Par Jean-Pierre Mbelu
Si mes souvenirs sont bons, au mois de novembre 2019, la Monusco va totaliser vingt (20) ans au Congo-Kinshasa sans que sa partie Est connaisse la paix. Pourquoi ? Que fait cette agence de l’ONU au pays de Lumumba ? Comment avons-nous pu, en tant que Congolais(es), oublié sa présence permanente. Plusieurs jeunes congolais ne sauront presque pas dire exactement à quel moment la Monusco arrive chez nous « pour faire la paix ».
La politique est une question de temps long et même très long. Des compatriotes ayant oublié que l’assassinat de Lumumba a lieu pendant que l’ONU est au Congo-Kinshasa trouveront des questions posées au sujet de sa présence dans ce pays sans intérêt. La politique étant une question de temps long et même très long, les lecteurs de Frantz Fanon connaissent « la carte » que joue l’ONU au pays de Lumumba depuis son assassinat en 1961. Ce rôle est bien explicité dans son texte intitulé « La mort de Lumumba : pouvions-nous faire autrement ? »
Procéder autrement ?
A son avis, il était possible de procéder autrement. Malheureusement, cela n’a pas été le cas. Il n’en sera plus non plus le cas après le 02 août 1998, après l’assassinat de Laurent-Désiré Kabila et après « la mascarade électorale » de décembre 2018.
La politique étant une question de temps long et même très long, les lecteurs de Frantz Fanon connaissent « la carte » que joue l’ONU au pays de Lumumba depuis son assassinat en 1961.
Nous ne procéderons pas collectivement autrement tant que nous n’aurons pas lu, compris et partagé les textes de Frantz Fanon sur la question. Plusieurs années après lui, Jean-Claude Willame a compris qu’au cours de la guerre dite de « libération » et après elle, le Congo-Kinshasa comptant l’ONU parmi « les faiseurs de paix » est un pays sous tutelle. (Lire son livre intitulé « Les «faiseurs de paix » au Congo. Gestion d’une crise internationale dans un Etat sous tutelle », Bruxelles, Complexe, 2007. Le livre dit l’inanité de l’Etat et dévoile « le jeu » de l’ONU.) Longtemps après Jean-Claude Willame, un journaliste de « La Libre Afrique » révèle « le jeu » d’une responsable de l’ONU au cœur de « la politique congolaise.
Dans son article, ce journaliste de « La Libre Afrique » affirme, sans convaincre, que « la représentante de l’ONU » est sortie de son rôle. Ce faisant, il dit plus ou moins comment « la mascarade électorale » fut conclue. Voici le texte : « Le lundi 7, Martin Fayulu doit revoir Mme Zerrougui, chez lui, à l’ombre de la tour du Pullman, l’ancien Grand Hôtel de Kinshasa. La dame de l’Onu a rendez-vous avec Joseph Kabila à 11 heures du matin. Quand elle rencontre Fayulu, celui-ci comprend que le pouvoir en place a fait un choix. La “patronne” des casques bleus, qui est largement sortie de son rôle lors de cette semaine cruciale, va expliquer au candidat de Lamuka que Kabila “a un problème avec Katumbi et Bemba”. C’est le dernier contact dans ce cadre entre Leila Zerrougui et Martin Fayulu. Pour le candidat de Lamuka, la messe est dite. Tshisekedi est invité à rencontrer Kabila. Il ne se fait pas prier et se rend à la ferme de Kingakati. En route, il espère décrocher la primature. Premier ministre de Shadary. Il ressortira de cette rencontre dans la peau du potentiel Président. Il ne manque que la signature d’un accord entre les deux clans. Le texte, dont une mouture avait déjà été préparée en août pour sceller l’union Kabila-Shadary, est largement revu pour coller aux nouvelles conditions. Si Tshisekedi signe ce texte préparé par les mêmes Néhémie, Tshibanda, Ruberwa…, il sera président mais devra cohabiter avec un gouvernement complètement entre les mains du FCC, la plateforme de Kabila. »
Le coup d’Etat permanent au Congo
Dans les débats congolais (au cours desquels fusent les insultes à gogo) sur « la mascarade électorale » de décembre 2018, cette rencontre est soit oubliée ou passée complètement sous silence. Tout se passe comme si « la patronne des casques bleus » n’avait joué aucun rôle dans le dénouement de cette « mascarade électorale ».Pourquoi ? Que vient faire « la patronne des casques bleus » dans « un processus électoral » organisé par « un pays (dit) souverain » ? Qui a pris cette initiative de l’impliquer dans cette affaire ?
Et si ce qui s’est passé au Congo-Kinshasa au mois de décembre 2018 participait du « coup d’ Etat permanent » orchestré dans ce pays par « les faiseurs des rois » depuis l’assassinat de Lumumba le 17 janvier 1961?
Tout ceci ne peut pas être compris, me semble-t-il, si nous n’étudions pas le mode de fonctionnement réel de l’ONU. L’un de ses membres nous en dit un mot dans un livre intéressant à lire avec discernement. Il s’agit de Jean Ziegler. Il écrit : « Change le monde : il en a besoin », Paris, Seuil 2016. Un article peut jeter une bonne lumière sur tout ça. Il est écrit par Rubèn Ramos en 2014. Le voici :« Venezuela, théorie de Coups d’États « Doux » : une pratique paramilitaire de violence et terreur » (Alizo Rojo).
Et si ce qui s’est passé au Congo-Kinshasa au mois de décembre 2018 participait du « coup d’ Etat permanent » orchestré dans ce pays par « les faiseurs des rois » depuis l’assassinat de Lumumba le 17 janvier 1961?
Bon ! Maintenant que nous avons décidé de ne plus lire parce que « les intellectuels congolais » ont été au service des « sous-fifres » et autres « Chevaux de Troie », allons seulement…
Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961