Par Jean-Jacques Wondo/DESC-Wondo.org
31 août 2014. Des sources présidentielles confidentielles viennent de nous confirmer le décès du Général Major Lucien Bahuma Ambamba à Pretoria, capitale de l’Afrique du Sud, officiellement des suites d’un infarctus cardiaque durant une réunion de sécurité avec son homologue de la ville district Kasese. (Ouganda) d’où il était évacué d’urgence en Afrique du Sud, paralysé et dans un état critique. Certaines sources le donnaient déjà pour mort mais aux dernières nouvelles il aurait été maintenu sous respiration artificielle avant son décès ce dimanche matin confirmé à DESC par plusieurs sources. Le feu général Bahuma était commandant de la 8 ème région militaire du Nord-Kivu. C‘est lui que DESC considère comme étant le véritable artisan opératique et tactique de la déroute du M23. Nous l’expliquons dans l’ouvrage pratiquement finalisé sous mise en forme actuellement et qui paraitra incessamment sous peu. Nous reprenons ci-dessous, pêle-mêle son portrait et quelques extraits d’un chapitre coécrit avec Jérôme Kengawe dans l’ouvrage à paraître.
Qui est le Général-major Lucien Bahuma Ambamba ?
Originaire de la Province Orientale (de la tribu Topoke du village Tolaw dans la collectivité Liutua du territoire d’Isangidans le district de Tshopo), le général Lucien Bahuma Ambamba est de la 10ème promotion de l’école des officiers EFO Kananga et un ancien de la DSP de Mobutu ayant aidé le président Denis Sassou Nguesso du Congo-Brazzaville à revenir au pouvoir après la guerre civil de 1997. Il a rejoint par la suite le MLC de Jean-Pierre Bembaavant son intégration aux FARDC à la suite du brassage.
Il a d’abord évolué dans le bataillon de sécurité de la BSP (Brigade Spéciale Présidentielle avant de devenir une division) dans les FAZ sous le commandement du feu général Bosembo Ilondjo (le père du Dr. Maurice Ilo Bosembo évoluant au Canada) , major a l’époque (1977-1982). Il a ensuite servi comme garde du corps rapproché du président Mobutu. Outre Saint-Cyr, le feu général Bahuma a suivi un stage de formation a l’Ecole de renseignement militaire de l’armée égyptienne d’Alexandrie. Au sein de la DSP, il a été officier de renseignement (T2) et puis comme adjoint du feu colonel Ngoy Meta (commandant du centre d’instructions de Kibomango, un luba du Kasaï assassiné sous Mobutu). Il fut parmi les officiers ex-FAZ qui ont créé le centre d’instruction de Pambua (à Gbadolite – Equateur) qui forma les dernières promotions de la DSP appelées Bana ya Sadam Hussein (sobriquet du bouillonnant feu capitaine Kongolu Mobutu)
L’actuel commandant de la 8ème région militaire, correspondant à la province du Nord-Kivu, a suivi une formation complémentaire à l’académie militaire française de Saint-Cyr en France. Il a également travaillé dans le renseignement militaire congolais. Il doit sa notoriété grâce à son professionnalisme et ses qualités de bon tacticien qui ont permis aux FARDC de se réorganiser après la prise de Goma par le M23 en novembre 2012. Sa bonne collaboration avec les responsables de la brigade d’intervention de la MONUSCO a permis à l’action conjointe menée entre les FARDC et la MONUSCO de venir à bout du M23 et d’être un des acteurs clé de cette victoire historique des FARDC.
