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« Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? »

« Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? »

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Par Jean-Pierre Mbelu

« L’intellectuel est quelqu’un qui se mêle de ce qui ne le regarde pas » – Jean-Paul Sartre

L’un des miens, lors de nos multiples échanges, arrive souvent à poser cette question : « Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? » Ces jours-ci, je me la pose régulièrement. Peut-être à tort. Pourquoi est-ce que je me la pose ? Je remarque que dans ce monde interdépendant où nous vivons et où se situe notre pays, il y a des débats et des remises en question qui ne semblent pas être pris en compte au cœur de l’Afrique. Dès qu’un problème lié à ces débats et ces remises en question surgit, dans plusieurs de nos milieux, les éléments interdisciplinaires, historiques et factuels pouvant aider dans la recherche collective de solutions sont soit complètement ignorés, soit minimisés, soit complètement ridiculisés.

Un exemple récent est celui de la première sortie médiatique du Dr Muyembe au sujet des tests des vaccins du COVID-19. Bien qu’étant revenu sur cela, il a parlé au moment où plusieurs compatriotes ne cessaient d’échanger des vidéos sur certaines déclarations au sujet de la transmission de certaines maladies aux Africains par les vaccins interposés. Ces vidéos ont tellement inondées les réseaux sociaux que j’ai publié un petit article là-dessus.

La crise provoquée par le COVID-19 dénude le capitalisme ensauvagé

Les archives du Monde Diplomatique ont ressorti des articles de 2005 sur les abus éthiques dont l’Afrique souffre depuis longtemps en matière des tests des vaccins (L’Afrique, cobaye de Big Pharma). Ces deux articles invitent à réfléchir sur la transversalité de certains problèmes posés par des domaines du savoir différents. Au XXIe siècle, l’interdisciplinarité, la multidisciplinarité, la transversalité, « l’autodidactie », la formation continue et permanente, la polyvalence, etc. sont des concepts qui ne devraient pas négligés au cours des débats publics.

Isoler l’honnêteté et l’expertise du Dr Muyembe de tout ce contexte historique, critique et factuel du problème posé par les tests des vaccins fausse le débat. Et la question revient : « Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? »

En les intégrant, cela a créé un contexte où, croire en  »un expert-scientifique » sur parole devient impossible sans un débat ouvert au grand public. Cela d’autant plus que  »la science, malgré sa prétention puritaine, avance toujours par essais et erreurs ». Cela d’autant plus que  »les liens incestueux » entre les experts-scientifiques et les oligarques d’argent dominants et possesseurs des multinationales pharmaceutiques est de plus en plus un secret de Polichinelle.

Eh ben, voilà ! Dans certains milieux congolais, tout ce contexte et les mesures de discernement et de lucidité qu’il dicte ont été ignorés au profit de l’honnêteté et de l’expertise du Dr Muyembe. Isoler l’honnêteté et l’expertise du Dr Muyembe de tout ce contexte historique, critique et factuel du problème posé par les tests des vaccins fausse le débat. Et la question revient : « Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? »

La crise provoquée par le COVID-19 dénude le capitalisme ensauvagé. Elle dit ses limites et le désastre auquel il a conduit le monde. Elle appelle une alternative. Celle-ci ne sera pas une génération spontanée. Elle risque de ne pas prendre corps si les masses populaires éveillées refusent de s’auto-organiser sur fond d’une matrice privilégiant la coopération, la solidarité, la sécurité sociale, « le protectionnisme économique », la souveraineté, l’autodétermination des peuples, la protection des frontières, etc.

Dans un monde interdépendant, une approche insulaire du Congo-Kinshasa est une bêtise

Des compatriotes qui, hier, soutenaient « l’amélioration du climat des affaires » n’ont pas encore revu leur copie. Ils prônent un « plan Marshall » pouvant être financé par « les partenaires » ayant beaucoup de difficultés à convertir cette crise en opportunité de « choc » dans leurs propres pays. Ces compatriotes croient encore que « les tueurs à gages » du capitalisme ensauvagé doivent demeurer à jamais « les décideurs » quant aux orientations économiques à prendre au cœur de l’Afrique après le COVID-19. « Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? »

Demain, au pays de Lumumba, le débat sur l’échec de la prise en otage du fait politique par le fait économique risque d’apparaître comme « nouveau ». Pourtant, là où cela s’est produit, il est en train de devenir « la chose de plus en plus la mieux partagée » et même dépassé. « Qu’est-ce qui ne va pas avec nous ? » Notre devenir collectif serait-il enfermé dans le passé d’autrui ?

Un autre Congo-Kinshasa doit pouvoir s’inventer en se refondant sur des principes autres que ceux qui ont et sont en train de le plonger dans un gouffre sans fond. Plus de cinq décennies de néocolonisation et de capitalisme ensauvagé ! Esquissons un petit bilan. Où sont les services publics du pays ? Les hôpitaux , les écoles et les universités dignes de ce nom ? Les emplois ? Les routes et les autoroutes de communication et de télécommunication ? Les énergies ? L’eau ? Le courant électrique ? Les services de sécurité ? La monnaie ? Faut-il continuer sur la même lancée en évitant de démonétiser les concepts tels que « partenaires », « décideurs », « bienfaiteurs », « aide », « Institutions Financières Internationales », etc ?

Je ne le dirai jamais assez : « Dans un monde interdépendant, une approche insulaire du Congo-Kinshasa est une bêtise. » La néocolonisation de ce pays l’a plongé dans le système ultralibéral dans toute sa cruauté. Il est encore pris dans les fourches caudines des Institutions Financières Internationales. Il ne s’en sortira pas en faisant semblant de  »lutter contre la corruption ». Un autre Congo-Kinshasa doit pouvoir s’inventer en se refondant sur des principes autres que ceux qui ont et sont en train de le plonger dans un gouffre sans fond. Plus de cinq décennies de néocolonisation et de capitalisme ensauvagé ! Esquissons un petit bilan. Où sont les services publics du pays ? Les hôpitaux , les écoles et les universités dignes de ce nom ? Les emplois ? Les routes et les autoroutes de communication et de télécommunication ? Les énergies ? L’eau ? Le courant électrique ? Les services de sécurité ? La monnaie ? Faut-il continuer sur la même lancée en évitant de démonétiser les concepts tels que « partenaires », « décideurs », « bienfaiteurs », « aide », « Institutions Financières Internationales », etc ?

A travers « un dictionnaire », cette démonétisation a déjà commencé. Il suffit de le vulgariser et d’en faire un usage critique et intelligent.

Aussi remarquons-nous que, chez nous, dans plusieurs milieux, la philosophie de « chance eloko pamba » a détruit « le bomoto » dans plusieurs d’entre nous. Elle nous a plongés dans une hypocrisie collective consistant à défendre et à protéger « les frappeurs » autoproclamés « grands prêtres » et « hommes d’Etat-raté ». Lorsque ces derniers ont recourt à la ruse kleptomaniaque, nous les estimons « très intelligents » confondant ainsi « ruse » et « intelligence ». L’habitude de ramasser « leurs miettes » a détruit plusieurs cœurs et plusieurs esprits. Cette hypocrisie collective se moquant des faits et de l’histoire pourrait nous perdre comme « nation » et comme « peuple ».Travaillons avec acharnement à nous en départir. Un autre Congolais et/ou une autre congolaise est possible !

Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961

INGETA.

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Notre travail consiste à :
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