« Il est plus facile à l’homme de voir la paille qui se trouve dans l’œil de son voisin, que la poutre qui se trouve dans le sien. »
– Jésus de Nazareth
« L’Europe est ce géant [enchaîné par de multiples maîtres] … ; puis à un moment de hasard et de nécessité, elle écarte ceux qui l’entourent et se lance à la conquête de l’univers, massacrant les peuples de rencontre, s’appropriant leurs richesses, leur volant leurs noms, leur passé, leur histoire. 1492 est ce moment. …
Je voudrais enfin qu’on ait le courage de regretter le mal fait alors aux hommes par des hommes, de demander pardon aux victimes, de leur accorder enfin leur vraie place dans la mémoire du monde.
Pour que, demain, de nouvelles barbaries ne viennent pas alimenter à nouveau, sur une toute autre échelle, les torrents de boue de l’amnésie humaine. » (Jacques Attali, 1492).
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« Pour donner une idée globale de la destruction de la population indigène d’Amérique, Todorov rappelle qu’en 1500 la population du globe devait être de l’ordre de 400 millions, dont 80 millions habitaient en Amérique. Au milieu du XVIème, de ces 80 millions il n’en reste que 10. En se limitant au Mexique, à la veille de la conquête sa population est d’environ 25 millions, en 1600, elle est de 1 million. ‘Si le mot génocide s’est jamais appliqué avec précision à un cas, c’est bien celui-là, écrit-il. C’est un record, me semble-t-il, non seulement en termes relatifs (une destruction de l’ordre de 90% et plus), mais aussi en termes absolus, puisqu’on parle d’une diminution de la population estimée à 70 millions d’êtres humains. Aucun des grands massacres du XXème siècle ne peut être comparé à cette hécatombe’.
Cette hécatombe a souvent été gommée dans plusieurs pays du continent américain. Des courants très différents, animés par des motivations idéologiques opposées, ont contribué à effacer non pas la destruction des Indiens d’Amérique mais les atrocités l’ayant accompagnée. Il y a une écriture de cette histoire qui fait passer l’extermination d’environ 70 millions d’êtres humains comme les pertes et profits d’un processus où il n’y a pas que du mauvais. » (Rosa Amelia Plumelle-Uribe, La Férocité Blanche. Des non-Blancs aux non-Aryens. Génocides occultés de 1492 à nos jours).
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« Le génocide le plus massif de l’histoire est peut-être celui de nombreux groupes d’Amérindiens par les conquérants européens et leurs descendants ; il se poursuit de nos jours en certaines régions, en Amazonie notamment. Il a employé des moyens divers : le massacre systématique, la destruction des moyens de subsistance traditionnelle (tel le massacre des bisons en Amérique du Nord), le pacage dans des réserves exiguës, l’incitation à l’alcoolisme, la contamination microbienne délibérée et l’empoisonnement. » (Encyclopédie Larousse).
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« Le colonialisme est une doctrine ou une idéologie justifiant la colonisation entendue comme l’extension de la souveraineté d’un Etat sur des territoires situés en dehors de ses frontières nationales. La notion intellectuelle du colonialisme est cependant souvent confondue avec la pratique même de la colonisation étant donné que l’extension de sa souveraineté par un Etat implique dans les deux cas la domination politique et l’exploitation économique du territoire annexé.
L’idéologie colonialiste a été développée durant la seconde partie du XIXème siècle par le mouvement colonial dans la plupart des pays européens. Elle était fondée sur la notion d’impérialisme et tentait de donner un fond de doctrine politique à la nouvelle vague de colonisation. Elle s’est appuyée sur la doctrine juridique élaborée depuis le XVIème siècle qui justifiait l’occupation de territoires sans maître ou non constitués sous forme d’Etat comme mode légal d’organisation.
Elle s’est concrétisée par la mise en place d’une administration politique, militaire et économique de ce territoire, dirigée par les représentants du pays colonisateur et imposée à une population locale. Autrefois symbole de la puissance militaire et économique des peuples qui le pratiquaient, le colonialisme a été finalement reconnu depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale comme une relation inégalitaire s’opposant au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Le colonialisme, au sens actuel du terme, a été pratiqué notamment sous la Grèce antique et sous l’Empire romain, puis par les pays européens (à la suite des grandes découvertes) entre le XVIème siècle et la Première Guerre mondiale. Il a également été pratiqué dans les pays d’Asie, notamment au XXème siècle (expansionnisme de l’Empire du Japon en Mandchourie).
