L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu analyse l’intervention de Kabila devant le « congrès » congolais, met en évidence les pièges et non-dit de son discours et décrypte sa ruse. Jean-Pierre Mbelu démontre également comment le processus de fausseté se poursuit au Congo, tout comme celui d’amplification du chaos et explique pourquoi les élites occidentales ont encore besoin de Kabila d’une part, et comment elles s’efforcent de poursuivre le pillage du Congo.
Sur l’intervention de Kabila devant le congrès
Ce discours n’a pas été tenu devant un congrès pour la simple raison que le sénat a déjà débordé le temps de son mandat. C’est donc une association d’un parlement soi-disant issu des élections chaotiques de 2011 et un sénat qui a plus sa raison d’être.
Kabila débite un discours, on a l’image d’un monsieur qui parle face à un congrès, qui est faux, et il est applaudi émotionnellement par ses fanatiques dont plusieurs ont été nommés. Le processus de la fausseté se poursuit.
Sur non-dits et pièges du discours de Kabila
Le premier piège est que, face aux congolais qui voulaient que la fameuse communauté internationale intervienne dans ce fameux dialogue, Kabila affirme que le salut du Congo ne viendra ni des Nations-Unies, ni de l’Orient, ni de l’Occident. Il s’affirme comme l’unique personne habilitée à pouvoir convoquer le dialogue. Kabila est en train de chercher maladroitement la fibre nationaliste et patriotique congolaise. C’est à ce niveau là que se situe le problème. Parce que c’est un usurpateur. Il usurpe une idée et croit qu’il peut se passer de l’intervention de ceux qui l’ont fait calife à la place du calife pour un dialogue authentiquement congolais. Nous sommes là en plein dans la manipulation. Quand vous écoutez attentivement ce discours et que vous revenez aux propos de Paul Kagamé, eux aussi adressés à la fameuse communauté internationale, qui semblait lui reprocher de pouvoir aller au-delà de son mandat de 2017, vous retrouvez à peu près les mêmes éléments de langage. Comme quoi, ce n’est pas JOka qui a parlé, mais c’est Kagamé qui parlait en lui.
Sur le jeu de la communauté internationale au Congo
Il y a comme une complicité entre le discours de Kabila et le discours de Kagamé. Cela est révélateur du jeu de cette fameuse communauté internationale. Si Kagamé peut parler dans ce sens là, tout en sachant qu’il est un produit de la communauté internationale, si Kabila peut parler dans ce sens là, tout en sachant qu’il est le cheval de Troie d’un produit de la communauté internationale, c’est que nous sommes en plein dans un jeu alimenté par les faiseurs de roi. Ils sont capables de faire ceci. Il y a comme une complicité entre le discours de Kabila et le discours de Kagamé. Cela est révélateur du jeu de cette fameuse communauté internationale. Si Kagamé peut parler dans ce sens là, tout en sachant qu’il est un produit de la communauté internationale, si Kabila peut parler dans ce sens là, tout en sachant qu’il est le cheval de Troie d’un produit de la communauté internationale, c’est que nous sommes en plein dans un jeu alimenté par les faiseurs de roi. Ils sont capables de faire ceci: Les élites occidentales créent ainsi, dans un même pays, deux camps opposés pour la simple raison d’impliquer les populations civiles afin qu’on les tue. Une fois que les camps qu’ils ont créés et qui ont réussi à s’imposer de manière théâtrale, ont impliqué les populations civiles dans leur jeu et les ont tué, ces élites occidentales interviennent comme pour venir mettre la paix.
Sur la ruse de Kabila
Kabila est un mercenaire qui est en train de solliciter les plus naïfs d’entre nous au nom de ce qu’il appelle la fibre patriotique. Finalement, on va organiser combien de rencontres pour pouvoir arriver à un consensus ? Qui a tiré sur les populations le 26 novembre 2011? C’est sa police politique. Qui aujourd’hui peut, au Congo, recourir aux gros moyens pour pouvoir y perpétrer la violence ? Qui le fait depuis 2006 ? C’est lui.
Kabila prend les congolais pour des imbéciles. Il tient un discours au cours duquel il se porte comme garant de la paix. Il considère que son discours sur l’Etat de la nation est un projet de société qui voudrait promouvoir la vie et le développement. Voilà comment un monsieur qui a usé et abusé des moyens de l’Etat failli congolais, peut croire que l’usage de ces moyens là lui permet de devenir le meilleur garant de la vie et survie des congolais, ce qui est faux et contradictoire. Il peut à la fois vanter les efforts macro-économiques de son gouvernement et à la dire qu’ils n’ont pas suffisamment les moyens pour organiser des élections.
