qui revisitent leur âme. On voit la Russie avec la slavophilie. On voit la Chine avec la pensée confucéenne, et l’Amérique latine avec la pensée bolivarienne. Tous ces pays émergents revisitent la pensée et la spiritualité de leurs ancêtres. Mais pour nos compatriotes congolais, qui oeuvrent dans les partis politiques et les ONG de la société civile, la pensée politique, intellectuelle, culturelle et spirituelle est prise en otage par les partenaires extérieures.
Il y a un travail sérieux à abattre pour que les congolais et congolaises puissent ré-avoir confiance en eux-mêmes.

Sur le bateau PPRD qui coule

Le bateau est en train de couler. Avec ce qui s’est passé dimanche, 15 mars 2015, il faut être aveugle pour ne pas voir des yeux pour ne pas voir. Un pays qui vous dit, c’est moi qui finance ce genre d’activité chez vous, et qui ne cesse de vous dire que c’est fini pour Kabila, et quand vous avez la rue qui vous dit, « il y en a marre », les gens de la majorité présidentielle ont compris. Ils doivent assurer leurs arrières.
Le comble est que l’attention se focalise un individu, Kabila, et non sur le système auquel il a participé. Ces gens font comme s’ils ne sont pas les maillons du système auquel ils ont participé ensemble avec Kabila.
Ils donnent l’impression que c’est lui qui avait le pouvoir. S’il avait un quelconque pouvoir, on l’aurait senti dans la réaction qu’il aurait affiché quand les USA ont dit avoir financé les activités qui se sont déroulés à Kinshasa ce weekend.

Sur le gouvernement Matata II

Il n’y a pas de gouvernement dans un Etat raté. Il n’y a que des capita médaillés dans un ordre néolibéral.
Le Fonds Monétaire international est allé dernièrement à Kinshasa pour renier avec un Etat où il n’y a pas de gouvernement. Ces gens poursuivent leur lutte contre le Congo. La banque mondiale vient de financer l’aéroport de Goma. Nous avons là en face du peuple congolais des agents de l’ordre néolibéral travaillant avec des tueurs à gage économique que sont le Fonds Monétaire international et la banque mondiale.

INGETA.

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