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Le projet de recolonisation du Congo par l’Occident

Le projet de recolonisation du Congo par l’Occident

Le projet de recolonisation du Congo par l’Occident 1024 578 Ingeta

Par Mufoncol Tshiyoyo

Le projet de recolonisation du Congo par l’Occident passe par la promotion du rôle de la religion dans la société ainsi que par l’affaiblissement de l’action politique.

« Les vérités tuent. [Et] celles que l’on tait deviennent vénéneuses ». Je ne voudrais pas courir le risque d’étouffer, en moi, l’idée de révolte qui traverse mon esprit à un moment si particulier de l’histoire du Congo-Kinshasa. Il ne le faudrait pas, surtout quand on assiste à l’« affaiblissement » de l’action politique dans son pays. En fait, « à quoi sert le pouvoir politique, si ce n’est de donner sa chance à l’impossible ».

Donner sa chance à l’impossible

Et au Congo-Kinshasa, comment donner sa chance à l’impossible, lorsque des « acteurs », qui sont supposés être politiques, se cachent et cachent désormais leur immaturité, – incompétence politique notoire-, derrière leur affiliation religieuse et chrétienne. Tout le monde se découvre religieux et surtout chrétien. N’est-ce pas étonnant, que les uns choisissent de parler politique et gestion de cité, par la voix des prêtres catholiques ? Tandis que d’autres, dans l’intention de s’opposer à l’Eglise Catholique Romaine, tombent bêtement aussi dans le piège de la guerre non déclarée des religions ? Et cette situation de conflit, par groupements religieux interposés, ne peut que contenter des forces de nuisance qui attendent d’en tirer des dividendes réels. La Kabilie, cheval de Troie de Paul Kagamé à Kinshasa, recourt à son tour à la parole préférentielle du religieux protestant. Les deux camps, que tout semble opposé et qui viennent d’abandonner leur leadership au christianisme, communiquent par voie des messages à décoder de l’Église Catholique ainsi que celle de l’Eglise protestante. Le siège spirituel de l’Église protestante se trouve aussi, comme par enchantement, à l’extérieur du Congo.

Il y a quand même lieu de se demander comment le Congo-Kinshasa est arrivé à cet état des choses où ce sont le religieux et la religion qui prédominent au sein de l’ordre régnant. Ce serait même merveilleux pour certain, à la limite un effet dû au hasard, à la normalité des choses, que la situation du Congo corresponde aujourd’hui à la réalité telle que décrite précédemment : la prise en charge de la politique par des commis religieux. Par contre, pour des gens comme nous, moi en particulier, tout est issu d’un long processus de déstabilisation du pays. Et aujourd’hui, on assiste justement à l’aboutissement, voire à l’accomplissement du projet de l’Occident, qui a été conçu et exécuté dans des laboratoires à idées où se discutent et se décident les conditions de la domination du nègre congolais.

Comment donner sa chance à l’impossible, lorsque des « acteurs », qui sont supposés être politiques, se cachent et cachent désormais leur immaturité, – incompétence politique notoire-, derrière leur affiliation religieuse et chrétienne. Tout le monde se découvre religieux et surtout chrétien.

Le premier qui en a récemment jeté les bases, et ce n’est pas surprenant qu’il soit un sujet belge, il s’agit de Paul Henri Spaak. À l’époque, il fut ministre belge des affaires étrangères et secrétaire général de l’OTAN. Spaak a eu à soutenir l’intervention belge et américaine au Congo, dont les conséquences sont connues, notamment l’assassinat de Lumumba. Mais que préconisait le sieur Paul Henri Spaak dans sa note adressée au roi Baudoin de la Belgique, le roi des Belges ? Selon cette note de Spaak à son roi et De Witte, un autre sujet belge et auteur du livre « L’Ascension de Mobutu/ Comment la Belgique et les USA ont installé une dictature », Paul Henri Spaak a recommandé à la Belgique, je cite notamment : « De tenir les instruments de la politique hors des mains congolaises. [Car d’après lui] Ce qui était bon pour les Belges ne l’était pas pour les Congolais.  » Chez nous, [c’est Paul Henri Spaak qui toujours, c’est-à-dire en Belgique et en Occident], les partis politiques répondent [plus] à des courants historiques » ; [Ce qui n’est pas le cas] au Congo, [Spaak affirme même qu’] « ils ne répondent à rien ». [ Dans la même foulée, Spaak a attiré l’attention de la Belgique contre le ]  » grand courant historique puissant [de] Bandung, [dont l’ambition affichée fut], de liquider le colonialisme sous toutes ses formes et de donner à tous les peuples l’indépendance.

