Par Jean-Bosco Kongolo M/Desc-Wondo.org
Autrefois, avoir un fils ou un membre de famille à Kinshasa ou dans une ville minière de l’ex-Katanga était une garantie de sécurité sociale pour la plupart des Congolais du reste du pays (surtout de la campagne) qui, en cas de besoin, pouvaient compter sur ce dernier, généralement fonctionnaire ou cadre d’entreprise, pour résoudre certains problèmes urgents d’ordre matériel et/ou financier. Une lettre, un message à la phonie et, progressivement, un coup de fil suffisaient pour annoncer l’état de nécessité. Depuis quelques décennies, à cause de la crise sociopolitique qui perdure au pays, c’est tout le monde, pauvres et riches, qui se bat pour envoyer un fils ou une fille à l’étranger pour les études ou même sans objectif ni programme établis, pourvu qu’il quitte le pays, la finalité étant le bien être de l’intéressé et de toute la famille. Très peu nombreux sont cependant ceux qui s’interrogent sur le type d’emploi et surtout le mode de vie de ces immigrés qui, dans leurs milieux de résidence, doivent faire face au paiement des impôts, taxes et loyers exorbitants, sans compter l’instruction de leurs propres enfants.
Du Congo profond, grâce au téléphone mobile et aux réseaux sociaux désormais à la portée du grand nombre, presque tout Congolais de la diaspora a déjà été surpris dans son sommeil pour s’entendre dire que son intervention financière est urgemment attendue pour :
– sauver la vie de tel parent (père, mère, frère, sœur, beau-frère, belle-sœur, beau-père, belle-mère) hospitalisé ;
– l’enterrement de tel autre décédé;
– l’acquittement des frais de scolarité de tel enfant ou étudiant menacé d’exclusion;
– la garantie locative d’un frère ou d’une sœur déguerpis ou enfin
-pour la sortie de maternité de telle sœur ou telle belle-sœur; etc.
De l’étranger où ils résident, certains autres Congolais, dans l’espoir d’un retour au pays natal et/ou simplement au bénéfice de leurs familles, ont jugé utile d’investir dans de petites unités de production ou de construire des résidences plus confortables en confiant ces projets à des membres de famille.
Qu’il s’agisse d’une simple assistance familiale ou de ces projets, plusieurs Congolais de la diaspora sont régulièrement victimes d’escroquerie et d’abus de confiance (infractions au code pénal) dont certains aboutissent à des ruptures irrévocables ou à des durcissements de cœur imprévisibles. Nous en avons sélectionné quelques cas, entendus discrètement avec l’oreille du juge et la curiosité de criminologue, que nous présentons dans cette analyse, dans l’espoir de sensibiliser les uns et les autres sur la manière de vivre leurs relations à distance.
1. L’escroquerie et l’abus au sens de la loi
Il n’est pas aisé de définir de manière vulgaire ces deux infractions à l’intention des profanes dans la mesure où presque toutes nos langues nationales et vernaculaires les confondent sous le vocable commun de « vol ». Il n’est pas non plus nécessaire pour nous d’entrer dans ces méandres juridiques ou académiques pour en donner tous les petits détails à nos lecteurs, l’essentiel pour nous étant qu’ils en saisissent le sens exact et qu’ils en fassent la distinction. C’est pourquoi, nous ne retiendrons des libellés ci-après, du législateur, que les aspects les plus directement liés aux rapports entre les Congolais de la diaspora avec les membres de leurs familles qui sont au pays.