Les motivations de la colonisation.
Les motivations ici exposées ne sont pas présentes dans toutes les formes de colonisation, et quand elles le sont, toutes n’ont bien entendu pas la même importance selon les pays et les époques concernés. De plus, le fait qu’une motivation soit présente dans un projet colonialiste ne signifie pas qu’elle se soit traduite dans la réalité, ni que les opérations menées aient apporté le bénéfice qu’on en attendait : le colonialisme a souvent déçu ses promoteurs, notamment sur le plan économique ou politique.
Motivations économiques.
– S’emparer des richesses d’un pays et assurer l’approvisionnement en matières premières (ex : Amérique latine, Afrique, Asie du Sud).
– Garantir des débouchés à l’industrie nationale en cas de surproduction.
– Forcer l’ouverture commerciale (ex : Hong Kong et guerres de l’opium).
– Conquérir un espace de peuplement (ex : Amérique du Nord, Sibérie, Australie, Etats boers)
– Contrôler les routes commerciales (ex : îles britanniques dans les océans Atlantique et Indien, Empire portugais).
– Contrôler la traite négrière (ex : Sao Tomé).
Motivations stratégiques.
– Empêcher l’expansion de puissances concurrentes (ex : la France en Amérique du Nord, Conférence de Berlin en 1885, Maroc).
– Acquérir ou améliorer une position stratégique (Djibouti, Colonie du Cap, Singapour).
– Assurer la sécurité de la navigation maritime en supprimant un foyer de piraterie (Afrique du Nord).
Motivations idéologiques.
– Augmenter la puissance et le prestige de la nation (ex : empires coloniaux français, italien, allemand, russe, britannique).
– Accomplir une ‘mission civilisatrice’ issue de l’humanisme des Lumières ou dans un esprit positiviste (ex : Afrique, Amérique du Nord).
– Etablir la domination d’une race jugée supérieure sur d’autres jugées inférieures (idéologies raciales du XIXème et du début du XXème siècle).
– Répandre une religion (ex : évangélisation chrétienne en Amérique latine, Afrique subsaharienne). – Interdire l’esclavage (ex : Zanzibar).
Le colonialisme à l’Epoque moderne.
Les Grandes Découvertes.
Les ‘Grandes Découvertes’ (XVème – XVIème) marquent le début de l’expansion européenne outre-mer. Plusieurs facteurs ont contribué au moteur initial de cet essor : des avancées technologiques (invention de la caravelle, maîtrise de l’astrolabe et d’autres instruments de navigation orientaux), les expériences accumulées de la navigation sur l’Atlantique, la persistance d’un esprit de croisades, la recherche d’une route menant aux richesses de l’Asie en évitant à la fois le monde musulman et le monopole vénitien sur le commerce des épices, un certain dynamisme démographique, la formation de pouvoirs étatiques forts, ou encore l’émergence d’un modèle capitaliste moderne.
En mai 1493, le pape Alexandre Borgia promulgue la bulle Inter Coetera, modifiée par le traité de Tordesillas partageant le monde à découvrir entre la Castille (hémisphère Ouest, les Amériques) et le Portugal (hémisphère Est, l’Afrique et l’Asie). Ces arrangements, tout en légitimant les futures conquêtes au nom de la chrétienté, permettaient aussi d’éviter un affrontement direct entre les deux puissances ibériques.
Les principales puissances coloniales européennes.
Portugaise, espagnole, hollandaise, britannique, française et belge au Congo.
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Les traites négrières. Essai d’histoire globale. Editions Gallimard, 2004 (463 pages).
« Monstrueuse, la matière de ce livre l’est, pour deux raisons. Le sujet d’abord : le trafic d’hommes noirs, ‘infâme trafic’ jusque dans les justifications qu’on a voulu lui trouver, philosophiques, religieuses, économiques, politiques. Monstrueuse aussi, son étendue dans l’espace, de l’Afrique à la méditerranée orientale puis de l’Afrique aux Amériques, le fameux ‘commerce triangulaire’ n’étant que l’une de ses composantes ; et dans le temps, puisque cette histoire est longue de près de quatorze siècles.
