Par Jean-Pierre Mbelu
Le débat émotionnel suscité par l’adhésion d’ Elikya Mbokolo au FCC devrait être approfondi.
Le problème au Congo-Kinshasa est que plusieurs débats ont une part émotionnelle très importante. Souvent, ils durent le temps d’un feu de paille. Il est rare que les questions suscitant des débats émotionnels chez nous aient le temps d’être sérieusement analysées avant que nous passions à autre chose. Je ne le dirai jamais assez : »Remettre les cerveaux à l’endroit prendra du temps. Et même beaucoup de temps. »
Quand la question des intellectuels est posée chez nous, rares sont des compatriotes prenant le temps de chercher à savoir pourquoi »cette classe » a été créée. Plus rares encore sont des compatriotes pouvant chercher à en saisir des bribes d’héritage historique. Sur cette question, je partage l’approche de Noam Chosmky dans »Deux heures de lucidité ».
Dans ce livre, ce grand penseur de tous les temps fait la différence entre »les prophètes de la cour » et »les véritables prophètes ». A son avis, »un intellectuel » digne de ce nom est »un prophète ». C’est-à-dire un homme capable de remettre en question les orientations socio-politiques de sa société à ses risques et périls. Ces »prophètes » étaient tués ou envoyés au désert par »les Rois » et les autres grands du monde. En marge de ces »véritables prophètes », il y avait aussi les prophètes de la cour. Ceux-ci avaient pour mission de caresser »les Rois » et »les Grands » dans le sens de leur poil.
L’identification de tous les prophètes à la catégorie des « prophètes engagés » pour le bien commun, pour l’intérêt général, pour les petits et les autres laissés-pour-compte est une erreur d’appréciation. Elle ne permet pas de penser à la possibilité des « prophètes-intellectuels » experts de la cour des « rois fainéants ».
Dans cette approche du »nabi » (prophète-intellectuel », il est intéressant de savoir que les deux catégories sont reconnues par la société comme relevant du domaine des prophètes-intellectuels. L’identification de tous les prophètes à la catégorie des »prophètes engagés » pour le bien commun, pour l’intérêt général, pour les petits et les autres laissés-pour-compte est une erreur d’appréciation.
Elle ne permet pas de penser à la possibilité des »prophètes-intellectuels » experts de la cour des »rois fainéants ». Elle réduit tous les »prophètes-intellectuels » à une seule catégorie et peut avoir comme conséquence le rejet des »prophètes-intellectuels » en bloc et la promotion de l’ignorance, du fanatisme et de la bêtise. Dans cet ordre d’idées, l’adhésion d’Elikya Mbokolo au FCC pourrait conduire plusieurs d’entre nous à croire que tous »les prophètes-intellectuels » congolais font »la politique du ventre ». Dieu merci ! Cette adhésion a lieu au moment où 100 autres »prophètes-intellectuels » congolais ont publié leur »Manifeste » contre le troisième mandat d’un »Président illégal et illégitime ». (Bien que n’étant pas d’accord avec eux sur leur approche cloisonnée des disciplines scientifiques, je soutiens qu’ils se démarquent des »prophètes-intellectuels » de la cour du »Roi fainéant », Alias Joseph Kabila). ( à suivre)
Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961