Article 95 : « Quiconque a frauduleusement détourné, soit dissipé au préjudicie d’autrui des effets, deniers, marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature contenant ou opérant obligation ou décharge et qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d’en faire un usage ou un emploi déterminé, est puni d’une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d’une amende dont le montant ne dépasse pas mille zaïres ou d’une de ces peines seulement. »
Article 98 : « Quiconque, dans le but de s’approprier une chose appartenant à autrui, s’est fait remettre ou délivrer des fonds, meubles, obligations, quittances, décharges, soit en faisant usage de faux nom ou de fausses qualités, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l’existence de fausses entreprises, d’un pouvoir ou d’un crédit imaginaire, pour faire naître l’espérance ou la crainte d’un succès, d’un accident ou de tout autre évènement chimérique, pour abuser autrement de la confiance ou de la crédibilité, est puni d’une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d’une amande dont le montant ne dépasse pas deux mille zaïres, ou d’une de ces peines seulement. »
2. Ce qu’il faut retenir de ces infractions dans les rapports des Congolais de l’étranger avec leurs familles
2.1. Abus de confiance (art. 95)
Nostalgiques et soucieux du bien-être des membres de leurs familles restés au pays, bon nombre de Congolais de la diaspora ne se sentent à l’aise que si ces derniers sont à l’abri de petits soucis matériels. Traumatisés et habitués et à ne recevoir que des nouvelles tristes et alarmantes, certains en sont arrivés à refuser de décrocher leur téléphone toutes les fois que la sonnerie indique une communication longue distance. En effet, presque tous les Congolais de la diaspora peuvent le témoigner : très rarement un membre de famille peut appeler du Congo pour juste demander les nouvelles de son frère ou de sa sœur vivant à l’étranger, si ce n’est que pour étaler ses problèmes et la crise qui n’en finira jamais. C’est ainsi que pour sécuriser matériellement et socialement leurs familles, beaucoup de compatriotes ont fait de petits investissements destinés à générer régulièrement des fonds pouvant permettre à leurs familles de vivre assez décemment et éviter, par conséquent, d’être tout le temps stressés par des coups de fil intempestifs de demande d’argent. Ces investissements, dont la gestion est généralement confiée à un membre de famille le plus éveillé ou jugé plus apte, prennent plusieurs formes : un projet agricole ou d’élevage, un guest-house, un flat (actuellement à la mode), un camion pour le transport des marchandises ou des autobus pour le transport urbain et, parfois aussi, un centre de santé ou une pharmacie, etc.
Dans la plupart des cas, ces projets sont initiés à l’occasion des vacances en famille, sinon, tout se passe à distance dans un climat de confiance frisant la naïveté. C’est ainsi que ceux qui, à cause de leurs occupations dans leurs pays d’accueil, n’ont pas l’occasion ou l’opportunité de descendre sur terrain, se contentent d’envoyer des fonds ou des équipements à un de leurs avec des instructions précises d’en faire un usage ou un emploi déterminé. Selon plusieurs témoignages entendus, rares sont ceux qui en ont récolté des résultats escomptés, la plupart ont plutôt juré de ne plus renouveler l’expérience.
Quelques cas d’abus de confiance vécus par des Congolais de l’étranger
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Un Congolais résidant Ottawa (Capitale du Canada), issu d’une famille nombreuse, envoie à son jeune frère à Bukavu deux minibus et un camion, respectivement pour le transport urbain et des marchandises. Selon l’étude du marché, il est rassuré que cela peut rapporter mensuellement plus ou moins 3000$US. Dans ce cas, non seulement il dormirait désormais tranquillement mais tous les membres de sa famille, y compris lui-même, trouveraient leur compte. La gestion étant familiale, il est convaincu d’être à l’abri des sales tours que pourrait lui jouer un illustre inconnu ou un ami. Deux ans après et suite à une difficulté rencontrée dans le paiement des frais de scolarité des ses propres enfants, il demande qu’un montant lui soit urgemment expédié. Mais, à sa grande surprise, il apprend qu’aucun de ces engins ne roule plus à cause du manque de pièces de rechange. Vérification faite, le jeune frère n’avait fait qu’allonger la liste de ses maîtresses conquises et engrossées. C’était la faillite du projet.
