• IDEES & RESSOURCES POUR REINVENTER LE CONGO

Découpage territorial, coup d’Etat permanent, guerre perpétuelle : Comment les élites occidentales s’efforcent de contrôler le Congo

Découpage territorial, coup d’Etat permanent, guerre perpétuelle : Comment les élites occidentales s’efforcent de contrôler le Congo

Découpage territorial, coup d’Etat permanent, guerre perpétuelle : Comment les élites occidentales s’efforcent de contrôler le Congo 1560 871 Ingeta

L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu explique comment tant le découpage territorial que le fameux dialogue au Congo-Kinshasa participent de la déstructuration et de l’affaiblissement du Congo, orchestrés par les élites anglo-saxonnes et occidentales, rappelle pourquoi le Congo est un Etat raté et encourage les congolais à se réapproprier l’histoire du pays et surtout comprendre ce qui nous est arrivé ces 20 dernières années.

Sur le découpage territorial en RDC

Il y a derrière ce découpage, certaines motivations politiques. Mais ne nous limitons pas à cette approche de court terme des politicards et mercenaires qui sont au Congo. N’oublions pas que depuis 1996, 1997, le Congo-Kinshasa est agressé de l’intérieur et de l’extérieur. Il y a une guerre perpétuelle menée contre ce pays afin qu’il soit balkanisé et qu’il implose. S’il implose en plusieurs provincettes, il y a aura plus de facilités pour que certaines de ses parties appartiennent à certains pays voisins.
Par ailleurs, gouverner, c’est prévoir. On ne peut pas après 10 ans dire qu’on n’avait pas prévu les moyens pour la subdivision du pays en 26 provinces. C’est encore une fois, un exemple éloquent du fait que ceux qui prétendent présider aux destinées du Congo, sont, pour la plupart d’entre eux, des mercenaires commis à la tête de ce pays, pour pouvoir réaliser les desseins de ceux qui entretiennent la guerre permanente au Congo. C’est un signe patent que ce ne sont pas ces acteurs apparents qui gouvernent le Congo.

Sur le coup d’Etat permanent au Congo

Il y a une sorte de mensonge, entretenu, pour pouvoir reconduire le pays vers un coup d’Etat permanent. Pourquoi parlons-nous d’un coup d’Etat permanent ?
Depuis que Lumumba a été tué, ceux qui ont orchestré sa mort, essaient d’avoir leur main mise sur ce pays en lui faisant un coup d’Etat permanent. Ils l’ont fait avec Mobutu. Tout le temps de son règne, il a eu à ses côtés, les experts des institutions financières internationales qui ont géré l’économie congolaise de l’intérieur. C’est ce même processus qui s’est répété en 1996,1997. Mais malheureusement, il arrive que nous n’ayons pas beaucoup de suivi dans nos idées. Nous pensons qu’il y a changement de régime, qu’il y a changement de processus politique, et pourtant, à analyser les choses de plus près, à bien relire notre histoire, c’est un même processus qui a commencé depuis l’assassinat de Lumumba, jusqu’à ce jour.
Le Congo vit, depuis l’assassinat de Lumumba, dans l’illégalité, et dans l’illégitimité. Comment faire pour pouvoir remettre ce pays sur les rails de la légalité et de la légitimité ? C’est là où nous en sommes aujourd’hui.

Sur la dynamique de l’opposition congolaise

Cette dynamique de l’opposition, bien qu’en ayant réussi à mettre ensemble plusieurs partis politiques et associations de la société civile se situe dans un processus biaisé dès le départ. Donc, cette dynamique encourage le statu quo, par le fait de croire en un processus politique, qui aurait eu lieu depuis la guerre de l’AFDL.
Cette dynamique de l’opposition congolaise ne déploie pas d’effort pour proposer une alternative. Elle est dans la logique de l’alternance. Or ce qu’il nous faut aujourd’hui, ce dont le pays a besoin aujourd’hui, c’est d’avoir des fronts de libération nationale, en rupture avec le système que le régime sert. Cette dynamique de l’opposition est disposée à servir le même système que celui que le régime sert.

