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Ils veulent être et/ou devenir « balobeli » ya peuple

Ils veulent être et/ou devenir « balobeli » ya peuple

Ils veulent être et/ou devenir « balobeli » ya peuple 770 514 Ingeta

Par Jean-Pierre Mbelu

Au Kongo-Kinshasa, dès qu’un cycle électoral touche à sa fin, plusieurs compatriotes commencent à parler du prochain. Ceux et celles qui n’ont pas pu trouver leur compte s’engagent à préparer à la prochaine échéance pour être et/ou devenir les « balobeli » ya peuple, c’est-à-dire ceux et celles qui parlent au nom du peuple. « Koloba » signifie parler. « Kolobela » signifie parler pour quelqu’un, plaider sa cause. « Balobeli », ce sont ceux qui assument la responsabilité de « kolobela ».

Des politiciens et/ou des politiciennes ayant la prétention d’être et/ou de devenir « les balobeli » du peuple savent-ils (elles) que ce qui fait de l’humain « un animal politique », c’est le fait qu’il soit doté de la parole ? C’est cela qui le différencie de l’animal.

« Kolobela batu », parler pour autrui (pour les gens), peut être une façon de leur arracher ce qu’ils ont d’essentiel c’est-à-dire « la parole ». Vouloir devenir « balobeli ya batu » peut être dangereux dans la mesure où cela les exclut de l’accès au processus de leur humanisation avec et pour les autres.

« L’homme est (…) défini comme un animal politique, parce qu’ en plus de la fonction vocative du cri animal exprimant peine et plaisir, il est doté d’un langage articulé, susceptible d’énoncer, à partir de la peine et du plaisir, ce qui est juste et injuste, tolérable et intolérable. L’accès au politique, c’est-à-dire à la vie de la Cité au sens d’espace commun d’engagement pour l’intérêt général, est proposé ici non comme une donnée contingente et relative à une culture (…), mais comme ce qui fait le propre de l’humanisation des animaux parlants que nous sommes, la condition même de notre accès à l’humain [1]. »

« Kolobela batu », parler pour autrui (pour les gens), peut être une façon de leur arracher ce qu’ils ont d’essentiel c’est-à-dire « la parole ». Or « la parole, dont les hommes sont ici dotés, rejoint les caractéristiques de l’ énonciation, dire ici et maintenant, pour nous et pour tous, le juste et l’injuste [2]. »

« Kolobela batu » peut être interprété comme un moyen de handicaper l’une des procédures contribuant à la construction de la citoyenneté, la prise interactive de la parole les habitants d’une Cité dans la production collective de l’intérêt collectif.

Les habitants d’une Cité deviennent des citoyens par leur engagement politique à coopérer pour produire le commun. Donc, vouloir devenir « balobeli ya batu » peut être dangereux dans la mesure où cela les exclut de l’accès au processus de leur humanisation avec et pour les autres.

Donc, « kolobela batu » peut se révéler être une entreprise populicide. (à suivre)

Mbelu Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961

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[1] M. HANSOTTE, Les intelligences citoyennes. Comment se prend et s’invente la parole collective, Bruxelles, De Boek, 2002, p. 18.

[2] Ibidem, p. 19.

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