Par Jean-Pierre Mbelu
« L’histoire nous apprend que nous ne savons pas apprendre de l’histoire. » – M. JEAN
La vidéo d’Alain Foka a l’avantage d’ouvrir les yeux des aveuglés par le fanatisme et tous les compatriotes ayant cru à une guerre ethnique ou contre le terrorisme. Il n’y en a pas.
Comme d’habitude, il arrive qu’une vidéo (Chronique : En finir avec la traite négrière en Afrique) circulant sur les réseaux sociaux ou un article provocateur créent un débat houleux. Souvent, cela ne prend que quelques jours. Après, plus rien. Les compatriotes passent à autre chose.
Une guerre ouverte entre les Anglo-américains et les Chinois…
Alain Foka vient de créer ce débat. La vidéo qu’il a publiée soulève des indignations sélectives. Des compatriotes ont découpé de petits extraits. Ceux-ci ne permettent pas d’avoir une vue d’ensemble. L’accent mis sur les abus chinois condamnables sont beaucoup plus mis en exergue que ceux des autres. Ceux qui ont leur aérodrome à Walikale.
En filigrane, il y a lieu de lire, en marge de la dénonciation de « la traite négrière » entretenue par les trans et les multinationales, une guerre ouverte entre les Anglo-américains et les Chinois par leurs chiens de garde interposés.
Cela étant, Alain Foka vient de mettre le doigt sur l’un des nerfs de la guerre dont plusieurs compatriotes ne cessent de parler depuis plus de deux décennies. Le comble est que plusieurs commentateurs de cette vidéo feignent d’être étonnés en découvrant que le pays ne jouit pas en tout et pour tout de sa souveraineté et de son indépendance. (Ils auront intérêt à lire notre prochain livre intitulé « La fabrique d’un Etat raté »)
Néanmoins, en filigrane, il y a lieu de lire, en marge de la dénonciation de « la traite négrière » entretenue par les trans et les multinationales, une guerre ouverte entre les Anglo-américains et les Chinois par leurs chiens de garde interposés. La peur de l’avènement du monde multipolaire auquel travaille la Chine devrait être prise en compte. Tel est mon point de vue. Critiquable, bien sûr.
Pour les « Kongolais éveillés », la guerre raciste de prédation et de basse intensité se mène à plusieurs niveaux : au niveau des terres mais aussi des têtes et des esprits. Ses proxys sont connus. La vidéo d’Alain Foka a l’avantage d’ouvrir les yeux des aveuglés par le fanatisme et tous les compatriotes ayant cru à une guerre ethnique ou contre le terrorisme. Il n’y en a pas.
Les rouages du capitalisme global
Il y a longtemps que nous disons cela. L’un de nos textes le rappelle en citant Slavoj Zizek :
Pointer du doigt « les ennemis internes » du mal kongolais, c’est bien. Mais analyser les rouages du capitalisme global, c’est mieux. Le lien transnational entre ces « compradores kongolais » et les firmes multinationales doit pouvoir être tout le temps souligné. Casser ce lien passe par l’organisation et/ou la refondation d’un Etat souverain juste, pratiquant « le patriotisme économique », sécurisant et stabilisant son économie. A ce sujet, il y a des textes à lire et à relire.
Pointer du doigt « les ennemis internes » du mal kongolais, c’est bien. Mais analyser les rouages du capitalisme global, c’est mieux. Le lien transnational entre ces « compradores kongolais » et les firmes multinationales doit pouvoir être tout le temps souligné.
Et je relis ce texte de Slavoj Zizek : « Derrière la façade de la guerre ethnique nous sont ainsi donnés à voir les rouages du capitalisme global (…). Chaque chef de guerre entretient des liens commerciaux avec une compagnie ou une firme étrangère qui exploite la plupart des richesses minières de la région. Cet arrangement convient aux deux parties : la firme les droits miniers sans taxes ou autres tracasseries, le chef de guerre s’enrichit. » (S. ZIZEK, Vivre la fin des temps, Paris, Flammarion, 2011, p. 232
Et Zizek ajoute : « Oubliez le comportement sauvage de la population locale, ôtez simplement l’équation les entreprises étrangères de haute technologie, et voilà par terre toute l’édifice de la guerre ethnique qu’attisent les vieilles passions. » (Ibidem)
Pointer du doigt « les députés » et perdre de vue les autres « petites mains du capital » obéissant aux « décideurs » et vidant les institutions kongolaises de tout leur contenu, c’est chercher à attiser « un conflit superficiel » au cœur d’un même réseau transnational de prédation. Tel est le piège dans lequel plusieurs compatriotes sont tombés après la fameuse déclaration faite par Mboso.
Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961