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Une dame, la seule de sa famille à avoir fait des études supérieures, à s’être mariée et à avoir émigré aux USA, se fie à son propre père, agent de cadastre à Kinshasa, à qui elle envoie de l’argent pour l’acquisition d’un terrain à bâtir dans la commune de Mont-Ngafula, au prix de quelques milliers de dollars américains. Elle multiplie ensuite des transferts de fonds par Western Union pour la construction d’une villa familiale et d’un immeuble à appartements pour locataires. Par prudence, elle demande que des photos de ces constructions lui soient régulièrement expédiées pour qu’elle en suive l’évolution à distance. A beau mentir, qui vient de loin, son père lui fait parvenir des images des constructions prises sur une concession appartenant à autrui. Lorsque deux années plus tard, elle effectue un voyage à Kinshasa pour « y accélérer » les travaux de finissage, elle découvre que non seulement la dimension du terrain prétendument acquis ne permettait même pas de construire une grande maison mais que seule la fondation d’une cabane y avait été érigée et quelques briques, fabriquées hors normes, y avaient été rapidement entassées. Entre temps, le papa s’était donné le luxe d’épouser une deuxième maman. C’était la fin de la grande illusion.
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À Gatineau, ville québécoise voisine d’Ottawa, une compatriote congolaise apprend que sa mère, sexagénaire et unique parent qui lui reste, a trébuché en entrant dans la maison et s’est fracturé la jambe gauche. Pendant près de six mois, elle ne fait qu’envoyer à ses sœurs de l’argent pour les soins de la vieille maman mais selon ces dernières, il n’y a pas beaucoup de changement eu égard à son âge avancé. Elle en parle à ses camarades congolaises comme elle, une infirmière et une physiothérapeute, pour recueillir leur point de vue. La physiothérapeute la met en contact avec un médecin orthopédiste parmi les plus réputés de Kinshasa, lequel exige que la patiente lui soit présentée à sa clinique privée pour des examens appropriés. Le médecin est lui-même choqué et ahuri de découvrir que depuis l’accident, la vieille maman n’avait jamais subi un moindre examen de radiologie malgré tout l’argent que sa fille du Canada transférait à ses sœurs pour les soins. Ce fut une crise des nerfs ayant entraîné 24 heures d’observation à l’hôpital.
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Un compatriote de Belgique décide d’acheter pour sa mère une maison à Ngandajika (dans le Kasaï) afin de la rapprocher d’un hôpital où elle peut recevoir des soins médicaux appropriés. Cette mission est confiée à son jeune demi-frère, pasteur d’une église locale. À son insu, deux ans après, ce demi-frère retourne la vielle mère au village, s’installe dans la maison et continue de recevoir de l’argent par Western Union pour les soins de la maman. Ce n’est qu’à sa mort, cinq ans après, que notre compatriote découvre la supercherie grâce à un ami qui se trouvait en vacances à Mbuji-Mayi et à qui il avait demandé de s’occuper des frais d’enterrement, remboursables à son retour. En réalité, cette maman est morte presqu’abandonnée à elle-même au village, dans des conditions pénibles. Ce fut la rupture totale des relations familiales.
2.2. Escroquerie (article 98)
Nombreux sont les Congolais de la diaspora qui sont demeurés très attachés à la mère patrie, à leur culture promouvant la solidarité et surtout à leurs familles. Lorsque les mesures de sécurité n’étaient pas encore renforcées dans la plupart des pays occidentaux, des Congolais pionniers de la diaspora avaient réussi à parrainer plusieurs membres de leurs familles, chacun pouvant s’intégrer et se débrouiller comme il le pouvait sur place. Globalement, les yeux et les oreilles des Congolais qui ont leurs membres de famille dans la diaspora sont constamment tournés et tendues vers ces derniers, considérés, à tort ou à raison, comme les pourvoyeurs des fonds, les dispensateurs du bonheur familial, mais en réalité, comme leurs bêtes de somme ou leurs chiens de chasse. Même lorsque sur place, ils ont des moyens de résoudre certains problèmes de la vie quotidienne, ces compatriotes du terroir ont trouvé dans la sensibilité, la solidarité et la générosité de leurs frères et sœurs de la diaspora des faiblesses à exploiter à fond pour leur soutirer méchamment de l’argent en utilisant des procédés et modes opératoires qui contrastent avec la fraternité et qui n’ont rien à envier aux méthodes utilisées par les criminels rencontrés au cours de notre carrière de juge. Mais une fois que ce frère ou cette sœur de l’étranger est physiquement ou professionnellement invalide, on l’oublie et on se moque même de lui (d’elle).
