Par Jean-Pierre Mbelu
Malgré la traite négrière, la colonisation et la néocolonisation, dans le chef de plusieurs compatriotes, l’identité congolaise vit ; l’âme congolaise vit. Pour eux, ces paradigmes négatifs ont joué un rôle de catalyseur du point de vue identitaire.
Il n’est pas rare que le monde entier se moque des Congolais(es). Il est rare que ceux qui se moquent des Congolais(es) fassent, au même moment, une relecture de l’histoire du Congo-Kinshasa.
Les Congolais et « désorientation existentielle »
Rares sont les citoyens du monde pouvant se rappeler que ce pays a connu, sous Léopold II, des mains coupées. C’est-à-dire un esclavage exterminant des Congolais(es) incapables de fournir la quantité de caoutchouc indispensable à l’industrie automobile occidentale selon les administrateurs du Roi des Belges. Le Congo et les Congolais(es) ont réussi à survivre à cette traite négrière. Et ce pays a fourni aux USA l’uranium dont ils ont fait usage pour gagner, en partie, la deuxième guerre mondiale. Comment a-t-il été payé ? En monnaie de singe. Les Anglo-saxons, bénéficiaires de la victoire sur les Nazis, ont participé à l’assassinat du premier ministre Congolais issu des élections au suffrage universel, Patrice Emery Lumumba, en janvier 1961. Ainsi ont-ils créé, ce que Frantz Fanon dénomme, »la désorientation existentielle ». Avec la complicité de certains congolais.
Après »les mains coupées », la réclusion à perpétuité de Kimbangu, l’assassinat de Lumumba et de ses proches, l’assassinat de Pierre Mulele, etc. les Congolais(es) ont connu une longue période de »désorientation existentielle ». Tenaillés par la peur et la désespérance, ils n’ont plus eu d’autre choix que de passer plus de trois décennies à danser pour »un agent des services secrets occidentaux », Mobutu Sese Seko. Avec l’aide de l’Occident et des élites compradores congolaises, Mobutu a su mater toutes les velléités de résistance congolaises. Les révoltes des étudiants et les débuts d’un parti politique comme l’UDPS ont été matés dans une répression sans nom.
Après »les mains coupées », la réclusion à perpétuité de Kimbangu, l’assassinat de Lumumba et de ses proches, l’assassinat de Pierre Mulele, etc. les Congolais(es) ont connu une longue période de »désorientation existentielle ».
De »mains coupées » à l’assassinat de Lumumba en passant par les révoltes des étudiants et les débuts de l’UDSP, l’Occident fut le grand gagnant. Disons les multinationales occidentales et quelques familles les ayant servies comme »de petites mains », des garçons de course, de »bana bitinda ». Les profits engrangés au Congo-Kinshasa et le nombre de nègres de service congolais »désorientés existentiellement » n’ont pas mis fin à l’existence de ce pays, ‘cœur de l’Afrique ».
»La débrouillardise » et les relations familiales l’ont aidé à ne pas disparaître. Disons, audacieusement, que l’appauvrissement matériel du Congo-Kinshasa, n’a pas eu raison de son âme, de son identité. Beaucoup de Congolais(es), malgré la souffrance et la mort, malgré la répression et l’oppression, ont continué à se reproduire biologiquement et à entretenir l’aide familiale et tribale.
Identité Vs Voleurs de poule
La répression, l’oppression et la misère ont fait que plusieurs filles et fils du Congo-Kinshasa quittent leur pays et aillent chercher mieux ailleurs. Pendant plusieurs d’années, plusieurs de ses compatriotes ont joué le rôle »d’assurances vie, maladie, mort et scolaire » pour les leurs. Plusieurs ont profité de leur séjour en dehors de leur pays pour se former dans plusieurs domaines de la vie. Ils ont conduit leurs enfants à les imiter. Disons que malgré la traite négrière, la colonisation et la néocolonisation, dans le chef de plusieurs compatriotes, l’identité congolaise vit ; l’âme congolaise vit. Pour eux, ces paradigmes négatifs ont jour un rôle de catalyseur du point de vue identitaire.
Les Congolais(es) ont déjà connu »un génocide » de plus de dix millions d’âmes sans qu’ils (elles) ne disparaissent du cœur de l’Afrique. Malgré l’assassinat de Lumumba et »la désorientation existentielle » frappant surtout »les politichiens », ils ont été capables de rigoler et de danser »le mutuashi » au cœur de la dictature de Mobutu.
