L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu décrypte l’actualité politique congolaise de la semaine écoulée, analyse le modus operandi d’un Kabila qui n’a jamais été élu, et dénonce le mythe de la question ethnique et son instrumentalisation en RDC aujourd’hui. « Nous ne devons pas analyser le cas du Congo en croyant que nous faisons exception dans la politique impérialiste et néocoloniale des pays occidentaux aujourd’hui ».
Sur le déploiement de drones en RDC
Tout de qui se fait en ce moment n’est pas de nature à mettre fin à la guerre de basse intensité qui se prolonge chez nous. Cette guerre pour ces initiateurs et commanditaires est un moyen de pouvoir avoir accès à nos matières premières stratégiques de notre pays à moindre coût. Chercher à y mettre fin, serait une façon de pouvoir échapper à ce marché bradé de nos matières premières. Ces drones ne sont qu’une nouvelle manière de nous distraire. Ces gens là n’ont aucunement besoin de mettre fin à la guerre chez nous. L’ONU, depuis notre indépendance, constitue pour nous un problème et non une solution.
Sur la présence croissante des drones en Afrique
Dans la plupart de nos pays africains aujourd’hui, on est en train de déployer des drones, non pas pour nous permettre de vivre comme des pays indépendants et souverains mais pour nous contrôler.
Africom a pour mission en Afrique de contrôler l’accès aux matières premières stratégiques. Donc, si nous n’avons pas en tête cette politique impérialiste et néocoloniale nous ne comprendront pas grand-chose à ce que l’ONU est en train de faire chez nous.
Sur la force africaine neutre
Rwanda, Ouganda : Ces pays là sont tellement pauvres qu’ils passent par le canal de leurs armées pour pouvoir aussi piller notre pays. Quand ils disent qu’ils n’ont plus besoin de la MONUSCO, il y a une part de vérité dans le sens, où elle n’est d’aucune utilité pour le Congo, mais de là à prétendre que cette force neutre sera efficace au moment où elle ne sera composée que de militaires africains, il y a un pas que je ne franchis pas. D’autant plus que ces militaires africains appartiennent à des pays impliqués dans la misère que le Congo connaît aujourd’hui.
Sur le report sine die de la signature d’un accord régional à Addis Abeba sur la paix dans l’Est de la RDC
En cherchant à mener des négociations avec le M23, Kinshasa a cherché à blanchir Kigali et Kampala. Si Kigali et Kampala avaient accepté de signer l’accord prévu à Addis Abeba, ils reviendraient à la case départ, c’est-à-dire qu’ils confirmeraient que ce sont eux les sous-traitants des grandes puissances qui rendent la guerre de basse intensité permanente au Congo. Donc, à Addis Abeba, Kinshasa est tombé dans son propre piège. Le gouvernement usurpateur de Kinshasa ne peut pas vouloir une chose et son contraire. Et, c’est encore un signe qui ne ment pas : Nos institutions ont été infiltrées par le Rwanda et l’Ouganda : chaque fois qu’une issue à la situation de guerre que nous connaissons se présente, nous revenons toujours à la case départ. Il y a purement et simplement dans le chef du gouvernement usurpateur de Kinshasa, un manque criant de volonté politique. Je dirai même que ce gouvernement usurpateur fait bien son travail parce qu’il tient à innocenter Kigali et Kampala.
Sur le rôle du gouvernement congolais
La RDC ne peut pas remporter quelque victoire diplomatique que ce soit parce que ceux qui ont infiltré nos institutions et dirigent la RDC ne sont pas là pour remporter des victoires. Ils sont là pour affaiblir de l’intérieur et permettre le pillage permanent de nos matières premières stratégiques.
Sur les déclarations de Kagamé sur CNN
C’est un discours public destiné aux parrains de Kagamé qui l’aide à pouvoir passer pour un pompier alors qu’il est le pyromane. Kagamé a réussi à copier ses parrains qui ont toujours un double discours. Le monde aujourd’hui est dirigé par des bandits et des criminels, et ces bandits se respectent entre eux. Ils ont créé un réseau transnational de criminalité. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la respectabilité internationale de Kagamé. Les soutiens de Paul Kagamé sont des criminels. C’est sa chance.
Même s’il obtient l’immunité. Il ne faut pas oublier que les occidentaux n’ont pas d’amis. Rappelez-vous de ce qu’ils ont fait à Mobutu ! Kagamé finira un jour par payer les crimes qu’il a commis.
Sur le modus operandi de Kabila
Il achète les gens, il crée un clientélisme. Il utilise des minorités organisées négativement au Congo pour essayer d’influencer les majorités congolaises pour qu’elles soutiennent Kabila. Nous nous rendons compte que ce monsieur n’a jamais été élu. Il achète des voix.
Les élections chez nous ont été des pièges à cons. Le monsieur, choisi au préalable, essaie de distribuer de l’argent à gauche et à droite, pour pouvoir se maintenir à la tête du pays et dire qu’il a été élu démocratiquement.
Sur les nouvelles ethnies et le faux débat ethnique
Avec la montée de la mondialisation, il y a des nouvelles familles, tribus et ethnies qui se sont créées dans tous les pays. Des réseaux transnationaux et transculturels de gens qui ne travaillent que pour leurs intérêts propres.
Si on essaie de nous faire croire que c’est le tribalisme, l’ethnocentrisme qui triomphe chez nous, on risque de passer à côté de cette nouvelle donne qui fait que, au Nord, au Sud, à l’Est, à l’Ouest du monde, les individus, qui font partie du 1% qui pille et tue le monde, ont constitué leurs nouvelles tribus ou ethnies. Les liens traditionnels servent à ces gens là comme des liens parasitaires. Aujourd’hui, au Congo, on trouve dans toutes les ethnies des minorités négatives qui travaillent contre le bonheur collectif partagé. On ne peut pas dire que ces minorités négatives appartiennent exclusivement à telle ou telle ethnie. Mais ces minorités ne sont pas aussi efficaces que les oligarques qui dirigent le monde aujourd’hui et qui ont comme marionnettes et sous-traitants, les Kagamé, Museveni et Kabila.
Sur le mythe du soutien katangais à Kabila
Les Katangais qui ont été corrompus, ont adopté Kabila tout en sachant que tout ce qu’il dit sur ses liens biologiques ne sont pas vrais. Et même là, les véritables soutiens de Kabila ne se trouvent pas seulement au Congo. Si Kabila n’avait que des soutiens au Congo, il n’existerait déjà plus comme président. C’est ce réseau transnational de prédation qui le maintient à la tête du pays. Mais pour illusion chez nous, on nous montre ce que nous aimons voir : c’est-à-dire, il y a la tribu, il y a l’ethnie qui est derrière. Il y a une instrumentalisation de la tribu et de l’ethnie par le 1%.
C’est très subtil et difficile à comprendre parce que nous avons été éduqués dans la mentalité selon laquelle quand il y a des responsables, ils sont soutenus par leurs tribus et ethnies. Or aujourd’hui ces derniers sont instrumentalisés et se contentent le plus souvent de ramasser les miettes qui tombent de la table de ceux qui dirigent.
Sur la classe dominante au Congo
Aujourd’hui vous avez les vieux dinosaures mobutistes et les nouveaux prédateurs kabilistes qui constituent la classe dominante au Congo. Ce 1% de congolais s’associe avec le 1% des autres pays pour nous mener cette guerre de basse intensité. Il y a un réseau d’élites composé de vieux dinosaures mobutistes et nouveaux prédateurs kabilistes qui font la guerre au Congo et aux congolais parce qu’ils doivent se maintenir à tout prix au pouvoir.