Quelques cas d’escroquerie vécus par des Congolais de l’étranger
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Un compatriote de Montréal est tiré de son sommeil vers 3h30’du matin par un appel téléphonique de sa jeune sœur lui annonçant le décès inopiné de leur mère à Lubumbashi. Sans paniquer, il raccroche et appelle directement sa mère pour tenter de vérifier l’information à la source avant de prendre les dispositions pour le transfert des fonds qu’exige l’inhumation de plus en plus luxueuse au pays. Sa mère répond au téléphone et lui dit qu’elle se porte très bien.
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Un compatriote de Toronto, la grande métropole du Canada, reçoit d’un de ses frères une information très alarmante sur l’état de santé de leur mère, qui nécessite de gros moyens financiers pour son transfert en Afrique du Sud. Il ne s’accorde aucune minute pour réfléchir et se débrouille, certainement avec sa carte de crédit, pour envoyer cinq mille dollars puis, deux semaines plus tard, trois mille dollars. Lorsqu’il obtient son congé quatre mois après, il décide de se rendre sur place pour voir cette chère maman qu’il a failli perdre. En passant par Kinshasa pour d’abord voir la famille de leur sœur aînée, il est estomaqué d’apprendre que leur mère n’avait jamais été hospitalisée et qu’il aurait pu vérifier l’information auprès des autres membres de la famille.
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Une dame qui avait adopté son neveu orphelin à Bukavu avant son immigration au Canada, apprend de ce dernier qu’il a eu son diplôme d’État et aimerait se rendre à Kinshasa pour y poursuivre ses études supérieures à l’Institut Supérieur des Techniques Appliquées(ISTA). Avec un projet aussi flatteur et d’apparence viable, la dame n’hésite pas un seul instant de lui envoyer l’argent nécessaire pour le billet d’avion et pour ses besoins de logement (à l’internat) et d’alimentation. Pendant trois ans, le neveu reçoit tout ce qu’il demande (argent de poche, vêtements, chaussures, ordinateur portable, etc.). Vérification faite auprès d’un autre membre de famille, ce jeune homme n’avait fait qu’un trimestre à l’ISTA et pour le reste de temps, l’argent qu’il recevait de sa tante lui permettait de se la couler douce en pénard, de s’habiller chiquement, de courtiser des Kinoises qui ne cherchent pas mieux que ça et impressionner ses camarades en fréquentant avec eux, et à ses frais, toutes les boîtes de nuit de la capitale.
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Un dernier cas, plus récent, est celui d’un médecin à qui est faussement imputé un avortement ayant entraîné la mort d’une jeune fille alors que, dossier médical à l’appui, cette tête brulée ne s’était présentée à sa clinique que pour une fièvre consécutive à un abcès. Menacé d’arrestation pour avortement illégal, ce vieux médecin vit en clandestinité pendant quelques semaines puis décide d’en parler à son gendre qui vit en France et qui nous contacte pour une éventuelle intervention auprès de nos anciens collègues magistrats. Pour tenter de reconstituer les faits avant de nous impliquer, nous contactons le fils du médecin, avocat de son état, qui dramatise la situation en suggérant à notre ami, son beau-frère, que si une somme très importante d’argent n’était pas libérée urgemment pour « motiver » le magistrat instructeur de l’affaire, leur père allait être transféré à Kinshasa pour y être condamné à une peine très lourde. Grâce donc à notre intervention, notre ami a dû réaliser combien ce cas bénin a failli être une aubaine pour son beau-frère. Des cas semblables, on peut en raconter à longueur des journées et même en faire plusieurs volumes de livres.
