Par Jean-Pierre Mbelu
Bien que Sassou soit « un enfant chéri » de la Françafrique, il sait tout sur les secrets de polichinelle de la guerre raciste de basse intensité imposée à la RDC. Il connaît le rôle que les nègres de service y joue. Pour rappel, se confiant à Pierre Péan le 08 août 2008 à Oyo, il situe Kagame et Kabila à leur juste place : Kagame est un paralytique, dit-il et Kabila son « Cheval de Troie ». Comment pourra-t-il gérer « les concertations nationales » convoquées par celui qu’il qualifiait en 2008 de « Cheval de Troie » de Paul Kagame ?
Quand le Rwanda publie le rapport Mucyo incriminant François Mitterrand, Edouard Balladur et l’appareil d’Etat français de complicité de génocide rwandais en 1994, Sassou Nguesso est étonné du silence de Paris face à ces accusations qu’il trouve fausses. Pour expliciter son inquiétude, il conte une parabole à Pierre Péan : « Quand le paralytique assis au pied du manguier joue avec des feuilles vertes, c’est qu’il y a quelqu’un dans l’arbre qui les a jetées. Sinon, il ne joue qu’avec des feuilles mortes ![1] » Et voulant conseiller Paris par Pierre Péan interposé, Sassou ajoute : « Il suffirait à Paris de dire à ‘’amis’’ les protecteurs de Kagame- les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et Israël- de calmer un peu leur protéger pour que les attaques cessent. [2]» Qui aurait pu mieux résumer « les secrets des carnages » que subit notre pays jusqu’à ce jour ?
A ce point nommé, il serait important de savoir comment le Président Sassou Nguesso peut accepter d’accompagner « des concertations nationales » congolaises autour d’une guerre raciste dont les acteurs majeurs seront absents ? Pourquoi va-t-il accepter d’aller à Kinshasa pour traiter d’ « un faux problème », lui qui connaît les véritables agresseurs de la RDC et leurs marionnettes ? Serait-il, lui aussi, piégé comme les mangecrates congolais afin qu’une fois à Kinshasa, il fasse comme si les Congolais(es) avaient des problèmes entre eux (elles) ? Va-t-il participer à la falsification de notre histoire tout en connaissant la vérité ? L’issue des « concertations nationales » pourrait nous aider à répondre à ces inquiétudes.
Dans ses confidences à Pierre Péan, Sassou Nguesso parle aussi de Joseph Kabila. Il évoque « le mystère Joseph » en ces termes : « Venu de nulle part, en quinze jours il a eu des honneurs de Paris, Bruxelles, Londres et Washington… Joseph est un cheval de Troie du président rwandais. Officiellement, pendant la journée, il s’oppose à Paul Kagame, mais, la nuit tombée, il marche avec lui…Or, en Afrique, c’est la nuit que les choses importantes se passent… »[3] Ces confidences de Sassou à Pierre Péan vont être confirmées cinq mois après quand Joseph Kabila et son mentor rwandais se mettront ensemble pour organiser la chasse contre les FDLR à l’Est de la RDC. Les faits sont là. Les élections-bidons organisées en 2006 comme en 2011 n’ont pas changé la donne de l’occupation de la RDC par les grandes puissances au travers de Kagame et Kabila, son cheval de Troie. Qu’est-ce que Sassou va faire à Kin ? Va-t-il se dédire en demandant aux Congolais(es) de se réconcilier avec le cheval de Troie de Kigali en le reconnaissant comme Président après les élections chaotiques de novembre et décembre 2011 ? Et puis, ce livre de Pierre Péan a-t-il été lu par ce qui nous reste encore de classe politique ?
Après avoir lu « Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique », des questions sur le véritable rôle que Sassou Nguesso va jouer dans « les concertations nationales » en RDC ne cessent de jaillir des esprits avertis. Est-ce le pouvoir d’occupation « alingi kosimbisa ye touche mpo akanga ye munoko te » ? Demain, il n’aura plus d’arguments à lui opposer. Lui qui savait que Paul Kagame était un paralytique et Joseph Kabila un cheval de Troie aura fait comme si la RDC ne souffrait que de manque de cohésion interne…Attendons voir. En attendant, soyons nombreux à relire « Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique » en sachant que pour cacher certaines choses à certains nègres il faut les mettre dans les livres.
Mbelu Babanya Kabudi
[1] P. PEAN, Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique, Paris, Fayard, 2010, p. 531.
[2] Ibidem.