Sur les ‘sacrifices’ consentis par Kabila
On ne voit pas quand Kabila a consenti des sacrifices pour que le peuple congolais retrouve la paix. N’eut été l’attachement des congolais à leurs terres, n’eut été les efforts déployés par les congolais pour pouvoir dénoncer ces manigances, nos compatriotes de l’Est seraient encore en train de se faire massacrer de manière pire que ce qui se fait en ce moment. Si Kabila avait consenti des sacrifices pour obtenir la paix, on aurait eu des monuments qui nous permettraient de nous souvenir de nos morts et de nous questionner sur les acteurs impliqués dans ce qui nous est arrivé.
C’est un discours baratin. Mais Kabila criminalise déjà ceux qui ne pourront pas aller dans la voie qu’il est censé tracer. Demain, quand les patriotes diront à Kabila, votre deuxième mandat touche à sa fin, vous ne pouvez pas aller au-delà de ce mandat, et si vous le faites, nous allons recourir à l’article 64, pour que nos populations se prennent en charge, la police politique de Kabila va leur tirer dessus.
Sur le processus de fausseté
Ceux qui nous font la guerre de 1885 sont capables de ceci : Ils arment les deux camps de ceux qu’ils considèrent être les belligérants visibles et donnent des éléments de langage à chacun des camps (ce qu’ils ont fait avec l’Allemagne et la Russie lors de la seconde guerre mondiale). Les deux camps s’affrontent et eux en profitent pour faire leur commerce. C’est ce qui va nous arriver, c’est ce qui nous arrive. Il y a Kabila qui vous dit qu’il ne va pas faire couler le sang et la sueur, il y a ceux qui sont allés à Dakar et qui sont financés par ceux qui font la guerre aux congolais et au Congo. Ainsi les deux sont-ils financés par les mêmes mais donnent l’impression à nos populations qu’ils sont contre les uns et les autres. Ils font semblant de s’affronter mais ce sont nos populations qui vont en payer le prix. Les deux savent qu’ils sont au service des maîtres du monde et peuvent se servir de nos populations pour se maintenir.
Sur la place de Kabila du point de vue des maîtres du monde
Ensuite, tant que Kagamé sera encore au Rwanda et Museveni en Ouganda, il sera difficile qu’un patriote prenne le pouvoir au Congo. Parce que ce qui est pillé au Congo passe par le canal de ces deux pays et celui qui facilite ce pillage, c’est Kabila en tant que cheval de Troie du Rwanda et des maîtres du monde. Pour ceux qui ont fabriqué Kabila mais aussi Kagamé et Museveni, Kabila est encore nécessaire pour ce qu’ils appellent la stabilité. Jusqu’au jour où ils peuvent trouver un oiseau rare capable de faire le sale boulot. Il y a va de la stabilité de la région des Grands Lacs, c’est-à-dire le pillage du Congo, par l’entremise de Kabila, du Rwanda et de l’Ouganda.
Sur le forum congolais sur l’Ile de Gorée
Ce forum est financé par une fondation allemande. Quel est le rôle joué par l’Allemagne dans les guerres au Congo ? Quand vous savez qu’Africom opère à partir de l’Allemagne, quand vous savez que la bourse des matières premières du Congo se trouve à Francfort, quand vous savez qu’il y a eu des allemands qui se sont enrichis sérieusement au Congo en 1993 et 2003, vous vous dites qu’il y a quand même quelque chose qui cloche. Comment voulez-vous qu’une Allemagne qui a asphyxié la Grèce puisse plaider la cause du Congo ?
Il y a une stratégie d’amplification du chaos congolais qui est en train de se préparer. Quand vous voyez les partis politiques partis là-bas. Ils sont presque tous dans le programme appelé Tomikotisa. Prenez l’ARC de Kamitatu, l’UNC de Kamerhe, l’UDPS, par exemple, qui sont partis au forum sur l’Ile de Gorée, ils font tous partie du programme Tomikotisa, géré par le NDI, la NED et l’USAID qui sont liés à Open Society de Soros. Ils y sont allés en tant que vassaux des maîtres du monde pour pouvoir permettre aux maîtres du monde de faire main basse sur les matières premières du Congo.