Par Mufoncol Tshiyoyo
Parler d’élections, quand l’héritage symbolique de la terre de nos aïeux est menacé, c’est se moquer à la fois de la souffrance des populations congolaises et de la capacité de renaissance de l’homme congolais. Nous rejetons également l’idée que l’on puisse évoquer ce que l’on nomme couramment chez nous au Congo des candidats et des candidatures, alors que des morts se comptent par des milliers au Congo et sans qu’aucune farce intérieure n’en fasse cas et allusion. La question, c’est qui, au Congo, et parmi les Congolais qui se bousculent aux postillons de son leadership, a peur de dire un mot sur des morts congolais ? Le silence établi sur la mort des Congolais à l’est du Congo et au Kasaï profite à qui ?
La plupart des populations congolaises, qui sont renvoyées dans la rue et qui se trouvent aujourd’hui sans abris et, sans endroits précis où reposer leurs têtes, ignorent ce que c’est que le Coltan. Elles n’ont aucune idée sur ce que c’est que le cobalt, sur ce que c’est que l’Uranium et nous en passons. Bien qu’elles vécussent sur une terre qui regorge du diamant, de l’or, du manganèse et d’autres ressources dites naturelles, beaucoup de Congolais ne les ont jamais vus. Ils ne les ont jamais palpées. Elles connaissent à peine de leur importance. Des individus qui ignorent tout de ce qu’ils sont censés posséder se laissent maltraiter au motif qu’ils habitent sur des richesses dont ils ignorent l’existence. On prétend les punir parce qu’ils seraient riches. C’est tout le contraire. Des Noirs ne peuvent disposer de ce que les autres leur attribuent.
Normalement, tout est faux au Congo
Aujourd’hui, c’est plus qu’un devoir. C’est plus qu’une obligation. Les populations nègres du Congo Kinshasa revendiquent avant tout et uniquement un endroit où se poser, un coin où se reposer, un abri où dormir et un terrain sur lequel leur progéniture ira et viendra, jouera comme tous les autres enfants appartenant à d’autres peuples. Des enfants noirs et congolais partagent également les mêmes droits, sinon ils sont appelés à les arracher, entre autres les droits de bénéficier du fruit de leur labeur. Tout ceci, c’est au nom du principe de succession des générations.
Les populations congolaises n’expriment qu’un seul désir : se sentir chez soi, chez elles au Congo. Les images d’aujourd’hui présentent un peuple que l’Angola chasse. Ils en ont bien droit ces Angolais, surtout quand on sait que l’Angola exploite au détriment du Congo le pétrole congolais dans les eaux profondes du Bas-Congo. C’est à titre de récompense pour le soutien de l’Angola, allié des USA à Paul Kagamé et à Museveni, et c’est bien sûr en complicité avec quelques nègres et ennemis de l’intérieur qui sont triés sur le volet. Si Kagame et Museveni n’exterminent déjà pas une bonne partie de la population congolaise, ils les expédient du moins en errance. À Béni où l’on massacre régulièrement des Congolais, des populations nouvelles, une forme de peuplement de remplacement, apparaissent au grand jour. Nous allions nous étonner, mais rien du tout lorsque ces prétendues populations réclament désormais aux autochtones de partager avec eux leur terre, au motif qu’elles la cultivaient déjà. Que les autres en parlent ou pas, nous nous en moquons aussi longtemps que nous sommes en mesure d’en parler nous-mêmes.
À Béni où l’on massacre régulièrement des Congolais, des populations nouvelles, une forme de peuplement de remplacement, apparaissent au grand jour. Nous allions nous étonner, mais rien du tout lorsque ces prétendues populations réclament désormais aux autochtones de partager avec eux leur terre, au motif qu’elles la cultivaient déjà. Que les autres en parlent ou pas, nous nous en moquons aussi longtemps que nous sommes en mesure d’en parler nous-mêmes.
Normalement, tout est faux au Congo. Cela devient encore plus grave quand la presse dite occidentale s’en mêle. Pour elle, des nègres congolais se battent entre eux. Cette rengaine est souvent entonnée pour, dit-on, se faire une bonne conscience ; encore un gros mot, mais qui ne veut rien dire du tout. La morale est tout simplement évoquée ici pour meubler un faux décor. Dans la Généalogie de la morale, Nietzsche évoque la morale du plus fort opposée à celle des dominés. On serait tenté de se poser la question suivante à laquelle se fier ? C’est alors que l’envie de nous battre, et de mourir à l’occasion, pour notre peuple, se démultiplie, se renforce et prend une autre dimension. Le discours de Franz Fanon sur l’ONU vient donner du sens à notre lutte. Et pour rappel, l’ONU est au Congo depuis 1960. C’est depuis les années soixante, que l’ONU, particulièrement les USA, la France, la Grande Bretagne, l’Allemagne, la Belgique et les autres orchestrent et nourrissent la déstabilisation du Congo. L’ONU maintient le Congo en l’état de son assujettissement perpétuel.
