L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu souligne comment le processus politique actuel vise à poursuivre le travail de néocolonisation du Congo, prône la mise en place d’un grand mouvement de base, et explique pourquoi non seulement le processus électoral ne sert à rien dans des pays comme la RDC mais aussi pourquoi nous devons réinventer l’imaginaire politique.
Sur le processus politique au Congo
Ce processus sert à avancer sérieusement dans la néocolonisation du Congo. Les codes minier et forestier du Congo participent de l’accaparement des terres congolaises riches en matières premières stratégiques et des forêts congolaises. Quand vous vous laissez prendre vos terres et vos forêts, que vous reste-t-il ? Il ne vous reste plus rien. Il ne vous reste plus que les costumes et les cravates. Nous sommes face à des compatriotes avec leurs amis des pays voisins, qui sont en train de vendre le Congo en recourant à un processus dit politique qu’eux-mêmes ne pilotent pas.
Si nous limitons nos analyses au processus électoral tel qu’il est en train de se faire, nous risquons de faire le jeu, de ceux qui voudraient voir le Congo s’enfoncer sérieusement dans le processus de colonisation. Le processus électoral est une distraction qui ne permet pas aux congolais de pouvoir échanger sur les questions essentielles.
Sur la nécessité d’un mouvement de base
Sur les querelles de clocher et les députés congolais
Demain s’il y a renversement des rapports de force, et si la question de la direction est résolue. Il ne faudrait pas que des femmes et des hommes de cet acabit puissent refaire de la politique au Congo. Parce que le problème n’est pas de faire de la politique, le problème est celui de se laisser corrompre. Ils sont tellement égoïstes et cupides que même là où les questions à débattre sont claires, ils essaient d’inventer des querelles de clocher.
Il y a une confiscation de l’espace politique congolais par des aventuriers. Quand nous nous en appelons à l’irruption des masses populaires dans l’arène politique, c’est pour qu’il y ait constamment un renouvellement de ces structures et institutions politiques. Pourquoi est-ce que demain, on ne mettrait pas fin au carriérisme politique ?
Sur la réinvention de l’imaginaire politique
Il faut urgemment travailler avec les élites organiques et structurantes éveillées à la restructuration, et à la réinvention de l’imaginaire. C’est indispensable. Voilà pourquoi nous en appelons à la révolution culturelle. La réinvention de l’imaginaire doit constamment conjuguer la prise de conscience de ce qu’on a comme tâches en tant que citoyen et la connaissance (du petit cercle d’aventuriers, de l’autre qui utilise ce petit cercle d’aventuriers pour pouvoir néocoloniser les congolais).
L’une des prises de consciences à laquelle doivent s’adonner les masses, c’est de remarquer que nous avons une petite clique qui fait partie des dominants qui trompe souvent les masses en leur faisant croire qu’elle est à leur service, une clique qui les paupérise.
Sur les partis politique avant-gardistes
Aujourd’hui nous n’avons pas de partis politiques avant-gardistes au Congo. Si nous en avions, les rapports de force auraient été renversés depuis la mort de Laurent-Désiré Kabila ou même depuis la conférence nationale souveraine.
Les partis politiques avant-gardistes devraient être les partis politiques des masses populaires.
Sur les élections
Sur Jean-Marie Kalonji, les enlèvements et assassinats au Congo
Au cours d’une lutte qui prend autant de temps, que l’on soit prudent ou pas, il y a des hommes et des femmes qui tomberont au front. C’est sur et certain. Mais leurs sang, sueurs et souffrances vont féconder la lutte, pour l’émancipation du pays. Cette lutte n’est pas simple. Elle est dure, âpre et longue, et il ne faut pas la limiter au niveau local. Regardez ce qui se passe au Brésil, en Argentine ou au Venezuela. Ce sont les mêmes dominants fondés sur l’argent, le pouvoir et les médias qui essaient de casser toute dynamique d’émancipation des peuples. Dans cette perspective, on peut comprendre sans le justifier que des Jean-Marie Kalonji croupisse en prison, qu’un père Vincent Machozi puisse être tué, que Chebeya ait été assassiné.