La réorganisation des FARDC au front sous le commandement du général Lucien Bahuma
Bien avant la prise de Goma en novembre 2012, après la défection des FARDC à Bunagana suite à l’offensive du M23, le 6 juillet 2012, le général Vainqueur Mayala et 600 soldats FARDC ont fui à Kisoro en Ouganda et abandonné un énorme stock d’armes lourdes, de munitions et de chars . Le général Jean-Lucien Bahuma Ambamba va lui succéder comme commandant intérimaire de la 8ème région militaire, puis confirmé à ce poste par la suite. Il s’en suivra une réorganisation des unités et un toilettage au niveau du personnel, notamment par le rajeunissement des cadres, des unités formées c’est-à-dire celles qui ont suivi un entrainement militaire. Bahuma Ambamba, un ancien officier des FAZ formée à Saint-Cyr (France) et ayant évolué à la DSP, va pour ce faire, ne reprendre que des soldats originaires des provinces ouest du pays pour éviter l’infiltration des troupes FARDC par des éléments sympathiques au M23. Il s’est en fait inspiré de la stratégie appliquée en 2004 au Sud-Kivu par le général Félix Mbuza Mabe(Nkumu Embanze de son vrai nom) qui, à l’époque, était parvenu à repousser les assauts des éléments du colonel Tutsi rwandais Mutebusi et son frère ethnique Obedi Rwibasira, actuellement commandant de la 4ème région militaire au Kasaï-Occidental.
Il est parvenu à réorganiser les unités de combat en n’alignant au front que des soldats originaires des provinces de l’ouest du pays et quelques Maï-Maï connus pour leur hostilité au Rwanda. Cette réorganisation avait permis aux FARDC de mieux se défendre contre le M23. Mais pour des raisons tactiques injustifiées, après les combats qui se sont déroulés du 15 au 18 novembre 2012 lors de l’entrée du M23 dans Goma au cours desquels les FARDC ont opposé au M23 une résistance farouche et infligé de lourdes pertes à leur ennemi, plus de 150 morts du côté rebelle , le général Bahuma a reçu l’ordre venant de Kinshasa de laisser la conduite des opérations au général Gabriel Amisi Tango Four (aujourd’hui réhabilité par le Conseil supérieur de la défense résidé par Kabila, le 30 juillet 2014). Tango Four va ordonner aux FARDC de se replier à Sake, facilitant ainsi l’entrée du M23 à Goma, sans résistance.
(…) Le général-major Lucien Bahuma Ambamba, commandant de la 8ème région militaire du Nord-Kivu, et ses commandants d’unités subordonnées, notamment le jeune colonel Mamadou Ndala, sont unanimement présentés comme les grands artisans du dispositif opératif et tactique mis en place par les FARDC contre le M23 depuis le mois d’août 2013. Bahuma Ambamba a bénéficié du soutien du lieutenant-général Olenga, le commandant intérimaire de l’armée de terre, qui a permis que les troupes soient régulièrement payées à temps avec en plus une prime de motivation. Cela a permis d’avoir sur le front des troupes plus motivées, différentes des soldats désorganisés, démoralisés par leur hiérarchie et mal encadrés qui ont combattu lors de la débâcle de Goma une année plus tôt. De plus, le général Olenga a rappelé plusieurs commandants de compagnie et officiers Tutsi de la 8ème région militaire à Kinshasa, sous prétexte de les intégrer dans l’état-major ou le ministère de la défense dans le but de les éloigner des zones opérationnelles si facilement balayés quand Goma a été capturé en novembre l’année dernière.
(…) En moins d’une année, le major-général-major Bahuma Ambamba, un ancien commando de la DSP des ex-FAZ sous Mobutu, est parvenu de transformer les unités placées sous son commandement en véritable task force opérationnelle par l’amélioration de l’encadrement et de la préparation en vue des opérations combinées en relevant leur moral. Cela lui a valu de gagner une bonne réputation tant auprès de ses troupes que des forces de la MONUSCO au Nord-Kivu. Il est également devenu populaire dans tout le pays et a gagné l’estime de toute la population.
Cette guerre a montré que disciplinées et bien encadrées et équipées, les FARDC sont capables de mener avec une certaine efficacité les opérations dites interarmes impliquant l’usage de l’aviation légère avec les hélicoptères d’attaque l’artillerie, des procédés de tirs de lance-roquettes multiples (orgues de Staline).
Collaboration gagnante Bahuma – Brigade d’intervention ONU dans la défaite du M23
(…) Sur le terrain, en octobre 2012, la MONUSCO, grâce à son dispositif de renseignement performant déployé au Nord-Kivu, a reçu des informations indiquant l’imminence de l’offensive du M23 en cas d’échec des négociations de paix Kampala.
