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Boyenge Bofala  et les lieux de lutte pour un autre  Congo-Kinshasa

Boyenge Bofala  et les lieux de lutte pour un autre  Congo-Kinshasa

Boyenge Bofala  et les lieux de lutte pour un autre  Congo-Kinshasa 1600 901 Ingeta

Par Jean-Pierre Mbelu

La lutte pour un autre Congo et un véritable monde multipolaire a une dimension cognitive importante et elle ne peut pas se confiner dans un petit espace dénommé  en géographie physique « Congo-Kinshasa ».

Il arrive que les Congolais(es) de la diaspora travaillant à la compréhension des enjeux de leur pays devant leurs ordinateurs ne jouissent pas toujours d’une bonne appréciation chez certains de leurs compatriotes. Ceux-ci ne cessent de leur demander  de descendre sur terrain. Pour eux, le terrain, c’est le Congo-Kinshasa et nulle part ailleurs. La réduction des lieux de lutte pour un autre Congo à l’espace géographique congolais questionne notre approche collective de l’histoire.

Les terrains de combat

La conférence de Berlin de 1885 s’est déroulée loin du Congo-Kinshasa tout en prenant des décisions sérieuses  sur le devenir collectif de ce pays. Les conspirateurs de l’assassinat de Lumumba n’étaient pas tous au Congo-Kinshasa quand ils ont décidé de mettre fin à sa vie. Et les meilleures archives sur l’histoire (politique) du Congo-Kinshasa sont aux USA. Les négriers   et les colons ne sont pas venus du Congo-Kinshasa. La table-ronde ayant contribué à l’avènement  de l’indépendance politique (formelle) du Congo-Kinshasa a eu lieu en Belgique. Certaines rencontres politico-intellectuelles ayant permis à Patrice Emery Lumumba de passer de son statut d’évolué à celui du véritable combattant de la liberté ont eu lieu au Ghana et au Nigeria. Mais aussi à Bruxelles.

Parler d’un monde globalisé et multipolaire et réduire l’espace de lutte pour un autre Congo à sa géographie physique peut relever de la mauvaise foi, de l’ignorance et/ou du manque de compréhension des enjeux.

Dans un monde interdépendant depuis la révolution industrielle, des rapports d’interdépendance existent entre plusieurs pays du monde. Ils font de ces pays de différents lieux de lutte pour l’émancipation politico-culturelle des uns et des autres. Parler d’un monde globalisé et multipolaire et réduire l’espace de lutte pour un autre  Congo à sa géographie physique peut relever de la mauvaise foi, de l’ignorance et/ou du manque de compréhension des enjeux. Ceux-ci sont à la fois locaux, nationaux, régionaux et mondiaux. Privilégier un seul lieu où les enjeux congolais se joue est un refus, un rejet du pluralisme des lieux de lutte aussi importants les uns que les autres.

Qui n’a pas vu Kikaya Bin Karubi et She Okitundu s’afficher avec François Hollande à la dernière rencontre de  »la françafrique » au Mali ? Qui n’a pas entendu parlé du lobbying mené par le même Kikaya Bin Karubi pour le compte de JOKA aux USA pour plus de 800.000 dollars ? Qui n’a pas entendu parlé des milliards de JOKA déposés dans les Iles Vierges Britanniques ? Mais aussi de Banro (canadien)  dans les montagnes du Kivu  et de Tenke Fungurume (US) dans le Katanga ?

Un monde multipolaire interconnecté offre la possibilité  de contrer la diplomatie officielle (mensongère et clientéliste) en recourant à la diplomatie officieuse et en travaillant en réseau avec les victimes mondiales du système néolibérale.

Une même guerre pour la destruction de la souveraineté des Etats

Souvent, les attaques dirigées contre les Congolais(es) de la diaspora ne semblent pas prendre en compte le fait que  »la guerre par morceau » menée contre le Congo-Kinshasa est la même que celle menée contre les autres pays du monde en 14-18, en 40-45 ; contre la Yougoslavie, contre l’Irak, contre  la Syrie, etc. Mais aussi contre la France, la Belgique, etc. C’est une même guerre pour la destruction de la souveraineté des Etats, la création d’un grand marché mondialisé alimenté par des Etats ratés.