Il fallait à Olivier Pétré-Grenouilleau, pour maîtriser dans sa totalité l’étude de ce trafic et l’ériger en objet historique, une approche globale, qui mettrait en relation l’histoire de l’esclavage avec d’autres domaines de la recherche historique – histoire des idées, des comportements, de l’industrialisation … Cette méthode comparative, alliée à une vision à la fois panoramique et plongeante, permettrait de découvrir comment des logiques différentes, propres à l’Afrique noire, au monde musulman et à l’Occident, ont pu se connecter pour donner naissance aux traites négrières. Comment une fois pris le pli, enclenché l’engrenage négrier, les traites ont évolué jusqu’à leur terme, résultat d’une dynamique abolitionniste, certes ambiguë, mais radicale.
De l’esclavage antique à la mise en place de nouveaux systèmes d’exploitation de l’homme, ce livre restitue pour la première fois dans son ensemble, la complexité d’une histoire débarrassée des clichés et des tabous, riche aussi de révoltes et de combats. Un des phénomènes mondiaux à l’origine du monde moderne. »
Olivier Pétré-Grenouilleau est membre de l’Institut Universitaire de France.
Il y a eu trois types de traites :
– les traites orientales, vers le Moyen-Orient jusqu’en Inde. Par la Mer Rouge (650-1920) : 4,1 millions de personnes. Par la Côte swahili (650-1920) : 3,9 millions de personnes. La Transsaharienne (650-1910) : 9 millions de personnes. Soit un total de 17 millions de déportés
– les traites internes à l’Afrique, vers l’Algérie (1700-1900) : 110.000 personnes. Vers la Tunisie (1700-1899) : 144.000 personnes. Vers le Maroc (1700-1875) : 509.900 personnes. Ces chiffres incluent le taux de mortalité lors de la traversée du désert : 10% pour l’Algérie, 15% pour la Tunisie et 6% pour le Maroc. Soit un total de 764.000 déportés.
– les traites occidentales, de 1519 à 1867, pour un total de 11.062.000 de déportés et de 9.599.000 d’esclaves introduits dans les Amériques. Avec le nombre d’arrivées suivantes : 3.902.200 au Brésil, 2.238.200 dans les Antilles britanniques, 1.092.700 dans les Antilles françaises, 361.000 en Amérique britannique continentale, 430.400 en Amérique espagnole continentale, 791.900 dans les Antilles espagnoles, 129.700 dans les Antilles néerlandaises, 403.700 en Guyanes et environ 250.000 en Europe.
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Il est très facile de constater que tout se tient : la conquête de nombreux pays d’outre-mer, l’extermination de tout ou partie des autochtones, l’importation d’une main d’œuvre de substitution, la colonisation sans extermination, l’appropriation des terres et des ressources par et pour les colons et leurs entreprises ou pour l’exportation vers les pays colonisateurs.
Comme je l’ai déjà souligné, Tzvetan Todorov est arrivé à la conclusion que les trois causes fondamentales des crimes contre l’humanité sont les suivantes : « cupidité, volonté de puissance et mépris ». C’est exactement le cas de l’expansion européenne : plusieurs types de crimes contre l’humanité et un génocide, l’extermination des indigènes dans plusieurs pays.
Les barbaries occidentales ne se sont pourtant pas arrêtées à l’outre-mer. Elles se sont rapidement transportées sur le sol européen avec les deux guerres mondiales de 1914-18 et 1940-45 qui détruisirent de nombreux pays et firent des dizaines de millions de victimes. De plus, « le nazisme, en transposant des non-Blancs aux non-Aryens cette dévaluation des êtres dits ‘inférieurs’, a commis le crime impardonnable de porter au cœur du monde européen une férocité jusqu’alors réservée à d’autres continents » (Rosa Amelia Plumelle-Uribe). Ailleurs ça va, mais pas chez nous SVP !!
C’est également ce qui se passe avec les multinationales et le système financier international : après avoir écumé le reste du monde – prédation toujours en cours d’ailleurs – ils se ramènent chez nous. Nous verrons cela un peu plus en détail.