3. Distinction à faire entre l’abus de confiance et l’escroquerie
Si pour les profanes, l’auteur d’abus de confiance et l’escroc n’ont qu’un seul objectif : voler l’argent ou les biens de leurs victimes, pour le juriste, les deux infractions sont différemment définies par le législateur (voir ci-dessus) et ont des éléments constitutifs qui les distinguent l’une de l’autre. En effet, à partir des ces cas précis, il est facile de comprendre qu’en ce qui concerne l’abus de confiance, c’est la victime (Congolais de l’étranger) qui remet à un membre de famille(de confiance) un bien ou de l’argent avec instructions précises de le transmettre à quelqu’un ou d’en faire un usage ou un emploi déterminé au profit de toute la famille ou d’un membre désigné de la même famille. Passant outre ces instructions (trahissant la volonté de son frère ou de sa sœur), ce membre de famille en qui toute la confiance est placée, détourne intentionnellement et à son seul profit tout ou partie de ce qu’il a reçu et, plus grave, il transmet de faux rapports à sa victime.
Quant à l’escroquerie, comme le démontrent tous les exemples ci-dessus, il s’agit le plus souvent d’un membre de famille résidant au Congo, qui profite de la longue distance qui le sépare de son frère ou de sa sœur vivant à l’étranger, pour le mettre devant un fait accompli soit en lui proposant un projet porteur d’espoir soit en le brusquant avec une fausse nouvelle d’accident, de maladie grave ou de décès survenus dans la famille, des frais de scolarité d’un enfant qui n’étudie même pas ou de l’exclusion d’un autre, de l’école ou de l’université par manque d’argent, etc. Dans certains cas, ces faits surviennent réellement mais on en exagère l’urgence et la gravité tout en surestimant la valeur monétaire pour contraindre la victime à agir vite, sans réfléchir ou chercher à vérifier. Ici, l’imagination est très fertile pour toucher le cœur de la victime, dont on connaît la sensibilité et la promptitude de la réaction. Craignant de porter une lourde responsabilité morale au cas où, par sa lenteur ou son hésitation, le pire arriverait, la victime n’a d’autre choix que de s’exécuter le plus rapidement possible, souvent en s’endettant.
4. Facteurs à la base de ces comportements
Fort de notre longue expérience de juge et suffisamment éclairé par notre formation en Criminologie, nous avons attentivement observé les comportements de nos concitoyens, du Congo comme de la diaspora, et retenu certains facteurs (psycho et socio criminogènes) essentiels qui sont à la base de ces comportements.
4.1. Le mythe de l’Occident toujours riche
Dans l’imaginaire populaire, les Congolais sont majoritairement convaincus que l’homme blanc est socialement fort et riche et, d’où qu’il vienne, il est toujours à l’abri de petits soucis matériels. Cette image, vestige de la colonisation, est renforcée par le fait que, même plusieurs décennies après l’indépendance, tous les coopérants occidentaux qui vivent chez nous mènent un train de vie largement au-dessus de la moyenne. Ce sont eux qui amènent les investissements d’importance majeure et qui occupent des postes de direction dans les entreprises. Ils sont logés en ville ou dans des quartiers chics et roulent toujours dans des belles voitures. Assimilant leurs frères et sœurs partis vivre chez les blancs, nos compatriotes du pays sont loin d’imaginer qu’il puisse exister aussi des pauvres dans les pays d’Europe et d’Amérique, voire même en Chine, en Afrique du Sud et, comble de ridicule, en Inde et au Pakistan. Partant de ce complexe, ils sont convaincus que tous les Congolais vivant dans ces pays sont aussi riches que le sont ces étrangers qu’ils voient chez eux. Pour eux, ces frères et sœurs de la diaspora seraient donc de mauvaise volonté s’ils ne sont pas sensibles aux misères qui s’abattent sur leurs familles. D’où, il faut bouffer leur argent chaque fois que l’occasion se présente, car ils sont convaincus qu’ils en gagnent plus.