[Pour Spaak, et à l’entendre], ce serait « un désastre si la Belgique devait renoncer au Congo. [Et la suite de sa déclaration explique mieux, et encore de nos jours, comment les élites belges et occidentales considèrent leurs nègres congolais. Spaak de déclarer, je cite :] « Continuer notre tâche de civilisation » ne serait pas facile. […] Il n’y a jamais eu de nation congolaise », et les peuplades étaient » encore très peu civilisés ». Bruxelles devait en profiter « pour transformer le Congo en un État fédéral, avec une administration fortement décentralisée ». [On comprend pourquoi tous les gouvernements qui ont suivi après l’assassinat de Lumumba, et jusqu’à ce jour, et tous les professeurs d’université congolais qui en ont fait leur dada, ont toujours milité en faveur de fédéralisme, alors que le Congo-Kinshasa est un pays qui sortait de l’esclavagisme et de la colonisation]. Spaak était partisan d’une forme édulcorée de politique du « diviser pour mieux régner » », extrait de Paul Henri Spaak, « Notre sur mon voyage au Congo », 23 Aout 1956, Archives AE, Papiers Rothschild, 18770/VIII », citée également par De Witte, dans « L’ascension de Mobutu/ Comment la Belgique et ont installé une dictature, 2017 : 96).

Au Congo, tout le monde serait devenu chrétien

Aujourd’hui, la classe politique congolaise est portée disparue. Au Congo-Kinshasa, il n’existe plus ni d’hommes politiques congolais, ni des partis politiques sur lesquels les masses congolaises devraient et doivent compter et aussi exiger des comptes à rendre. À la première occasion, lorsqu’elle se présente, tout ce beau monde court à l’Église. Il y va pour se disputer les premiers bancs de l’Église, s’asseoir même serrés côte à côté avec des ambassadeurs occidentaux, justement pour être vu. Et à voir tous ces ambassadeurs à l’Église, soit catholique, soit protestante, on se demande combien de ces derniers, quand ils sont chez eux en Europe, fréquentent les mêmes églises, qui malheureusement sont souvent vides et remplis par de vieillards.

Au Congo, tout le monde serait devenu chrétien. Mais que dit l’Abbé congolais, Pini-Pini , qui a été limogé par l’Eglise catholique de Belgique, pour avoir osé critiquer les croisades du christianisme en Afrique ? Le compatriote Pini-Pini a trouvé des mots durs adressés à l’endroit de la religion instituée , alors qu’il l’a pourtant servie avec zèle. Pini-Pini déclare : « Pouvoir divin ne répondant que de Dieu seul que personne ne voit ni n’entend, Dieu étant en réalité le pape [remplacé par autre chose si on est protestant] hissé mécaniquement au niveau divin. C’est l’avènement du pouvoir dit des clés du royaume, ou pouvoir de lier et de délier, la dictature papale dont le socle est l’impunité et la conséquence l’exclusion de la majorité au profit d’une petite minorité qui la soumet. C’est ledit règne du royaume des cieux. Ce pouvoir a profondément bouleversé le visage politique de l’Europe en y instaurant un règne de terreur inédit.

Aujourd’hui, la classe politique congolaise est portée disparue. Au Congo-Kinshasa, il n’existe plus ni d’hommes politiques congolais, ni des partis politiques sur lesquels les masses congolaises devraient et doivent compter et aussi exiger des comptes à rendre. À la première occasion, lorsqu’elle se présente, tout ce beau monde court à l’Église.

La soumission ou le bûcher. […], Ce pouvoir devenu dermatologique s’est étendu à la couleur de la peau des Européens, […], désormais mis-à-part et poussés au-dessus de tous les autres hommes offerts, eux, en pâture, comme ennemis de Dieu à anéantir, la terre ne leur appartenant pas. [C’est ce que le Franco-béninois rappelle quand dans une conférence à Paris et devant le gotha français, qui applaudissait en plus, que l’Afrique n’appartenait pas aux Africains, mais aux Européens. Et que les Africains, eux-mêmes, ne le savaient pas] C’est donc une véritable machine de guerre [qui est déployée] et qui va à l’assaut du monde en y déversant une violence inouïe. Elle répand la croisade partout », (extrait de Pini-Pini .2018. Croisade de l’Europe christianisée contre l’Afrique ancestrale, Paris : Ed. AfricAvenir).

Toutefois, je ne suis pas contre le fait d’afficher ses préférences religieuses, mais pas jusqu’à en faire l’objet d’un culte politique. Je dénonce l’absence de démarcation entre la politique et le religieux. Même si mon texte n’a pas pour prétention de parler de la différenciation entre la religion et la politique, de dire où devrait s’arrêter le pouvoir de l’une et commencer celui de l’autre . Je relevé tout simplement des faits qui pouvaient prêter à confusion en l’absence d’un regard critique fondé uniquement sur la raison.

L’Eglise et l’affaiblissement de la politique au Congo

Concernant l’appel à la mobilisation générale du peuple congolais, les deux églises chrétiennes, catholique romaine et protestante, ont su faire ce qu’elles ont pu être capables dans les limites respectives de leur champ d’action. Sauf que le clergé catholique arrive à peine à dénoncer le Rwanda et à ouvertement parler du mercenariat de Paul Kagamé. Et c’est avec raison d’ailleurs que certains pourront rétorquer que ça n’avait rien à voir avec son rôle.

