Par Jean-Pierre Mbelu
Il arrive que Kinshasa puisse distraire les populations congolaises en multipliant les mises en scènes des problèmes pouvant détourner leur attention de ce qui se passe à l’Est du pays. La fameuse histoire de l’augmentation des émoluments des « déshonorés nationaux » suscite à raison de l’indignation sans qu’elle soit, malheureusement, analysée dans son véritable contexte et en tenant compte de ce qui se passe au pays depuis bientôt plus de deux décennies.
L’un des apports positifs du « procès dit des 100 jours » est d’avoir mis en exergue « le malentendu théorique » dont souffre notre pays dans presque tous les domaines du savoir et de « notre vivre ensemble ». Ce « malentendu théorique » peut conduire à une telle inversion sémantique que l’usage de certains mots et de certaines expressions sonne faux et/ou les évide de leur noble sens.
La malentendu théorique au Congo
Ce « malentendu théorique » peut aussi être lu comme étant le produit du copier-coller des institutions ayant fait leurs preuves ailleurs et au cours d’une histoire d’autrui sans qu’elles soient rendues capables de porter les luttes, les pensées, les attentes et les besoins des populations des pays où elles sont transplantées.
Ce « malentendu théorique » et l’inversion sémantique pouvant en résulter peuvent être un témoignage du fait d’avoir perdu de vue que les mots en tant qu’armes servant à la conquête des cœurs et des esprits sont, souvent, des « conquis ».
Ce « malentendu théorique » et l’inversion sémantique pouvant en résulter peuvent être un témoignage du fait d’avoir perdu de vue que les mots en tant qu’armes servant à la conquête des cœurs et des esprits sont, souvent, des « conquis ». Ils finissent par se poser et/ou s’imposer dans le quotidien de leurs usagers et à lui donner sens et orientation en fonction de ce qu’ils ont investi comme sueur et sang pour que ces mots leur parlent, leur disent quelque chose, soient signifiants pour eux.
Le discours que Lumumba prononce le jour de l’indépendance formelle du Congo-Kinshasa, par exemple, parlait beaucoup plus aux victimes directes de la traite négrière et de la colonisation qu’à leurs progénitures. Le contexte et l’histoire vécus réellement et sérieusement dans sa chair donnent aux mots leur véritable résonance et valeur. Il me semble.
Le copier-coller des institutions a provoqué et cela depuis plusieurs décennies « un malentendu théorique » aggravé par la guerre de basse intensité anglo-saxonne menée contre le Congo-Kinshasa par des proxies interposés et le processus affairo-kleptocratique qu’elle a facilité depuis que « le Conglomérat d’aventuriers » et leurs clients ont pris le pays en otage.
Un processus affairo-kleptocratique et non politique
Ce processus affairo-kleptocratique est abusivement dénommé « processus politique » sans qu’il ne soit, un seul instant, mis au service de la justice sociale, de « notre vivre ensemble » à travers une répartition équitable des richesses humaines et naturelles dont regorge le pays de Lumumba.
Au cœur de ce processus affairo-kleptocratique, les institutions évidées de leur véritable contenu et sens sont mises au service des « frappeurs en chef » abusivement dénommés officiellement « autorités morales ». Tel est le contexte pouvant, tant soit peu, aider à comprendre les envies actuelles et passées de leurs »déshonorés députés » nationaux issus des « élections-pièges-cons » au cours desquelles l’achat des consciences avait atteint des dimensions mafieuses inimaginables.
Au cœur de ce processus affairo-kleptocratique, les institutions évidées de leur véritable contenu et sens sont mises au service des « frappeurs en chef » abusivement dénommés officiellement « autorités morales ».
Imaginairement »dérangés » (abusés) par ce processus affairo-kleptocratique, plusieurs compatriotes ont cru qu’il pouvait en sortir quelque chose de bien, de bon et de juste jusqu’au jour où ils se rendent compte que ces « déshonorés » habitués à être corrompus- pour plusieurs d’entre eux- afin de voter des lois iniques au profit de « leurs frappeurs-autorités amorales » demandent que leurs émoluments soient augmentés dans un pays dont les caisses sont vidées chaque jour par « les nouveaux prédateurs ».
Finalement, ces compatriotes se rendent compte que cette caisse de résonance ne sert à rien et qu’elle doit être dissoute. Une double question : « Sa dissolution va-t-elle sortir le pays du système affairo-kleptocratique où il est empêtré depuis plus de deux décennies ? Cela d’autant plus que « les nouveaux prédateurs » ont produit « une nouvelle culture » de fanatiques, de thuriféraires et d’applaudisseurs habitués à ramasser des miettes tombant de leurs tables et devenus « esclaves volontaires » abrutis par ledit système ? »
Penser le Congo-Kinshasa
D’autres questions : « La multiplication de ces « incidents » à Kinshasa ne sert-elle pas à cacher ce qui se passe à l’Est du Congo-Kinshasa ? C’est-à-dire l’avancement du projet de balkanisation de ce pays ? Les militaires Sud-soudanais, rwandais, burundais, etc. s’y invitent. Ils tuent, pillent et s’emparent des terres congolaises. Un aéroport est en train d’être construit à Minembwe.
Penser le Congo-Kinshasa devrait permettre à ses dignes filles et filles de se livrer à des états généraux de tous les domaines pouvant participer du reformatage de l’imaginaire de ses populations désabusées par « les frappeurs » et d’user de leur esprit d’inventivité pour la mise en place des institutions qui soient réellement représentatives de l’ensemble de notre peuple avec « des mandats impératifs ».
Ne parler que de l’augmentation des émoluments de ces « déshonorés » dont le cynisme n’est plus à démontrer, n’est-ce pas distraire les Congolais afin qu’ils se détournent des questions essentielles face auxquelles le pays est confronté ? N’est-ce pas jouer le jeu des amnésiques ayant perdu de vue que « les frappeurs-autorités-amorales » dont ces « déshonorés » sont des fanatiques, des thuriféraires et des applaudisseurs sont porteurs, depuis toujours, d’un projet : participer à la balkanisation et à l’implosion du pays en l’appauvrissant anthropologiquement de l’intérieur ? »
Penser le Congo-Kinshasa devrait permettre à ses dignes filles et filles de se livrer à des états généraux de tous les domaines pouvant participer du reformatage de l’imaginaire de ses populations désabusées par « les frappeurs » et d’user de leur esprit d’inventivité pour la mise en place des institutions qui soient réellement représentatives de l’ensemble de notre peuple avec « des mandats impératifs ».
Minimiser ce faux débat sur les émoluments des « déshonorés » devrait nous conduire à nous concentrer davantage sur les les tactiques, les méthodes et les stratégies pouvant contrer ce projet mortifère : balkaniser et imploser le pays de Lumumba.
Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961