Dans tous les pays industrialisés ou émergents qui accueillent les Congolais, il existe une catégorie de compatriotes qui, par leur extravagance, entretiennent le mythe de l’Occident riche. Il s’agit des Congolais qui, complexés eux-mêmes, veulent vivre au-dessus de leurs moyens ou, sans justifier la source de ce qu’ils exposent, s’ingénient à impressionner ceux qui sont restés au pays par des griffes et des bijoux luxueux qu’ils arborent ou par des images toujours festives régulièrement postées sur les réseaux sociaux et qui laissent croire que dans les pays où ils vivent, les difficultés n’existent jamais.
4.2. L’extravagance de certains Congolais de l’étranger
Dans tous les pays industrialisés ou émergents qui accueillent les Congolais, il existe une catégorie de compatriotes qui, par leur extravagance, entretiennent le mythe dont nous venons de parler. Il s’agit des Congolais qui, complexés eux-mêmes, veulent vivre au-dessus de leurs moyens ou, sans justifier la source de ce qu’ils exposent, s’ingénient à impressionner ceux qui sont restés au pays par des griffes et des bijoux luxueux qu’ils arborent ou par des images toujours festives régulièrement postées sur les réseaux sociaux et qui laissent croire que dans les pays où ils vivent, les difficultés n’existent jamais. C’est parmi ces Congolais-là qu’au Canada, aux USA ou en Europe, on trouve ceux qui se sont « spécialisés » dans le piratage des cartes bancaires ou dans le trafic des voitures haut de gamme volées qu’on retrouve souvent sur le marché d’automobiles à Kinshasa ou entre les mains de certaines stars de la musique ou de certains opérateurs économiques et politiques. Au Canada plus précisément, plusieurs d’entre eux ont des dossiers à la police ou se retrouvent souvent en prison (nous savons de quoi nous parlons)[1]. À cause des investissements àimpact ostentatoire qu’ils font au Congo, grâce au blanchiment de l’argent sale, et à leur mode de vie dispendieux qu’ils mènent lors de leur bref séjour au pays, il est difficile à l’honnête Congolais de la diaspora d’expliquer aux membres de sa famille qu’il ne peut pas satisfaire à tous les besoins du clan. Il ne reste qu’une possibilité à ces membres de famille : monter des coups pour forcer la main à celui ou à celle qu’ils considèrent comme égoïste et chiche.
4.3. Le manque de dialogue et de transparence
Il est indiscutable qu’avec un emploi assez bien rémunéré, un Congolais moyen de la diaspora a une qualité de vie supérieure à celle de la majorité de nos compatriotes du pays. Cette qualité de vie se traduit notamment par la décence du logement, l’accessibilité aux soins de santé et au transport en commun, par la facilité pour les enfants (qui le veulent) de faire de bonnes études et par l’alimentation qui n’est pas un cauchemar quotidien. Au-delà de tout ceci, où qu’ils se trouvent, les Congolais de la diaspora font face, comme n’importe qui, à toutes les réalités des pays qui les accueillent et qui sont ignorées par nos frères et sœurs de la mère patrie : impôts, taxes diverses, coût cher des services( électricité, gaz, téléphone, télévision, chauffage de la maison…) alors qu’ils ont aussi droit à tous les loisirs pour eux-mêmes et pour leurs enfants(restaurant, cinéma, vacance, sport et toutes sortes de spectacles saisonniers de l’hiver ou de l’été). A cause de toutes ces dépenses contraignantes et inévitables, le salaire réel (ce qui reste en main) ne représente plus qu’un tiers du salaire nominal, illusoirement élevé. Comme pour l’extravagance, les préjugés de richesse dont sont victimes les Congolais de la diaspora sont entretenus, parfois inconsciemment, par le fait qu’eux-mêmes n’ont pas souvent un dialogue franc et permanent avec leurs membres de famille sur leur vie et surtout sur les difficultés qu’ils peuvent rencontrer, à l’instar de leurs voisins ou collègues des pays qui les ont accueillent. Ainsi, l’extravagance, le manque de dialogue et de franchise rentrent parfaitement dans le camp de définition de la victimologie, une discipline née de la criminologie.[2]
Conclusion