« L’ère planétaire commence à la fin du XVème siècle avec la découverte, par les Européens, d’un continent peuplé de cultures inconnues et de dieux inconnus. L’unité microbienne du monde se réalise aussitôt. Le tréponème pâle traverse l’Atlantique, se répand en Europe, et en sept ans atteint la Chine par la route des caravanes tandis que notre bacille de Koch se rue sur les populations indiennes d’Amérique. Le tabagisme se répand en Europe et l’alcoolisme frappe l’Amérique. Les pommes de terre, tomates, maïs se répandent dans l’Ancien Monde, le cheval, le blé, le café dans le Nouveau. Un réseau de plus en plus serré d’échanges et de communications se tisse sur la planète. La mondialisation s’amplifie au XIXème siècle, avec le déferlement de l’Europe colonialiste sur l’ensemble du globe. Elle se déchaîne au XXème siècle dans et par deux guerres mondiales. L’économie est mondialisée. Le marché est mondial. Le capitalisme est international. L’écologie est devenue un problème planétaire » (Edgar Morin, L’an I de l’ère écologique).
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La colonisation britannique en Amérique du Nord.
« La fondation de Jamestown, en Virginie, inaugura en 1607 la colonisation britannique en Amérique du Nord. Il s’agissait d’une colonisation de peuplement, menée par des émigrants persécutés dans leur pays pour leurs convictions religieuses ou politiques, notamment des ‘séparatistes anglais’, une secte dissidente de l’Eglise anglicane. En 1619, les premiers Noirs arrivèrent sur le sol américain, débarqués d’un navire hollandais ; ils venaient (sic) travailler dans les plantations de Virginie aux côtés (resic) de serviteurs blancs venus d’Europe. En 1620, les Pilgrims Fathers ((Pères Pèlerins), des dissidents religieux adeptes du puritanisme, arrivèrent à bord du Mayflower dans la baie de Plymouth et fondèrent la colonie de Plymouth (future colonie de la Baie du Massachusetts). Du fait que les Anglais formaient le groupe ethnique majoritaire parmi les premiers colons venus s’installer sur le territoire, l’anglais fut la langue qui s’imposa naturellement. Par rapport à la Nouvelle-France et à la Nouvelle-Espagne, la Nouvelle-Angleterre occupait un espace beaucoup plus restreint sur le littoral atlantique.
L’émigration puritaine continua jusqu’en 1642, entraînant la création des autres colonies de la Nouvelle-Angleterre (colonies septentrionales) : le New Hampshire (1629), leRhode Island (1644) et le Connecticut (1662). Ces colonies développèrent une société souvent théocratique et intolérante, reposant cependant sur une vie spirituelle très riche (fondation de l’Université Harvard en 1636)
Situées plus au sud, les colonies méridionales, constituées de la Virginie (1607), duMaryland (1632), de la Caroline du Nord et de la Caroline du Sud (1663), ainsi que de la Géorgie (1732), établirent une structure politico-religieuse et socio-économique très différente de celle des colonies du Nord. Essentiellement agricoles, elles reposaient sur une économie de plantation (tabac, coton) qui exigeait une main-d’œuvre abondante. Le commerce triangulaire commença dès 1610 et se poursuivit durant tout le XVIIème siècle. Une société esclavagiste se constitua ainsi, au profit des seuls grands propriétaires restés fidèles à l’anglicanisme. Les deux groupes de colonies anglaises restèrent longtemps étrangers l’un à l’autre.
Les autres colonies proviennent de l’annexion des colonies hollandaises qui, en 1664, passèrent sous domination britannique. De cette annexion naquirent les colonies de New York, du New Jersey et du Delaware. La Pennsylvanie fut fondée un peu plus tard, en 1681, par le quaker William Penn. Elle devint la principale porte d’accès au Nouveau Monde pour les immigrants irlandais d’origine écossaise.
Le 4 juillet 1776, les treize colonies de la Nouvelle-Angleterre qui comptaient alors trois millions d’habitants, proclament leur indépendance par rapport à la Couronne britannique. Dans leur bras-de-fer avec l’armée anglaise elles reçurent le soutien des troupes françaises d’un certain marquis de La Fayette. Les colons – à 99% protestants – qui les composent, sont persuadés d’avoir été choisis par Dieu pour bâtir sur le sol du Nouveau Monde une Jérusalem terrestre qui doit guider le reste de la planète. La conviction de constituer une nation providentielle, messianique, va se trouver rapidement confortée par un fulgurant développement territorial.
