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Un pays en guerre perpétuelle et le piège de la particratie. Ailleurs, ça bouge

Un pays en guerre perpétuelle et le piège de la particratie. Ailleurs, ça bouge

Un pays en guerre perpétuelle et le piège de la particratie. Ailleurs, ça bouge 1032 688 Ingeta

Par Jean-Pierre Mbelu

« Tshishi tshidiadia lukunde, ntshidi munda mua lukunde. [1]» Proverbe Luba

Ailleurs, une autre Afrique pointe à l’horizon. Les manducrates kongolais, eux, restent prisonniers de la mentalité colonialiste. Ils adorent « la République de la Gombe » et les honneurs liés aux biens dont ils disposent.

Du point de vue de la pensée, ils ont inventé « l’exceptionnalisme kongolais » pour justifier leur incapacité à sortir des sentiers battus. Ils font comme si le pays n’était pas en guerre. Ils ne veulent surtout pas toucher à leur train de vie et refusent de parler, à quelques exceptions près, de la refondation du pays. Ailleurs, ça bouge.

Le Mali suspend les partis politiques

Mercredi 10 avril 2024, le gouvernement de transition du Mali a suspendu les activités des partis et associations politiques. L’urgence de la lutte contre le terrorisme justifie cette suspension. Elle intervient longtemps après les assises de la refondation organisées par le même gouvernement et la constitutionnalisation de certains principes majeurs pour le bon fonctionnement du pays. Le respect de la souveraineté du pays, le respect des choix des partenaires stratégiques opérés par le Mali et la priorité accordée aux intérêts des Maliens dans les décisions prises au et/ou sur le pays font partie de ces principes.

L’une des façons de rompre avec ce  »fondamentalisme démocratique », en marge de la tradicratie, c’est de refonder les pays africains avides d’émancipation politique sur des bases constitutionnelles souverainistes. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger donnent l’impression d’avoir compris cela.

Refonder le pays sur des bases sûres semble être, pour le gouvernement transitoire malien, la meilleure façon de déjouer le piège de la particratie souvent mise à profit par les artisans et les partisans de la politique du « diviser pour régner » et soutiens des groupes armés.

En effet, le début de l’imposition du « fondamentalisme démocratique » aux pays africains a coïncidé avec la fabrique des « Etats-ratés-manqués » et celle des pions manipulables de l’opposition par des pays gérés par des « structures faîtières » [2] (ou des Etats profonds).

L’une des façons de rompre avec ce  »fondamentalisme démocratique », en marge de la tradicratie, c’est de refonder les pays africains avides d’émancipation politique sur des bases constitutionnelles souverainistes. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger donnent l’impression d’avoir compris cela. Ils sont même allés plus loin. Ils ont rompu avec les frontières tracées en 1885 à la Conférence de Berlin pour recréer leur propre espace vital au sein du Sahel. Ce faisant, ils participent de l’avènement du panafricanisme des peuples.

Des manducrates au coeur de l’Afrique

Au coeur de l’Afrique se trouve un grand pays. Il peine à mesurer l’urgence qu’il y a à s’engager sur la voie de la refondation souverainiste. Il dit être à la fois en guerre contre terrorisme et « une démocratie particratique ». Il paraît qu’il le dit beaucoup plus pour répondre aux pressions qu’il reçoit de l’extérieur, à la boulimie pour le pouvoir-os des manducrates kongolais et au somnambulisme des masses affamées, assujetties, fanatisées, abêties et appauvries.

Que le pays soit en guerre ou pas, ce n’est pas leur problème. Ce qui importe pour eux, ce sont les postes politiques et ce qu’ils peuvent engranger pécuniairement. Et cela depuis les années 1960 et même avant.

Et du point de vue historico-politique, les manducrates kongolais sont, à quelques exceptions près, les véritables héritiers de leurs devanciers. Que le pays soit en guerre ou pas, ce n’est pas leur problème. Ce qui importe pour eux, ce sont les postes politiques et ce qu’ils peuvent engranger pécuniairement. Et cela depuis les années 1960 et même avant.

Voici ce que Jules Chomé écrivait à ce sujet : « M. de Schrijver a octroyé l’indépendance tout de suite mais il n’a opéré aucune des réformes préconisées par M. Van Bilsen. La raison en est qu’il n’a jamais entendu accordé aux Congolais qu’une indépendance purement fictive et nominale. Les milieux financiers ont cru fermement, car nos milieux politiques ont surtout été naïfs, qu’il suffirait de donner à quelques congolais des titres de ministre ou de parlementaire, des gros traitements, des maisons somptueuses dans la cité européenne pour arrêter définitivement le mouvement d’émancipation qui menaçait leurs intérêts. [3]»

Au coeur de l’Afrique, les manducrates jouant le rôle de nègres de service en sont encore à reproduire cette façon de faire dans un pays en guerre perpétuelle. La mentalité n’a presque pas changé pour ces habitants de « la République de la Gombe ». Et pour justifier leur régression coloniale, ils ont inventé la théorie de « l’exceptionnalisme kongolais ». Pour eux, le Kongo, leur vache laitière, n’a rien à voir avec « les petits pays du Sahel » engagés sur la voie de leur émancipation souverainiste. Et ils refusent de renoncer à la particratie afin de s’inscrire sur la voie d’un grand mouvement (pluriel) d’émancipation politique en vue d’en finir (d’abord), une fois pour toutes, avec la guerre raciste de prédation et de basse intensité imposée au pays par les colonialistes économiques.Ils font leur jeu.

Dieu merci ! La jeunesse montante a compris ce jeu et est engagée à changer la donne. Cela prendra du temps. Mais c’est en marche…

 

Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961

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[1] L’insecte qui mange ou détruit ) le haricot est celui qui est en son sein.

[2] Lire J.-P. MBELU, La fabrique d’un Etat raté, Paris, Congo Lobi Lelo, 2021. Lire surtout le chapitre 8 intitulé  »La fabrique des pions et leur manipulation » .

[3] J. CHOME, L’ascension de Mobutu. Du sergent Joseph Désiré au général Sese Seko, Bruxelles, Complexe, 1974, p. 24.

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