Par Jean-Pierre Mbelu
2016 est un rendez-vous »décivilisateur » réussi. C’est un rendez-vous politico-humaniste raté. Pas pour des raisons liées à la mauvaise foi. Non. Mais plutôt à l’abrutissement et à la dégradation des néocoloniaux et de leurs supplétifs. N’ayant pas atteint en tout et pour tout leur objectif majeur, c’est-à-dire dépeupler les terres congolaises et s’en accaparer, ils pourraient persévérer dans cet abrutissement et cette dégradation morale, intellectuelle et spirituelle.
Une vidéo où le génie congolais compile plusieurs extraits contradictoires de Lambert Mende met sur la place publique »une confidence » faite par Joseph Kabila à ses proches : «En 2016, il y aura un passage civilisé de pouvoir entre un président sortant et un président rentrant.» [1]
Kabila, Kagamé: Des marionnettes téléguidées de l’extérieur
Plusieurs compatriotes ont cru en ce contre-vérité pour plusieurs raisons. Premièrement, ils croient à tort que »Joseph Kabila » a »le pouvoir » politique au Congo-Kinshasa. Cela est faux. »Joseph Kabila » est »un Cheval de Troie » de Pauk Kagame au Congo-Kinshasa. Et Paul Kagame est »un nègre de service » des multinationales anglo-saxonnes. Tous les deux sont des marionnettes téléguidées de l’extérieur.
»Joseph Kabila » est »un Cheval de Troie » de Pauk Kagame au Congo-Kinshasa. Et Paul Kagame est »un nègre de service » des multinationales anglo-saxonnes. Tous les deux sont des marionnettes téléguidées de l’extérieur.
Tous deux sont instrumentalisés par »les nouveaux cercles de pouvoir » que sont devenues, vers les années 1990, les trans et les multinationales se servant des hommes et femmes politiques comme de »leurs petites mains ». Cette question étudiée par Isabelle Stengers [2] et Philippe Pignarre est abordée par »un témoin de l’intérieur » du système politique néocolonial et néolibéral, Philippe de Villiers [3]. Noam Chomsky l’approfondit dans »Deux heures de lucidité ».
Croire que »Joseph Kabila » a le pouvoir relève d’une analyse locale biaisée de l’approche de l’usurpation du pouvoir par »les nouveaux cercles illégitimes » de celui-ci. Cette analyse est consécutive à une vue du Congo-Kinshasa réduit aux dimensions d’une île dans un monde globalisé.
Cette analyse est répandue et entretenue par les partisans de »la nouvelle indépendance » du Congo-Kinshasa pouvant être acquise par »palier », étape par étape, avec »l’aide diplomatique » de »petites mains des usurpateurs ». Elle est aussi entretenue par »les durs de la kabilie ». Eux aussi croient fermement que »le raïs » a »le pouvoir ». Ils pratiquent la politique de l’autruche face à la tutelle de la Monusco et à celle des Institutions Financières Internationales. Ces »progressistes » et ces »durs de la kabilie » ignorent l’histoire. Volontairement ou involontairement, ils évitent de relire cette histoire en évoquant le cas de Mobutu. Toutes les critiques formulées autour de la mascarade électorale de 2006 et de celle de 2011 sont rapidement oubliées.
Kabila n’a pas le pouvoir
Bref, »Joseph Kabila » n’a pas »le pouvoir ». Il assume un rôle destructeur ; celui d’ »un Cheval de Troie ». Et la plus belle fille du monde donne que ce qu’elle a, dit-on. »Joseph Kabila » n’ayant pas le pouvoir, il ne peut pas le passer à un autre ( »Président rentrant »). Parler d’une passation civilisée de pouvoir, dans ce contexte, constitue un abus de langage ou plutôt une inversion sémantique.
Une autre raison plaide pour une non-passation »civilisée » du pouvoir : la participation de »Joseph Kabila » et de plusieurs »durs de la kabilie » aux groupes armés criminels dont Lambert Mende a parlé dans son point de presse du 24 mars 2016.[4] Ces groupes armés criminels mobilisés par les puissances extérieures, des »petites mains » par excellence des trans et des multinationales, ont été entraînés dans une barbarie »décivilisatrice ». Ils ont participé à une guerre endémique raciste et de prédation. Cette guerre perpétuelle a réveillé les instincts enfouis, le mépris, la convoitise, la cupidité, la haine raciale et ethnique ; elle a créé, au Congo-Kinshasa, d’immenses espaces de relativisme moral et de violence.
