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RDC: Combattre le M23 ou destituer Kabila?

RDC: Combattre le M23 ou destituer Kabila?

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Par Njoli Bondjenga.

Une énième épreuve de maturité se pose aux Congolais à travers la rébellion du M-23. L’avenir de ce peuple pourrait changer positivement s’il répond correctement à cette épreuve. La question qui lui est posée est la suivante : faut-il privilégier l’objectif de combattre M-23 ou maintenir le focus sur la nécessaire destitution de Kabila ? Laquelle de ces deux options est plus prioritaire, laquelle contribuerait positivement à la réalisation d’un État de droit ?

En politique what you see is not necessarily what you get, il faut donc éviter d’apprécier les situations en fonction seulement des perceptions qu’on en a et il faut surtout se méfier des émotions parce qu’elles peuvent être voulues par des malfaisants pour brouiller la raison des adversaires. Une évaluation lucide de la situation actuelle de la RDC pourrait suggérer des choix insoupçonnables mais peut-être meilleurs pour l’avenir de ce pays. Le bout d’histoire qui suit est un exemple légendaire d’un choix insoupçonné, difficile, à première vue irresponsable, mais qui s’est avéré brillant et bénéfique dans le contexte où il a été effectué.

En 1812, la puissante armée de Napoléon avait attaqué la Russie pour l’assujettir comme elle avait pu le faire avec le reste de l’Europe. Napoléon, plus puissant, était en train de gagner la guerre. Mais, bien que ne disposant pas d’assez de ressources, le général en chef russe, Koutouzov, qui n’avait nullement l’intention de laisser coloniser son peuple fit un choix insoupçonné qui devait paraître irresponsable aux yeux de ses compatriotes. Il refusa de livrer les batailles initiées par Napoléon et lui abandonna toutes les villes qu’il attaquait, attendant des conditions qui lui seraient favorables pour agir. Des mois plus tard, au bord du désespoir, les conditions espérées par Koutouzov se manifestèrent amplement : la Grande Armée de Napoléon s’épuisa et le rude hiver russe qui arriva anéantit les forces et le moral de ses troupes. Koutouzov passa alors à l’attaque et décima cette Grande Armée alors qu’elle se repliait à travers les campagnes russes enneigées. La nation russe fut sauvée.

La RDC n’est bien entendu pas la Russie du 19ème siècle, Kagamé n’est pas Napoléon et Kabila est loin d’être un Koutouzov mais les futurs chefs congolais peuvent s’inspirer de l’illustre général russe : choisir les bonnes cibles, attaquer à des moments opportuns de manière chirurgicale et avec détermination. Ainsi, la situation actuelle pourrait devenir profitable à l’objectif d’État de droit, garant des libertés de la paix et de la souveraineté.

Combattre le M23 ?

Le M-23 n’existerait pas, ou n’aurait pas la puissance qu’on lui prête, si la RDC n’était dirigée par un « président anormal ». L’absurde présence de J. Kabila aux postes de président de la RDC et de commandant suprême des FARDC est telle qu’il y aura toujours un M-23, ou autre groupe d’obédience rwandaise ou pas, à combattre.

La protection des citoyens congolais contre les violences de la guerre reste évidemment une priorité mais la preuve a été faite et refaite que ce n’est pas avec J. Kabila que l’État congolais sera en mesure de protéger efficacement ses citoyens. Il est donc contreproductif d’accorder une priorité politique au M-23 au lieu de se consacrer à neutraliser l’exécrable régime de J. Kabila qui est la vraie cause des déboires sécuritaires du pays.

Quand l’honneur d’une nation est offensé, ses citoyens blessés dans leur orgueil n’ont qu’une idée en tête : se venger, riposter même les yeux fermés. C’est humain mais il faut savoir que de cette attitude a déjà provoqué d’atroces guerres déraisonnables à l’humanité. Ce fût, par exemple, le cas de la première guerre mondiale qui fit plus de 20M de morts. Elle avait été déclenchée, tenez-vous bien, à cause de l’assassinat d’un certain duc à Sarajevo. Les pays impliqués et leurs alliés respectifs se sont alors exaltés et se sont battus pêle-mêle pendant 4 ans à cause des voyous.