Les troupes de la brigade d’intervention de la MONUSCO, équipés d’avions et hélicoptères performants de type Mi-8, Oryx et Mi -26 ont été séparés en trois groupes de travail et déployées près de Kiwanja, Munigi / Kibati et au nord-ouest de Rutshuru. Ces éléments de la brigade d’intervention ont été déployés en tant que force de blocage pour empêcher les replis injustifiés des FARDC comme ce fut le cas lors de la dernière série de combats en août 2013.
Dans le même temps, le général Lucien Bahuma Ambamba, le commandant de la 8ème région militaire et des opérations avait déployé sur trois positions : le 41ème bataillon commando FARDC formé par les sud-africains ainsi que les 805ème, 806ème et 809ème bataillons d’infanterie soutenus par l’artillerie lourde, des lance-roquettes et un appui-feu aérien de la MONUSCO sur trois fronts, respectivement à proximité de Kibati, Kiwanja et dans le parc national des Virunga entre Busenene et Kalengera. Les éléments du bataillon spécial commando de la Tanzanie ont également joué un rôle déterminant dans l’éclatement de certains verrous stratégiques mis en place par le M23 appuyés par les rwandais. D’où la perte des trois de leurs hommes.
Des questions sans doute sans réponses
Au moment de boucler ce flash-info et l’analyse y afférente, la famille biologique du général Bahuma vient de confirmer son décès.
Serait-il poursuivi par la même malédiction que son aîné Félix Nkumu Mbuza Mabe ou payerait-il le même prix que son collègue, le Colonel Mamadou Ndala? Ou bien il serait juste simplement décédé des suites d’une malade normale ?
Une rapide observation et analyse de DESC fait remarquer que tous les officiers militaires congolais, vainqueurs du FPR et leurs alliés dans la région sont soit assassinés, décédé ou neutralisés (Donatien Mahele qui a repoussé les premiers assauts du FPR en 1990 et Kagame ne le lui a jamais pardonné : lisez notre thèse de son assassinat dans l’ouvrage Les Armées au Congo-Kinshasa; Ndala, Bahuma, le général Prospère Nabyolwa (ancien commandant de 10ème RM au Sud-Kivu lors de l’attaque du colonel Tutsi rwandais Jules Muebusi et le général Mai-Mai Padiri, tous deux sans fonction actuellement à Kinshasa). Une simple coïncidence ou des morts suspectes?
En même temps, les officiers-Tutsi et alliés ayant combattu dans les rangs des rebellions créées par le Rwanda bénéficient de bonnes grâces du Commandant suprême des FARDC : Bisengimana, Amisi, Masunzu, Biamungu, Obedi, Amisi etc.
Ce sont là les questions qui nous intéressent au DESC dans le cadre de nos analyses).
Nous demandons à toute personne qui détiendrait la moindre information au sujet de l’intéressé, depuis la débâcle militaire du M23, de nous contacter d’urgence dans ma boîte privée : jjwondo@yahoo.fr ou sur . La Discrétion dans le traitement de l’information est garantie, comme d’habitude.
C’est vraiment très important pour nous dans le cadre de nos analyses stratégiques sur la RDC. Nous vous en remercions d’avance.
Au nom de DESC, nous saluons sa mémoire et présentons nos profondes condoléances à toute sa famille biologique, à ses frères d’armes des FARDC, Ex-DSP, Saint-Cyr en France et Paix à son Âme.
Je suis personnellement très révolté par cette perte car c’est une grande perte pour la RDC. Et l’hémorragie ne semble pas se limiter avec lui..., je l’avais prédit dans mes précédentes analyses. Le général François Olenga,malgré ses assurances du fait de ses accointances financières et affairistes avec le président Joseph Kabila dans l’achat et le trafic d’armes, pourrait être la prochaine cible. Il le sait très bien quand nous lui avons conseillé de ne pas se rendre à Beni, pour rapatrier le corps de Ndala car il y restait une poche d’assaillants GR et ex-CNDP aux ordres du Général Moundos Akili. La même information a été également livrée au général Bahuma qui a finalement exigé de s’y rendre avec le ministre Katangais Alexandre Luba Tambo., comme gage de sa sécurité.
Jean-Jacques Wondo
Analyste des questions politiques et sécuritaires de la RD Congo
Lire toutes ses analyses sur desc-wondo.org