Et Franz fanon, de faire la révélation suivante : « Petit à petit, l’idée d’une intervention de l’ONU prenait corps. Alors on peut dire aujourd’hui que deux erreurs simultanées ont été commises par les Africains. Et d’abord par Lumumba quand il sollicita l’intervention de l’ONU. Il ne fallait pas faire appel à l’ONU. L’ONU n’a jamais été capable de régler valablement un seul des problèmes posés à la conscience de l’homme par le colonialisme, et chaque fois qu’elle est intervenue, c’était pour venir concrètement au secours de la puissance colonialiste du pays oppresseur. Voyez le Cameroun. De quelle paix jouissent les sujets de M. Ahidjo tenus en respect par un corps expéditionnaire français qui, la plupart du temps, a fait ses premières armes en Algérie ? L’ONU a cependant contrôlé l’autodétermination du Cameroun et le gouvernement français y a installé un « exécutif provisoire ». Voyez le Vietnam. Voyez le Laos. Il n’est pas vrai de dire que l’ONU échoue parce que les causes sont difficiles. Car enfin, avant l’arrivée de l’ONU, il n’y avait pas de massacres au Congo. Après les bruits hallucinants propagés à dessein à l’occasion du départ des Belges, on ne comptait qu’une dizaine de morts. Mais depuis l’arrivée de l’ONU, on a pris l’habitude chaque matin d’apprendre que les Congolais s’entre-massacraient.
Le temps est au rendez-vous
Aujourd’hui, on nous dit que des provocations répétées furent montées par des Belges déguisés en soldats de l’Organisation des Nations Unies. [Et c’est ce qui se passe encore aujourd’hui à l’est du Congo] On nous révèle […] que des fonctionnaires civils de l’ONU avaient en fait mis en place un nouveau gouvernement le troisième jour de l’investiture de Lumumba. Alors on comprend beaucoup mieux ce que l’on a appelé la violence, la rigidité, la susceptibilité de Lumumba », (Fanon Franz, 1964, Pour la Révolution Africaine). Eh bien, c’est pour conclure que depuis l’arrivée de la MONUSCO au Congo, le nombre des groupes dits rebelles est passé de 3 à 150. Suivez alors bien mon doigt.
Un message aux amis internes et externes qui nous lisent régulièrement, et qui fréquentent notre mur, des journalistes et autres, n’est-ce pas que vous disposez des entrées dans votre monde, et si c’est le bien le cas, nous vous assurons que nous sommes prêts pour la lutte, un combat par tous les moyens. Nous allons nous battre pour le Congo, au Congo et aussi pour les nôtres. Notre discours se résume en une seule expression qui est rendue ici en lingala, une des langues du Congo : Likambo ya mabele. C’est de notre terre dont il s’agit. Il est question de notre survie, comme peuple et comme identité. Nous sommes prêts en payer le véritable prix.
Le temps est au rendez-vous, celui de donner libre cours aux grands hommes congolais… Il y a un vide, et à vite combler. Les hommes qui deviennent grands, s’ils ne trouvent d’occasions, qui se présentent à eux, ils les créent de nulle part. Je dirais qu’au Congo, nous en sommes là, presque.
Le temps est au rendez-vous, celui de donner libre cours aux grands hommes congolais. Dans son livre Napoléon et De Gaule, je fais plus allusion au contenu du livre qu’à autre chose, Patrice Gueniffey, son auteur qui, en citant à son tour Carlyle, dans son livre Les héros, écrit entre autres ce qui suit au sujet des grands hommes : « Selon moi, affirmait Caryle, l’histoire universelle, l’histoire de ce que l’homme a accompli sur terre, n’est au fond pas autre chose que l’histoire des grands hommes qui ont œuvré ici-bas. Ils ont été les conducteurs des hommes, leurs modèles, leurs références et, dans une acception large du terme, les initiateurs de tout ce que la grande masse des humains s’est efforcée de réaliser ou d’atteindre. Tous les glorieux accomplissements que nous avons contemplés dans le monde sont, à proprement parler, les résultats matériels, la réalisation pratique et la concrétisation de la pensée et de l’intellection généreuses dans l’esprit et le cœur des grands hommes envoyés en ce monde ». (Gueniffey, 2017 : 11).
Pour définitivement conclure mon texte ici présent, Et dans le même registre, je cite quelqu’un me disait hier, un ami et il se reconnaîtra en me lisant : « Mon frère je vais te poser une question sérieuse ! Aujourd’hui quand on parle […] de Zulu, On voit leur chef, Les zulu ont eu le leur, Les Ashanti également etc. Mais quand on parle de nous, […] personne ; juste des roitelets etc. où est donc le MULOPWE ? ». Il y a un vide, et à vite combler. Les hommes qui deviennent grands, s’ils ne trouvent d’occasions, qui se présentent à eux, ils les créent de nulle part. Je dirais qu’au Congo, nous en sommes là, presque.
Likambo ya mabele!
Mufoncol Tshiyoyo
MT & Associates Consulting Group