Par Jean-Pierre Mbelu
Discutant avec l’un de mes maîtres à penser congolais sur mes appréhensions et des réactions d’une certaine frange de nos populations au sujet de l’engagement de la CENCO dans ses missions auprès de la MP et du Rassemblement, voici sa réponse :
« JP, est-ce que les gens réalisent suffisamment que nous avons un combat à mener contre les maîtres du monde qui sont esclavagistes, colonialistes, prédateurs etc…??? il ne suffit pas de mettre hors d’état de nuire un de leurs agents comme JOKA, comme l’a été MOBUTU, comme l’est aussi TSHISEKEDI et tous les autres soit-disant leaders politiques pour prétendre avoir gagné la bataille !!!! Et puis, pendant que nous croyons que c’est nous qui sommes en train de nous débarrasser d’un agent de service, en réalité c’est encore eux qui ne veulent de leur agent de service et qui cherchent et préparent un autre à notre insu…. dès que le moment est arrivé, ils font partir celui dont ils n’ont plus besoin et le remplacent par un autre et le jeu continue…. parfois même en pire…. Notre histoire illustre bien mon propos. Nous avons fait fuir Mobutu et nous avons cru que c’était fini avec la néocolonisation et l’esclavagisme des maîtres du monde…. ils ont trouvé un autre : Laurent Désiré Kabila qu’ils sont par la suite éliminé physiquement parce qu’il n’était pas suffisamment docile et les défiait… Après l’avoir éliminé, ils ont placé son « fils » (soi-disant), un jeune homme que l’on croyait pouvoir manipuler à souhait mais qui, à un moment donné, leur a tourné le dos et est devenu dangereux pour leur système….
Aujourd’hui comme hier, ils vont se servir de nous et de notre mécontentement ou de nos frustrations pour se débarrasser de leur robot qui ne leur convient plus… dans l’entre-temps, nous n’avons préparé personne pour damer le pion aux maîtres du monde…. qu’est-ce qui va se passer ? Ils vont, en temps voulu, le remplacer par un autre robot fabriqué par eux et qui va poursuivre la même oeuvre de colonisation, d’esclavage et de prédation…. Beaucoup de nos frères qui sont aujourd’hui dans le régime de Kabila, un régime qui fait parti du système néocapitaliste ultralibéral, inhumain, sont venus de la diaspora et avaient combattu le régime de Mobutu et non le système dans lequel fonctionnait ce régime. Et que s’est-il passé ? Dans le régime Kabila qu’ils ont présenté comme une alternative au régime Mobutu, ils ont servi et continuent à servir le même système qui produit les mêmes effets destructeurs pour l’homme congolais et pour la société congolaise.
En cela, Mungul Diaka a été un visionnaire lorsqu’à l’entrée de l’AFDL, il a prononcé une phrase qui est restée historique : « On a changé de chauffeur, mais pas le véhicule. Qui plus est le véhicule en question est sur une crique (entendez : le véhicule en question est en panne). Le vieux Mungul Diaka d’illustre mémoire, voulait tout simplement dire que nous avons réussi une alternance politique, une alternance au pouvoir mais nous n’avons pas créé une alternative. Jusqu’à quand allons-nous continuer ce jeu-là ? Alors que faire ? D’abord, un : un travail de décolonisation mentale à fond à réaliser chez tous les congolais sans exception (et donc même chez les Evêques). Ensuite, deux : fabriquer, formater, former nos propres dirigeants qui seront à notre service et qui auront des comptes à nous rendre et que nous pouvons sanctionner nous-mêmes lorsqu’ils ne remplissent pas le contrat qui les lient à nous qui devenons leurs maîtres. Enfin, trois : mettre en place un système économique qui nous rend suffisamment autonomes pour que nous puissions traiter avec les autres d’égal à égal, d’adulte à adulte…
Il nous faut donc nous battre pour une libération mentale (culturelle et idéologique), pour une libération économique et enfin, une libération politique…. la victoire dans cette lutte de libération n’est possible que dans un grand élan de solidarité de tout le peuple congolais car unis nous sommes forts et divisés nous sommes à la merci des « maîtres » et dominants du monde….
Quant à l’Eglise catholique, parlons-en ! L’histoire nous montre que l’Eglise, comme institution, a toujours été du côté des puissants et des grands de ce monde, des dominants…. et cela depuis que l’empereur Constantin le grand a réussi à récupérer l’Eglise dans le système impérial romain qui dominait le monde de cette époque… Là où la hiérarchie de l’Eglise a essayé de se mettre du côté des petits, des pauvres, elle a été combattue par Rome, l’autorité suprême de l’Eglise, c’est le cas de l’Eglise de l’Amérique latine avec sa théologie de la libération jugée par trop marxiste et donc contre la religion…. contre l’enseignement de l’Eglise… L’Eglise catholique, ici chez nous, a été l’un des bras de la colonisation, de l’esclavage…. et cela est historique…. dépendante économiquement de l’Occident et donc des maîtres du monde, comme le pays lui-même, l’Eglise catholique a du mal à être profondément libératrice des mentalités… Il faut donc une véritable révolution ecclésiale pour que l’Eglise rejoigne réellement la mission que son « fondateur » lui a confiée : celle de libérer les hommes de tous les maux (non seulement physiques mais aussi mentaux et sociaux… ). Il faut libérer l’Eglise pour qu’elle devienne libératrice…. libérez l’Eglise de la soif du pouvoir, de l’avoir et de la gloire : telle est la tâche qui nous incombe aujourd’hui….
Il nous faut donc nous battre pour une libération mentale (culturelle et idéologique), pour une libération économique et enfin, une libération politique…. la victoire dans cette lutte de libération n’est possible que dans un grand élan de solidarité de tout le peuple congolais car unis nous sommes forts et divisés nous sommes à la merci des « maîtres » et dominants du monde…. Ce combat se mène à travers trois types d’action : actions d’information et de formation (conscientisation-sensibilisation) pour un éveil des consciences, actions de revendication de nos droits et libertés, mais surtout actions de construction i.e. construire un autre système, un autre Congo différent de celui d’hier et d’aujourd’hui…. un Congo où l’homme sera au centre, où l’avoir (l’économique) sera au service de l’être (de l’homme), un Congo où les rapports entre les citoyens seront des rapports de coopération et non de domination, un Congo de vérité et liberté, un Congo de justice et de paix…. »