• IDEES & RESSOURCES POUR REINVENTER LE CONGO

Moïse Katumbi , les faux penaltys et l’arbitre

Moïse Katumbi , les faux penaltys et l’arbitre

Moïse Katumbi , les faux penaltys et l’arbitre 720 576 Ingeta

Par Jean-Pierre Mbelu

Il y a de petits textes qu’il faut de temps en temps lire et relire pour en pénétrer le sens tout en les situant dans un contexte historique plus large que celui immédiat où ils sont lus ou prononcés. L’expérience nous enseigne que pour certains textes ou discours lus ou prononcés au Congo-Kinshasa, le temps permet de mieux les approfondir. Question de laisser passer l’émotion et l’enthousiasme avec lesquels ils sont accueillis par ‘’la foule’’ au moment même où ils sont débités.

Lire un texte est un exercice souvent compliqué. La précipitation et le manque d’une fréquentation régulière des textes peuvent être des handicaps sérieux au cours de cet exercice.
A son retour à Lubumbashi, dans son discours aux Lushois venus l’accueillir, Moïse Katumbi a parlé de trois ‘’faux penaltys’’ en mettant en exergue le troisième. Plusieurs interprètes de son discours ont vite cru qu’il s’en prenait à la possibilité de la modification de la constitution pour un troisième mandat du ‘’raïs’’. Kyungu en a appelé au président de la CENI pour qu’il accélère les préparatifs électoraux.  Ici, une question se pose ? Pourquoi faut-il éviter un troisième ‘’faux penalty’’ après avoir accepté les deux premiers ? Plusieurs autres questions peuvent être posées. Qui fut l’arbitre au cours de deux premiers matches  dont Moïse Katumbi et Kyungu ont accepté les résultats ? Pourquoi ont-ils accepté les résultats des penaltys qu’ils estimaient ‘’faux’’ ? Qu’en ont-ils tirés comme dividendes ? Qu’est-ce que  le pays dans son ensemble en a tiré comme dividendes ?  Si Katumbi, Kyungu et les autres membres de la famille politique congolaise sont bénéficiaires des dividendes de  deux premiers ‘’faux penaltys’’, pourquoi faudrait-il que ‘’le raïs’’ soit seul à en payer le prix  au moyen du refus du  troisième ‘’faux penaltys’’ ?  D’où parlent Katumbi et Kyungu ? Quelles institutions, quels individus servent-ils ?

Pourquoi Moïse Katumbi a-t-il servi un  système fondé sur ‘’la fausseté’’ ?

En revenant sur le discours de Moïse Katumbi, il peut être difficile de lui accorder un moindre crédit en refusant de disqualifier tout le processus électoral dans lequel le Congo-Kinshasa est engagé depuis la guerre de l’AFDL jusqu’à ce jour. Deux équipes opposées dans un match de football connaissent leur arbitre et le règlement auquel elles sont  soumises. Pourquoi Moïse Katumbi a-t-il attendu qu’il y ait des bruits sur le troisième ‘’faux penalty’’ pour qu’il parle de deux premiers ? Il y a là un problème grave ! Et jusqu’à ce jour, l’identité de l’arbitre est resté inconnue. Les commentateurs  de ses propos ont passé outre cette question. Peut-être à l’exception de Mufoncol Tshiyoyo[1] dont la connaissance de la géopolitique mondiale est louable.

Revenir sur le discours de Moïse Katumbi peut aider à comprendre comment les prochaines élections au Congo-Kinshasa et la longue campagne qui les précède sont en train de devenir une vaste distraction destinée à amuser ‘’les spectateurs du théâtre politique congolais’’.