Pour des raisons diverses, généralement liées à la gestion chaotique du pays, au manque de justice distributive et de liberté sous toutes ses formes, plusieurs Congolais se retrouvent éparpillés dans le monde malgré eux. Dans plusieurs pays industrialisés ou émergents qui les accueillent, ces Congolais comptent parmi les communautés les plus nombreuses et les plus intégrées de la diaspora africaine. On trouve parmi eux des professeurs d’université, des chercheurs, des cadres d’entreprises, des fonctionnaires, des médecins, des ingénieurs et autres personnels de métiers qui contribuent efficacement au développement des pays hôtes et même de la mère patrie, au regard du volume des transferts des fonds effectués chaque année[3]. Alors qu’ils auraient pu oublier la misère qu’ils ont crue fuir, plusieurs de ces Congolais continuent de vivre, comme des victimes consentantes, dans la servitude orchestrée par les membres de leurs familles. Surexploités jusqu’à l’endettement, certains ont sur leurs épaules toute la misère qu’ils avaient crue fuir en s’expatriant et en sont arrivés à se demander si quitter le pays était une bonne décision. Il y en a qui ont craqué et se sont suicidés en découvrant la supercherie de leurs familles. Puisse cette analyse susciter une prise de conscience des uns et des autres pour que les relations entre les Congolais de la diaspora et les membres de leurs familles du pays soient plus fraternelles et basées sur la vérité, la transparence, l’humilité et la franchise.
Jean-Bosco Kongolo M. Juriste & Criminologue
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Références
[1] Deux congolais arrêtés pour 72 vols de voitures envoyées vers le Congo…
Les têtes vont tomber !
Après avoir reçu une plainte par des concessionnaires d’automobiles de la présence d’une organisation des voleurs de voitures, la police d’Ottawa vient d’arrêter deux Congolais. La police canadienne informe que ce groupe qui travaille aux Etats-Unis et au Canada, utilise des cartes de crédit frauduleux, également des financements avec des documents volés et frauduleux. Nous avons appris que 11 concessionnaires d’autos ont été victimes en Ontario et au Québec. Au moins une dizaine d’identités ont été volées pour commettre ces actes.
Les voitures volées sont destinées à l’envoi vers la République Démocratique du Congo via le port de Montréal. La police a aussi signalé qu’elle est au début de ses enquêtes et beaucoup d’arrestations vont suivre au Canada et aux Etats-Unis. Pour plus d’infos, veuillez contacter la police d’Ottawa., http://losako.afrikblog.com/archives/2008/07/26/10041806.html
[2] Wikipédia, La victimologie est une discipline récente, née aux États-Unis, qui ne fut d’abord qu’une branche de la criminologie. Elle consiste en l’analyse des raisons qui amènent un individu à devenir victime, des processus de victimisation, des conséquences que cela induit pour lui et des droits auxquels il peut retendre. https://fr.wikipedia.org/wiki/Victimologie.
[3] Kongo times, 8/11/2012, Le magazine onusien Afrique Renouveau fait le point sur la question et nous aide à mieux en cerner toute l’importance stratégique. L’année dernière, les Congolais ont battu leur propre record. Plus de 9 milliards 300 millions des dollars ont été transférés au Congo durant l’année 2011.
D’après la Banque mondiale, l’argent envoyé par des Congolais vivant à l’étranger contribue à la construction de 60 % des infrastructures. 4 enfants Congolais sur 10, sont envoyés à l’école grâce aux Congolais de la Diaspora. La plus grande partie des transferts n’est sont pas comptabilisée, Mais la plus grande partie des sommes qu’envoient les émigrés Congolais ne sont pas comptabilisées, et ne sont donc pas prises en compte dans les statistiques de la Banque Africaine de Développement(BAD) et de la Banque Mondiale. Car il y aussi les circuits parallèle pour envoyer les fonds, soit l’argent est envoyé par le billet des amis qui vont en vacances au pays, soit les fonds passent par des Agences clandestines qui se prolifèrent dans les communautés des Congolais de partout. http://afrique.kongotimes.info/rdc/diaspora/5186-congo-milliards-usd-envoyes-congolais-diaspora-2011.html.