»Joseph Kabila » n’a pas »le pouvoir ». Il assume un rôle destructeur ; celui d’ »un Cheval de Troie ». Et la plus belle fille du monde donne que ce qu’elle a, dit-on. »Joseph Kabila » n’ayant pas le pouvoir, il ne peut pas le passer à un autre ( »Président rentrant »). Parler d’une passation civilisée de pouvoir, dans ce contexte, constitue un abus de langage ou plutôt une inversion sémantique.
Comment, dans ce contexte, passer d’une »barbarie décivilisatrice » à un »pouvoir civilisé » sans qu’intervienne »une justice transitionnelle » pour exorciser ce phénomène de »décivilisation » en vue de »reciviliser » ces immenses espaces corrompus ? Notons que la guerre, quand elle ne participe pas du phénomène de la légitime défense, quand elle est un recours instrumentalisé à la violence, abrutit, dégrade mentalement, moralement et spirituellement.
Comment des individus abrutis, dégradés mentalement, moralement et spirituellement, peuvent favoriser »la passation civilisée d’un pouvoir inexistant » ? A notre connaissance, les acteurs pléniers de cette guerre perpétuelle et leurs supplétifs sont impunis jusqu’à ce jour. Il est donc impossible qu’il y ait »une passation civilisée » d’un pouvoir inexistant dans des immenses espaces »décivilisés ». Croire en cela, c’est tomber dans l’illusion.
Pour la formation et le désenvoûtement des masses populaires
Le Congo-Kinshasa a fortement besoin d’une justice transitionnelle pour se »reciviliser » et réparer les dommages commis par »les petites mains du nouveau désordre mondial » et repartir sur de nouvelles bases. Il a besoin d’une insurrection populaire des consciences pouvant conduire à cette justice transitionnelle et à une rupture refondatrice. Les élites organiques et structurantes doivent y travailler sur le court, moyen et long terme. 2016 est un rendez-vous »décivilisateur » .
Que faire dans l’immédiat ? Poursuivre et/ou commencer, au niveau des collectifs citoyens, l’éducation, la formation et le désenvoûtement des masses populaires et des élites naïves pour qu’elles deviennent capables de renter dans l’arène politique et de renverser les rapports de force demain.
C’est un rendez-vous politico-humaniste raté. Pas pour des raisons liées à la mauvaise foi. Non. Mais plutôt à l’abrutissement et à la dégradation des néocoloniaux et de leurs supplétifs. N’ayant pas atteint en tout et pour tout leur objectif majeur, c’est-à-dire dépeupler les terres congolaises et s’en accaparer, ils pourraient persévérer dans cet abrutissement et cette dégradation morale, intellectuelle et spirituelle.
Frantz Fanon disait ceci à leur sujet en s’en prenant à ses compatriotes Africains : « Notre tort à nous, Africains, est d’avoir oublié que l’ennemi ne recule jamais sincèrement. Il ne comprends jamais. Il capitule, mais ne se convertit pas. » Que faire dans l’immédiat ? Poursuivre et/ou commencer, au niveau des collectifs citoyens, l’éducation, la formation et le désenvoûtement des masses populaires et des élites naïves pour qu’elles deviennent capables de renter dans l’arène politique et de renverser les rapports de force demain. Ce travail est à faire à temps et à contretemps.
Mbelu Babanya Kabudi
——————-
1. https://www.youtube.com/watch?v=oQJxAlprU4c
2. P. PIGNARRE et I. STENGERS, La sorcellerie capitaliste. Pratiques de désenvoûtement, Paris, La découverte, 2005.
3. P. de VILLIERS, Le moment est venu de dire ce que j’ai vu, Paris, Albin Michel, 2015.
4. https://www.ingeta.com/quand-mende-dit-la-verite-suite-et-fin/