Cette identité fait face aux »voleurs de poules ». C’est-à-dire à ces usurpateurs de la nationalité congolaise, à leurs thuriféraires et à leurs tambourinaires habillés en costume et cravate, constituant des réseaux maffieux de prédation pour dépouiller les Congolais(es) de leurs richesses du sol et du sous-sol et de leur matière grise pour en faire des esclaves à vie. Ces derniers venus font fausse route. Ils font semblant de connaître l’histoire du Congo de Kimbangu sans en tirer toutes les leçons.
Ils devraient apprendre que les Congolais(es) ont déjà connu »un génocide » de plus de dix millions d’âmes sans qu’ils (elles) ne disparaissent du cœur de l’Afrique. Malgré l’assassinat de Lumumba et »la désorientation existentielle » frappant surtout »les politichiens », ils ont été capables de rigoler et de danser »le mutuashi » au cœur de la dictature de Mobutu. Plusieurs de ces compatriotes n’ont pas déifié l’argent : ils se contentent de trop peu et sont tournés vers le partage et les valeurs familiales.
Les brebis galeuses roulant dans les grosses bagnoles, avec trois ou quatre téléphones portables, en costume cravate, sont, à force de manger à tous les râteliers , en train de se minoriser. »Ces voleurs de poules » ne sauront plus où donner de la tête demain.
Faire du Congo une terre d’avenir?
Ils ont tellement un mépris inutile pour les Congolais(es) qu’ils croient qu’en allant déposer l’argent à Panama ou en volant de l’argent à partir de la vente des passeports congolais, ils finiront par faire du pays de Lumumba »une éternelle néocolonie ». Ils se mentent à eux-mêmes. Le front des réseaux sociaux et des médias alternatifs est bien occupé par les Congolais(es). A l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Ils savent suivre tous ces dossiers et les archiver. Un jour, ils s’en serviront.
»Les voleurs de poules » congolaises peuvent, forts de leur cupidité courtemiste, se moquer des Congolais(es). Ils n’ont pas appris que la répression, l’oppression et la misère dont souffrent les Congolais(es) ont aidé plusieurs d’entre eux à promouvoir les valeurs familiales et identitaires plus solides que les valeurs marchandes.
Les Benjamin Kalombo d’Aprodec -jouant au saint Thomas- ont déjà déposé certains dossiers à la CPI. Nous pouvons ou ne pas être d’accord avec eux en arguant que »la guerre perpétuelle » menée au Congo-Kinshasa est aussi celle de la politique et de la justice internationale ; eux veulent mettre leurs doigts dans »les cicatrices » de cette politique et de cette justice internationale pour vérifier si nos allégations sont fondées ou pas. Ce faisant, ils donnent la preuve que plusieurs compatriotes luttent sur plusieurs front, les uns avec plus d’efficacité que les autres, pour l’indépendance et la souveraineté réelle de leur pays.
»Les voleurs de poules » congolaises peuvent, forts de leur cupidité courtemiste, se moquer des Congolais(es). Ils n’ont pas appris que la répression, l’oppression et la misère dont souffrent les Congolais(es) ont aidé plusieurs d’entre eux à promouvoir les valeurs familiales et identitaires plus solides que les valeurs marchandes. Ce sont ces Congolaises et ces Congolais-là, avec leurs alliés, qui feront du Congo-Kinshasa de demain, une terre d’avenir. Ils (elles) devront comprendre davantage que c’est en restant capables d’entretenir ces valeurs tout en restant ouvert à l’altérité qu’ils (elles) en viendront, petit à petit, à bout de »voleurs de leurs poules » aux œufs d’or.
Les documents existent. Ils sont archivés. Les septante société du »clan Kabila », ses cent vingt permis miniers et ses ventes des passeports congolais se comprennent mieux en relisant le rapport Kassem de 2002. Dès le début de »la guerre de l’AFDL », »ce clan », allié de plusieurs compatriotes, des Ougandais, des Rwandais et des Occidentaux, faisait déjà partie du »réseau mafieux d’élite de prédation ». C’est sa raison d’être au Congo-Kinshasa. Le contraire aurait étonné.
Babanya Kabudi
Génération Lumumba