Je suis d’accord avec eux. Mais, pour être mobilisées comme un seul homme, les masses populaires congolaises, ont droit de connaître la vérité et même de l’exiger de tout le monde. Si la tâche de designer à son peuple un adversaire, un ennemi commun, contre lequel ce dernier devait se battre, revenait à la politique et aux politiques, je me demande pourquoi ceux qui sont supposés être politiques au Congo exigent et confient à l’Eglise d’assumer un rôle qui n’est pas avant tout le sien ?

Les difficultés rencontrées par l’Eglise dans la désignation de l’adversaire de l’homme congolais tirent leur origine dans la disparition de la politique comme pouvoir de gestion et de direction de la société.

C’est le même constat que l’on fait après avoir entendu le discours de l’Église protestante. Le pasteur a plus parlé de tous les pays voisins, alors que le Congo-Kinshasa a d’abord affaire à la soldatesque et à la domination du Rwanda de Paul Kagamé, mercenaire attitré des élites anglo-saxonnes dans les Grands-Lacs. Ses agents en terrain conquis s’étaient réunis à Kinshasa et ont fait circuler une photo sur les réseaux sociaux comme un message d’affirmation de soi. Les difficultés rencontrées par l’Eglise dans la désignation de l’adversaire de l’homme congolais tirent leur origine dans la disparition de la politique comme pouvoir de gestion et de direction de la société.

Et ce n’est pas non plus pour rien que je dis que la religion, comme à l’époque du Roi Leopold II de Belgique, vient plus au secours de la défense des intérêts de ses maîtres, à savoir l’Occident. Car, l’Eglise, et ce de manière générale, en acceptant de participer à l’affaiblissement de la politique au Congo, fait le jeu des forces pour qui la politique n’est pas l’affaire du colonisé et du nègre congolais.

Les Congolais savent que c’est contre lui , l’Occident , qu’ils ont affaire

Comme conclusion, les bien- pensants congolais, toutes tendances confondues, se sont toujours montrés très critiques vis-à-vis de l’Iran, ainsi que de tous ceux qui osent défendre la cause iranienne. On est tous traités soit d’extrémistes, soit de radicaux, soit d’intellectualisme frustré, alors que dans son for intérieur, on sait que l’on porte haut et fort, en plus avec passion la cause de la terre de ses ancêtres. Est-ce que c’est dangereux de défendre les siens, de se donner pour sa patrie et de vivre intensément chaque instant du processus de ce noble combat ?

Christiane Taubira pense le contraire, quand elle met au défi qui que ce soit de prouver le contraire de son assertion ci-après : « Je prétends et j’attends qui voudra me contredire, qu’on ne peut vivre sans exaltation, ni dans l’exaltation ». Surtout quand il s’agit de sa patrie en situation de danger. Quelle est la différence à établir aujourd’hui entre les messes et autres marches menées sous la houlette du clergé catholique et protestant et celles dirigées en Iran sous le commandent et la direction des Ayatollah ?

L’Occident qui a choisi son camp au Congo, qui a jeté son dévolu sur le mercenariat de Paul Kagamé et sur la Rwanda pour gouverner le Congo, doit apprendre, de nous, que les Congolais savent que c’est contre lui , l’Occident , qu’ils ont affaire. Puisque personne n’a le courage d’assumer publiquement la responsabilité de cette opposition contre l’occident, il est du devoir de la jeunesse congolaise d’en incarner la paternité.

Je suis, et je préfère encore et toujours utiliser le « je », dans mon discours, pour signifier que j’assume tout ce que je tiens comme propos. Je souffrirais si je me cachais derrière un « nous » impersonnel et insensible, quand le temps à sonner de montrer la voie à la jeunesse congolaise pour l’aider à s’assumer avec courage, à défendre en toute liberté la patrie en danger, à parler le langage de sa souveraineté, de l’indépendance, cher à Lumumba et celle de l’intégrité territoriale du Congo.

L’Occident qui a choisi son camp au Congo, qui a jeté son dévolu sur le mercenariat de Paul Kagamé et sur la Rwanda pour gouverner le Congo, doit apprendre, de nous, que les Congolais savent que c’est contre lui , l’Occident , qu’ils ont affaire. Puisque personne n’a le courage d’assumer publiquement la responsabilité de cette opposition contre l’occident, il est du devoir de la jeunesse congolaise d’en incarner la paternité. « Il nous reste à réapprendre à faire le monde, apprendre à refaire le monde », clame Taubira. Et à tout inventer, insiste Thomas Sankara. Pour moi, le sens à donner à la lutte du Congo est aussi à refaire. Pour la suite, le combat a besoin de l’apport de chacun parmi nous. Il faut une association des volontés et des penseurs libres.

Likambo ya mabele, ezali likambo ya makila.

 

Mufoncol Tshiyoyo,
Congolais na molimo pe na makanisi
MT& Associates Consulting Group

INGETA.

REINVENTONS

LE CONGO

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