Connaître et approfondir cette question demandent que des intellectuels classifiés parmi  les  »hérétiques » soient lus et critiqués. Les Noam Chomsky, les André Vltchek, les Diana Johnstone, les John Pilger, les Michel Collon, les Honoré Ngbanda, les Alain Deneault, les Mufoncol Tshiyoyo, les Charles Onana, les Jean-Pierre Badidike, les José Mpundu, les Thierry Nlandu, les Bénédicte Ndjoko, les André Mbata,etc. doivent être lus et critiqués sur cette question dont dépend un devenir collectif sage et intelligent au cœur  de l’Afrique.

La lutte pour un autre Congo et un véritable monde multipolaire a une dimension cognitive importante et elle ne peut pas se confiner dans un petit espace dénommé en géographie physique  »Congo-Kinshasa ». Des compatriotes soucieux de répondre aux appels de ce réductionnisme ont payé de leur vie avant que les méthodes auxquelles ils ont eu recours ne soient passées au crible de la critique.

Souvent, ces  »hérétiques » ou des intellectuels qualifiés  comme tels sont classés parmi  »les partisans des extrêmes » pour éviter qu’ils soient lus. Il en va de même  d’un monsieur comme Philippe  de Villiers. Il lui arrive de défendre les thèses que plusieurs partisans du monde multipolaire rejettent. Cela n’empêche, qu’à nos yeux, son livre intitulé  »Le moment est venu de dire ce que j’ai vu » (Paris, Albin Michel, 2015) soit recommandé à ceux qui veulent comprendre le fonctionnement du système de notre abrutissement collectif.

Tout ceci revient à dire que la lutte pour un autre Congo et un véritable monde multipolaire a une dimension cognitive importante et elle ne peut pas se confiner dans un petit espace dénommé  en géographie physique  »Congo-Kinshasa ». Des compatriotes soucieux de répondre aux appels de ce réductionnisme ont payé de leur vie avant que les méthodes auxquelles ils ont eu recours ne soient passées au crible de la critique. L’un des cas des plus emblématiques est celui d’Armand Tungulu. Son geste symbolique de désespoir- jeter un pierre au convoi d’alias Joseph Kabila- lui a coûté la vie. Et son assassinat présumé est resté non élucidé jusqu’à ce jour.

Pour la diversification des luttes et des lieux de ces luttes

La disparition de Frédéric Boyenge Bofala et de son compagnon d’infortune constitue un autre cas interpellant dont des compatriotes appelant aux actions sur terrain ne parlent pas depuis plus de deux mois. Où sont-ils passés, ces deux compatriotes, soucieux d’apporter physiquement leur part à l’édification du Congo de demain ? Qui en parle ? Peut-être les membres de leurs familles, du parti de Boyenga, leurs avocats, quelques compatriotes s’intéressant aux luttes menées par les leurs et c’est fini.

C’est vrai, la cause du Congo-Kinshasa, comme toutes les grandes causes patriotiques, mérite mobilisation et sacrifices suprêmes. Cela étant, la diversification des luttes et des lieux de ces luttes ne devrait pas être vite interprétée comme des signes de lâcheté.

C’est vrai, la cause du Congo-Kinshasa, comme toutes les grandes causes patriotiques, mérite mobilisation et sacrifices suprêmes. Cela étant, la diversification  des luttes et des lieux de ces luttes ne devrait pas être vite interprétée comme des signes de lâcheté. Des luttes sages et intelligentes ont toutes  »leur kaïros ». Ceci ne devrait pas être négligé. Comme ne devraient pas être négligés les sacrifices des compatriotes qui, ayant compris la grandeur de cette cause, s’exposent, au risque de leur vie. Le Père Vincent Machozi est parti des USA pour aller se battre au front de Beni-Lubero. Cela ne devrait pas jeter  de l’opprobre sur la lutte de Pauline Musube et ses amis mobilisés aux USA pour un autre Congo-Kinshasa fondé sur  »La Nouvelle Conscience Congolaise ».

Diversifier les luttes, les lieux où ils sont menées, les interconnecter dans un monde multipolaire en tenant compte des rapports de force est un exercice  sage et intelligent auquel les intellectuels organiques et structurant congolais doivent se livrer au quotidien.

 

Babanya Kabudi
Génération Lumumba

INGETA.

REINVENTONS

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Informer. Inspirer. Impacter.

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Développer un laboratoire d’idées sur le passé, présent et futur du Congo-Kinshasa.

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