Le Problème indien.
Si les premiers contacts avec les autochtones furent relativement pacifiques, il n’en fut pas ainsi par la suite. A de rares exceptions près, les relations se détériorèrent rapidement. Contrairement aux Français, les premiers immigrants britanniques étaient ‘avides de terres’ et les autochtones furent perçus comme des concurrents, les colons anglais lorgnant constamment vers les ‘territoires indiens’. Par ailleurs, la plupart des Amérindiens étaient alliés aux Français, ce qui en faisaient doublement des ennemis.
L’entreprise d’éviction et de génocide.
Avec la disparition progressive du gibier, les tribus amérindiennes furent confrontées à un choix difficile : ou bien elles mourraient de faim, ou bien elles partaient en guerre, ou bien elles quittaient leurs territoires ancestraux pour aller vers l’ouest où elles entreraient en conflit avec d’autres tribus. Incapables de réduire les autochtones en esclavage ou de vivre en bonne entente avec eux, les Britanniques décidèrent rapidement de les exterminer. Une fois les Britanniques évacués, par vengeance et par cupidité, les Américains allaient poursuivre leur œuvre d’éviction des autochtones jusqu’à leur quasi-génocide. En 1835, Alexis de Tocqueville (1805-1859) décrivait ainsi dans ‘De la démocratie en Amérique’, la situation des Indiens aux Etats-Unis :
‘Les Espagnols, à l’aide de monstruosités sans exemple, en se couvrant d’une honte ineffaçable, n’ont pu parvenir à exterminer la race indienne. Les Américains des Etats-Unis ont atteint ce résultat avec une merveilleuse facilité, tranquillement, légalement, philanthropiquement, sans violer un seul des grands principes de la morale aux yeux du monde. On ne saurait détruire les hommes en respectant mieux les lois de l’humanité.’
Les survivants des différents peuples amérindiens furent intégrés au système des ‘réserves’ géré par le bureau des affaires indiennes qui, en 1824, fut mis sous la responsabilité du ministère de la Guerre. Les déportations systématiques des Indiens commencèrent en 1806. Le Congrès des Etats-Unis autorisa officiellement ces déportations par l’adoption le 28 mai 1830, de l’Indian Removal Act. Les Indiens durent donc évacuer tous les territoires à l’est du Mississipi et se regrouper dans des réserves à l’Ouest. La loi prévoyait le déplacement des tribus indiennes et la redistribution de leurs terres à ceux qui s’en porteraient acquéreurs.
Seulement cinq ans après ces déclarations pour le moins officielles, le président Andrew Jackson (1829-1837) pouvait constater avec satisfaction que les Indiens avaient disparu de l’est des Etats-Unis, à part quelques rares exceptions. En 1977, il n’y avait quasi plus d’Indiens aux Etats-Unis (Alaska compris).
En 1881, l’écrivaine Helen Hunt Jackson (1830-1885) publiait un violent réquisitoire contre cette politique dans ‘Un siècle de déshonneur : une ébauche des ententes du gouvernement des Etats-Unis avec certaines tribus indiennes’ :
‘‘L’histoire des rapports entre le gouvernement et les Indiens est un relevé honteux de traités et de promesses non tenues. L’histoire des rapports entre les Blancs et les Indiens est un relevé dégoûtant de meurtres, d’atrocités, de vols et de crimes commishabituellement par les colons et de violents accès de révoltes et d’exactions barbares de représailles inouïes commis exceptionnellement par les Indiens.
Informés par le gouvernement que leurs droits devaient être respectés, les Indiens ont vu ces droits bafoués par la rapacité des Blancs, le bras qui devait servir à les protéger a toujours été prêt à favoriser l’agresseur.
Le témoignage de certains officiers militaires les plus haut gradés des Etats-Unis révèle que, dans nos guerres indiennes, presque sans exception, les premières agressions ont été commises par les Blancs … Chaque crime commis par un Blanc contre un Indien est caché et minimisé. Chaque affront commis par un Indien contre un Blanc est transmis par voie postale ou télégraphique dans les coins les plus reculés de la Terre, maquillé de toutes les horreurs dont la réalité ou l’imagination peut l’entourer. Les citoyens des Etats-Unis doivent être mis au courant de ce genre de manipulations’. »