Par Jean-Pierre Mbelu
« L’histoire nous apprend que nous ne savons pas apprendre de l’histoire » (M. JEAN)
Lire Kikaya Bin Karubi a un intérêt particulier. Il est un cacique la « kabilie » et un proche du « raïs ». Revenir sur son article intitulé « Sauver Kabila relève du devoir citoyen » est un bel exercice d’analyse « politique » et historique. Cet article dit tout ou presque sur la crise de la désorientation dont souffre le Kongo-Kinshasa depuis l’assassinat de Lumumba le 17 janvier 1961.
Depuis cette date, le pays est confié aux sous-fifres des « décideurs » que les compatriotes nomment quand même « Présidents ». Ici, il y a un problème sémantique grave. Comment pouvons-nous appeler « Présidents » des personnages qui n’ont pas été choisis par le peuple pour « présider à ses destinés » ? Il y a là un malentendu historique. Il perdure jusqu’à ce jour. Les mots ne sont pas questionnés. Leur usage non plus.
« Le raïs » de Kikaya Bin Karubi est « un Cheval de Troie » de Paul Kagame
Voici ce que Kikaya écrit : « La constante à retenir est que les quatre prédécesseurs de Felix Tshisekedi sont arrivés au pouvoir avec la bénédiction de l’axe Washington-Bruxelles. » Pour aller plus loin que Kikaya et en savoir sérieusement plus, plusieurs livres peuvent être lus et relus. Un seul peut être retenu à titre illustratif : L. DE WITTE, L’ascension de Mobutu. Comment la Belgique et les USA ont installé une dictature, Bruxelles, Investig’Action, 2017.
Qui délègue « alias Joseph Kabila » en 2001 pour qu’il aille « remettre le Congo sur la table des décideurs » ? Qui ? En tout cas, pas le peuple kongolais. Ce sont ceux qui l’ont choisi.
L’exemple de son « raïs » clarifie davantage ce qu’il dit. A peine le dévolu jeté sur lui, il se rend chez « les décideurs ». Que va-t-il faire ? Il veut être reconnu. Et lorsqu’il est reçu en audience à la Maison Blanche par Georges Bush père, Joseph Kabila déclare : « Je suis venu remettre le Congo sur la table des décideurs pour un partenariat gagnant-gagnant », écrit Kikaya Bin Karubi.
Qui délègue « alias Joseph Kabila » en 2001 pour qu’il aille « remettre le Congo sur la table des décideurs » ? Qui ? En tout cas, pas le peuple kongolais. Ce sont ceux qui l’ont choisi. Ils sont connus par Jean-Luc Schaffhauser, député européen dont les vidéos sont de plus en plus auditionnées par plusieurs compatriotes. L’une d’elle est celle-ci : 22.06.2016 Massacres dans l’est du Congo.
Denis Sassou Nguesso en sait, lui aussi, quelque chose. Dans ses échanges avec Pierre Péan, il dit clairement que « le raïs » de Kikaya Bin Karubi est « un Cheval de Troie » de Paul Kagame. « Venu de nulle part, en quinze jours, il a eu les honneurs de Paris, Bruxelles, Londres et Washington…Joseph est un cheval de Troie du président rwandais. Officiellement, pendant la journée, il s’oppose à Paul Kagame, mais, la nuit tombée, il marche avec lui… Or, en Afrique, c’est la nuit que les choses importantes se passent… », confie Sassou Nguesso à Pierre Péan après lui avoir dit que Kagame lui-même est « un paralytique au service des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et d’Israël. » (P. PEAN, Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique, Paris, Fayard, 2010, 531-532)
Cracher sur cette « kabilie »…
Bref, Kikaya Bin Karubi revient sur la prise en otage du pays de Lumumba depuis son assassinat par l’axe Paris-Bruxelles-Londres-Washington-Israël par ses sous-fifres interposés dénommés abusivement « Présidents ». Voilà ce qui est, entre autres, à la base de la crise de désorientation existentielle kongolaise devenue une débâcle.
De plus en plus, des membres de la Kabilie en parlent sans froid aux yeux et sans honte (comme ils sont nés avant la honte). Ils crachent sur cette « kabilie » d’odieuse mémoire. Kikaya Bin Karubi le fait aussi en croyant participer au sauvetage du « cheval de Troie » de Kagame.
Cette vérité, nous sommes plusieurs à nous la cacher en entretenant de gros mensonges et une hypocrisie collective nuisible à la lutte pour le renversement des rapports de force. Ici, il s’agit d’une lutte volontariste organisée sur le court, moyen et long terme pour la souveraineté réelle. C’est-à-dire le renversement de l’axe susmentionné par le peuple souverain désignant lui-même ses gouvernants dans le respect du principe d’autodétermination des peuples.
Cette lutte a coûté, coûte et coûtera encore la sueur, les larmes et le sang. Elle exigera des minorités éveillées et souverainistes beaucoup de lucidité, de discernement et une grande intelligence collective info-formée. Mais aussi une sérieuse sortie la crise de sens en revisitant notre sémantique historiquement. Elle est trompeuse par bien des côtés.
Ceci n’a rien à voir avec la souveraineté de pacotille dont ne cessait de parler « la kabilie » tout en dépouillant le pays des moyens de sa puissance institutionnelle, structurelle et en affaiblissant ses forces de sécurité. Pour preuve, elle a, cette « kabilie », organisé des « élections-pièges-à-cons » pendant plus ou moins deux décennies pour enrichir ses caciques, débaucher ses faux opposants et non pour créer un véritable peuple souverain. D’ailleurs, de plus en plus, ses membres en parlent sans froid aux yeux et sans honte (comme ils sont nés avant la honte). Ils crachent sur cette « kabilie » d’odieuse mémoire. Kikaya Bin Karubi le fait aussi en croyant participer au sauvetage du « cheval de Troie » de Kagame. Mawa trop !
Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961