Mais bien avant son article, deux livres[2] (et plusieurs autres après) ont indiqué le nom de l’arbitre que plusieurs commentateurs du discours de Moïse Katumbi classifient aujourd’hui parmi les pompiers prêts à apporter de l’argent au Congo-Kinshasa pour qu’il organise des ‘’élections libres, transparentes et démocratiques’’.  ‘’Errare humanum est. Perseverare diabolicum’’, disent les latinistes. (L’erreur est humaine. Persévérer (dans l’erreur) est diabolique). Comment un arbitre persévérant, pendant plus de décennies, dans l’erreur, c’est-à-dire ‘’un arbitre diabolique’’ recourant en permanence à sa politique de ‘’diviser pour régner’’, toujours prêt à déshabiller St Paul pour habiller St Pierre,  peut-il, tout d’un coup, comme par baguette magique, se transformer en pompier sans que les rapports de force sur terrain aient changé profondément ?
Aussi, Moïse Katumbi serait-il disposé à dire publiquement ce qui a faussé les deux premiers penaltys ? Est-ce l’arbitre lui-même ou l’arbitre et ses juges de touche en complicité avec les bénéficiaires de ‘’la fausseté’’, c’est-à-dire tous ceux qui étaient autour du ‘’raïs’’ et en face ?  Pourquoi a-t-il servi un  système fondé sur ‘’la fausseté’’ ? Pourquoi  ne démissionne-t-il pas de lui-même après avoir remarqué cela ?
Plusieurs  compatriotes congolais écoutant le discours de Moïse Katumbi ont soutenu qu’il avait parlé en parabole. Qu’est-ce qu’une parabole ? Un parabole peut être un exemple pris dans la vie quotidienne (un match de football)   et dont une étude sérieuse et approfondie peut aider ses auditeurs à se ‘’dé-router’’ ; c’est-à-dire à prendre une autre route que celle qu’ils avaient suivie avant d’écouter la parabole.

« Co-produire » l’intérêt général avec les masses

Il serait donc mieux indiqué que les auditeurs de la parabole de Moïse Katumbi se ‘’dé-routent’’ ; qu’ils rompent avec ‘’le faux processus’’ fondé sur ‘’les trois faux penaltys’’ avec  ‘’un faux arbitre’’, de ‘’faux juges de touche’’ et de ‘’faux joueurs’’  pour s’engager sur un autre dont ils seront eux-mêmes les acteurs. Un processus d’émancipation politique vis-à-vis du ‘’faux arbitre’’ qu’est la communauté occidentale nous semble être un pas important sur cette ‘’dé-route’’.
Un leadership sociopolitique et culturel charismatique et responsable prenant appui sur les masses paysannes et contrôlé par elles pour qu’ils deviennent ensembles des ‘’co-producteurs’’ de l’intérêt général est indispensable à ce processus. Et ‘’co-produire’’ l’intérêt général avec les masses paysannes critiques ne s’improvise pas. Cela se construit dans la solidarité, la réciprocité et la coopération sur le court, moyen et long terme ; en marge de la logique partisane Celle-ci fabrique des ‘’nègres’’ au service du ‘’faux arbitre’’ pour les intérêts de ses entreprises transnationales, usurpatrices du pouvoir légitime des Etats souverains, gardiens et protecteurs des droits et libertés fondamentales des peuples.
Revenir sur le discours de Moïse Katumbi peut aider à comprendre comment les prochaines élections  au Congo-Kinshasa et la longue campagne qui les précède sont en train de devenir une vaste distraction destinée à amuser ‘’les spectateurs du théâtre politique congolais’’. Elles suscitent de plus en plus de méfiance et invitent les Congolais et les Congolaises éveillés à penser davantage à la réappropriation du processus de leur émancipation politique en rompant avec ‘’les faussaires’’, ‘’nègres de service’’ du faux système de l’avilissement et de l’abrutissement collectifs des frères  et sœurs  de Lumumba.
 
Mbelu Babanya Kabudi

[2] H. NGBANDA NZAMBO, Crimes organisées en Afrique centrale. Révélations sur les réseaux rwandais et occidentaux, Paris, Duboiris, 2004 et  C. ONANA, Europe, crimes et censure au Congo. Les documents qui accusent, Paris, Duboiris, 2012.

INGETA.

REINVENTONS

LE CONGO

Informer. Inspirer. Impacter.

Notre travail consiste à :
Développer un laboratoire d’idées sur le passé, présent et futur du Congo-Kinshasa.

Proposer un lieu unique de décryptage, de discussion et de diffusion des réalités et perspectives du Congo-Kinshasa.

Aiguiser l’esprit critique et vulgariser les informations sur les enjeux du Congo, à travers une variété de supports et de contenus (analyses, entretiens, vidéos, verbatims, campagnes, livres, journal).