Par Jean-Pierre Mbelu
Au même moment qu’une nouvelle race de Kongolais(es) serait en train de naître, le paradoxe kongolais se révèle au grand jour.
Les imaginaires rigidifiés envoûtés par l’hédonisme consumériste ont la peau dure au Kongo-Kinshasa. Ils génèrent la haine de soi, la haine de l’humain, la violence et la méchanceté gratuite. La parenthèse ouverte par l’AFDL en est l’une des matrices structurantes. Elle a créé certaines mauvaises habitudes dans un pays où l’analphabétisme, l’illettrisme et le trauma collectif ont participé d’un régression anthropologique aux conséquences catastrophiques. Dans ce pays, les principes, les règles et l’éthique sont mis à rude épreuve.
Vide spirituel, éthique et culturel
Celles et ceux qui entretiennent ces imaginaires rigidifiés ont une relation conflictuelle permanente au « pouvoir-os ». Ils veulent y avoir accès et y demeurer afin de bénéficier des avantages matérialistes qu’ils procurent. Ayant déifié ce « pouvoir-os », ils estiment que les sacrifices humains sont nécessaires pour le conserver et/ou le partager. Ils sont prêts à livrer leurs congénères à la mort afin de créer des conditions pouvant rendre possible leur participation à la mangeoire.
Le vide spirituel, éthique et culturel créé par l’ouverture de la parenthèse AFDL produit ses monstres au coeur de l’Afrique.
Le vide spirituel, éthique et culturel créé par l’ouverture de la parenthèse AFDL produit ses monstres au coeur de l’Afrique. « Lufu lumweke » est le slogan préféré de certaines victimes innocentes et/ou consentantes de ce vide. Nihilistes, elles ne croient plus en rien d’autre que dans « la déification de ce vide » pourvu que la jouissance de l’avoir leur soit garantie.
Plongés dans ce nihilisme, ils ont vendu leur coeur au diable. Leur coeur devient tellement petit à tel point que la tendresse, la générosité, la fraternité, l’amitié et la compassion (vraies) le désertent. Ils ne jurent plus que par la mort. Ils crient : « Lufu lumweke ».
Comment en sommes-nous arrivés là ?
La parenthèse ouverte par l’AFDL a favorisé la compétitivité et la concurrence dans la course vers le « pouvoir-os ». Elle a encensé les auteurs des crimes de guerre, de crimes économiques et des crimes contre l’humanité et créé une clientèle servile. Elle a favorisé des amnisties conférant de la respectabilité aux escadrons de la mort et aux autres bandits de grand chemin sans qu’une « éthique reconstructive » les précède. Bref, elle a promu les conciliabules et l’impunité.
La veille des patriotes souverainistes, courageux et conscients des enjeux pour lesquels la parenthèse de l’AFDL fut ouverte est la meilleure des voies. Veiller pourrait signifier mobiliser des compétences, des moyens matériels et technologiques, des idées et des stratégies pouvant peser dans la balance des rapports de force afin d’arriver à transmuter l’appareil de gestion du « pouvoir-os » en des institutions souverainistes dignes de ce nom et respectueuses des principes et des lois que le souverain primaire se donne (ou peut se donner).
Refermer cette parenthèse est difficile. Les complicités sont énormes au niveau de l’appareil gérant « le pouvoir-os ». La peur du gendarme ne suffira pas. Encore faudrait-il que ce gendarme soit souverain ! La veille des patriotes souverainistes, courageux et conscients des enjeux pour lesquels la parenthèse de l’AFDL fut ouverte est la meilleure des voies. Veiller pourrait signifier mobiliser des compétences, des moyens matériels et technologiques, des idées et des stratégies pouvant peser dans la balance des rapports de force afin d’arriver à transmuter l’appareil de gestion du « pouvoir-os » en des institutions souverainistes dignes de ce nom et respectueuses des principes et des lois que le souverain primaire se donne (ou peut se donner).
A ce point nommé, la nécessité des assises de la refondation du pays, d’une sorte de « Conférence Nationale Souveraine » n’est pas à écarter. Les imaginaires rigidifiés ont besoin d’être mis à nu et les lieux de la production des imaginaires alternatifs au service de la vie doivent être créés, imaginés et inventés collectivement. Pour cause. Le dernier processus électoraliste se révèle être une épée de Damoclès sur la tête d’un pays sans structure faîtière souverainiste. Le danger de balkanisation et d’implosion le guette. La parenthèse ouverte par l’AFDL entretient ses démons nihilistes, leurs fanatiques, leurs tambourinaires et leurs thuriféraires. Ils crient tous : « Lufu lumweke ».
Babanya Kabudi