Il faut dire aussi que de toute manière, on ne peut pas espérer combattre un ennemi sous les ordres d’un chef illégitime; c’est-à-dire un douteux chef qu’on ne reconnait pas. Et même s’il était légitime, on sait que J. Kabila ne favorisera jamais une victoire des FARDC contre ses anciens compagnons d’arme avec qui il a gardé des liens sacrés. Demain s’il est toujours au pouvoir, comme il le croit peut-être, son mentor Kabarebe ira encore snober les généraux des FARDC à Kinshasa dans ses bureaux. Des comportements aussi incompréhensibles ainsi que la terrible trahison de la bataille de Mushake auraient dû suffisamment édifier les FARDC et les faire réagir.

À bien donc regarder les choses, le plus important à faire par les Congolais actuellement c’est de destituer J. Kabila. Le M-23 mourra alors de lui-même ou se trouvera une vocation plus défendable.

Destituer Kabila.

Plus le temps passe plus la présence de J. Kabila à la tête de l’État congolais est handicapante pour l’unité et la paix dans ce pays. Sa destitution devient une solution qui s’impose pour permettre à la hiérarchie des FARDC de s’ajuster à sa mission en employant ses cadres sous-utilisés au profit des processus parallèles louches et du népotisme. Cette solution offrira aussi des meilleures chances à la mise en place de l’État de droit qui permettra à des chefs politiques plus motivés, respectueux de la vie humaine, plus patriotiques, démocrates et compétents, de mettre leurs talents au profit de la nation congolaise. Un personnel politique d’excellente qualité est là. Il est brimé, réprimé, intimidé par diverses pratiques humiliantes et frauduleuses qui n’épargnent même pas les processus électoraux. La destitution de Kabila libérera toute cette énergie positive étouffée et stimulera même l’apport de l’immense diaspora congolaise qui a démontré son intérêt à servir le pays d’origine.

Une nation unie est une nation forte capable de dissuader des convoitises et des agressions, sans même avoir à démontrer sa force. La vulnérabilité actuelle de la nation congolaise est essentiellement due à J. Kabila qui la divise, la trahit, la corrompt, l’empêche de fonctionner correctement et la fait piller par des étrangers. Après un désastreux mandat, des massacres et nombreux assassinats, la trahison de Mushake, un holdup électoral et maintenant la rébellion de ses amis, les Congolais ne peuvent plus hésiter à destituer Kabila pour récupérer leur pays et rétablir l’amour et la solidarité parmi eux. Tant mieux si des généraux congolais commencent à y penser à haute voix, il faut les appuyer et se rendre disponible pour supporter la transition.

L’après Kabila.

Il ne suffit évidemment pas de destituer Kabila, dont les jours à la tête de l’État congolais sont peut-être déjà comptés. Il faut aussi être prêt à assurer la relève et assumer une transition moins chaotique. Les politiciens du changement doivent s’y préparer et rassurer toutes les parties prenantes en dévoilant dès maintenant leur volonté, leur capacité et leurs plans. Ils ne peuvent pas compter sur les « institutions démocratiques » de Ngoyi Mulunda qui ne sont ni crédibles ni fiables et qui n’auront pas l’autorité morale nécessaire pour se faire respecter et contenir des débordements. Le risque de chaos est donc élevé et cela signifie que la RDC pourrait encore se soumettre au coaching de l’international et continuer à risquer la balkanisation. Les états majors des partis politiques du changement doivent prendre en compte le fait que les despotes n’envisagent jamais leurs chutes et que leurs cadres qui sont généralement incapables d’imaginer un passage de témoin ne seront d’aucuns secours. Principalement constitués de corrompus jouisseurs dont la devise semble être carpe diem, ces cadres ignorent le futur. Et quand survient la chute du chef, ils ne pensent qu’à se mettre à l’abri comme des cafards surpris par la lumière.

Agir dès maintenant signifie aussi qu’il faut tout faire pour rapatrier le débat congolais que J. Kabila fait promener dans le monde pour faire semblant d’agir pendant que la situation pourrit davantage au pays. C’est du vagabondage diplomatique irresponsable qu’il ne faut pas laisser faire. Il faut essayer de l’empêcher de continuer à externaliser le système politique congolais et d’y impliquer n’importe qui au détriment des acteurs qui comptent pour le peuple et la nation. Kabila peut aussi démissionner de lui-même s’il ne voit plus comment faire.

Il y a aussi le cas très frustrant des prisonniers politiques dont on revendique un peu trop mollement la libération. Il faut savoir que les despotes mesurent leurs pouvoirs à leur capacité de réprimer sans être inquiétés. La libération d’un leader politique de la trempe de DIOMI NDONGALA doit toujours être une exigence nationale revendiquée avec la dernière énergie car la survie des autres leaders du changement en dépend.

 

Njoli Bodjenga
Le 12 août 2012

 

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