Par Bénédicte Kumbi Ndjoko
Il faut rappeler à l’humanité que notre lutte, la lutte pour les droits de la femme est un combat que l’on doit mener main dans la main avec nos compagnons, nos fils, nos frères, nos amis hommes.
L’humanité vient du ventre de celle qui nourrit, soigne, protège le monde en devenir. L’humilier, la battre, la vilipender c’est semer les graines de notre suicide à tous.
Il est un de ces lieux sur cette terre où la femme depuis plus de vingt ans subit la folie organisée des hommes…et des femmes. En République Démocratique du Congo 400 000 femmes sont violées chaque année et il faut multiplier ce chiffre par le nombre d’année où le pays subit une guerre prédatrice et de basse intensité. Notre couardise face à cette situation catastrophique se matérialise par le fait que nous voulons faire comme si tout ceci était un phénomène marginal, comme si cela ne concernait qu’une infime partie de notre pays.
Lutter pour les droits de la femme, en ce qui concerne le Congo, passe nécessairement par l’arrêt de la guerre. On ne peut prétendre édicter des lois, organiser des conférences, continuer à organiser la charité et ne pas réclamer le droit de vivre en paix pour ces millions de femmes.
Les mots « guerre », « viol », « souffrance » ont disparu de nos bouches pour mieux oublier. On a laissé la charge de toute cette tragédie sur les épaules d’un homme, le Dr Mukwege, pour qu’il s’occupe de notre conscience que nous soignons à coup de dons. Nous refusons de dire ce qui se passe et qui se voit en discutant élections, passation pacifique du pouvoir alors que les assassins de ces ventres congolais eux ne sont nullement inquiétés. Ces sexes, ces couteaux, ces armes que l’on enfonce dans le vagin des femmes sont un délire de quelques Congolais perdus dans des théories du complot.
Lutter pour les droits de la femme, en ce qui concerne le Congo, passe nécessairement par l’arrêt de la guerre. On ne peut prétendre édicter des lois, organiser des conférences, continuer à organiser la charité et ne pas réclamer le droit de vivre en paix pour ces millions de femmes. Faire le procès de la guerre au Congo fera grincer des dents, obligera un pan de la société à se débarrasser de sa peur d’affronter la vérité, de mettre à nu toutes les solidarités criminelles qui se sont organisées depuis vingt ans dans ce pays. Si l’on veut ouvrir les horizons pour les femmes et les hommes de ce pays, il faudra s’asseoir et écouter celles et ceux pour qui le pire est sorti du dictionnaire pour bouleverser leurs vies.
C’est à ce travail sans concession que nous appelle mama Masika Katsuva de son au-delà, elle qui après de multiples viols a pris par la main d’autres femmes pour les consoler et leur dire qu’il existait une humanité prête à se battre pour elles et leurs enfants, prête à tout faire pour qu’un jour justice leur soit rendue.
Il est plus que temps de reparler des femmes du Congo.
Bénédicte Kumbi Ndjoko