Sur les caractéristiques de l’Etat raté du Congo

Nous ne sommes pas en démocratie, au Congo-Kinshasa. Le Congo-Kinshasa est un Etat raté, un Etat manqué. Et l’une des caractéristiques des Etats ratés et manqués, c’est de donner l’impression qu’ils ont des institutions démocratiques qui fonctionnent alors que ces institutions sont vides de contenus démocratiques.
Au lieu de croire, qu’il y a des institutions d’appui à la démocratie, qui sont au service du régime, essayons d’aller plus loin dans l’analyse pour nous dire, que dans un Etat raté, les institutions dites d’appui à la démocratie, ont une belle forme (on a la CENI, on a ceci et cela), mais le fond est vide. Parce que le régime est un régime mortifère, mercenaire. Ce n’est que du business. Il y a quelques mercenaires qui ont infiltré les institutions pour faire leur business. Ils essaient de multiplier les institutions pour donner l’impression que nous sommes en démocratie. Le Congo-Kinshasa est un Etat raté sous la tutelle de l’ONU.
Au fur et à mesure que l’on s’éloigne de l’année 1999, quand l’ONU est arrivé au Congo, les compatriotes commencent à oublier que le Congo est sous la tutelle de l’ONU. Il faut appeler un chat, un chat. Si nous ne voulons pas faire de fausses analyses, sur ce qui se passe au Congo, commençons par réaliser que nous avons affaire à un Etat failli, raté, manqué.
Ce régime n’a pas de pouvoir, il exerce juste son travail de mercenariat et de destruction du pays. Parmi les objectifs de régime, il y a l’enrichissement illicite de ses membres, mais aussi l’extermination des congolais, la déstructuration et la déstabilisation du pays. Or nous avons l’impression que ce régime va aller vers l’organisation démocratique du pays. Cela ne rentre pas dans ses objectifs !

Sur la guerre perpétuelle

Aujourd’hui les massacres continuent à BENI et dans l’Est du pays. Même à Kinshasa, les congolais meurent presque chaque jour par manque de soins, par manque de médicaments, par manque de nourriture… C’est ça la guerre perpétuelle ! Il ne faut pas limiter la guerre à l’usage d’armes.
Cette guerre se mène sur plusieurs plans : On entretient la faim, on entretient la maladie, on entretient le banditisme (à l’Est) et dans l’entre-temps, la déstructuration et la déstabilisation du pays avance.

Sur le dialogue au Congo

Quand vous lisez les noms des signataires de la déclaration de Genève, vous vous rendez compte que ces messieurs appartiennent aux pays qui veulent faire du Congo-Kinshasa, depuis les années 1960, un marché où ils peuvent aller puiser à leur guise les matières premières dont ils ont besoin. Et quand ces gens se réunissent, il n’y a aucun congolais. Quand en 1885, ils se sont réunis pour partager l’Afrique, il n’y avait aucun africain.
Voilà comment ils jouent : Ils ont des objectifs à réaliser mais ils ne veulent pas prendre les devants. Ce ne sont pas eux qui vont aller à Kinshasa pour dire : « voilà, ce que nous voulons. Nous voulons avoir accès à vos matières premières. Nous voulons avoir accès à votre marché agricole. Comment pouvons-nous créer des règles d’interdépendance et d’échanges qui nous permettent d’assurer et nos intérêts et vos intérêts ?». Non. Ce sont eux qui prennent les devants, se réunissent et disent aux congolais, « vous devez aller au dialogue pour pouvoir trouver une solution et organiser les élections ». Quelles élections ? La présidentielle et les législatives : c’est-à-dire que, eux, tiennent à avoir des nègres de service qui leur faciliteraient la signature de certains documents qui ouvrent le marché congolais à leurs intérêts. Où voyez-vous la démocratie ? Ils auraient pu, eux-mêmes, venir et parler directement aux congolais.

Sur la souveraineté au Congo

Dans l’imaginaire du politicien congolais, le pouvoir vient de l’Occident. Et quand on parle aujourd’hui de la communauté internationale, on y exclut les pays qui luttent pour le respect de la souveraineté nationale. En agissant par des nègres de service interposés, les élites occidentales sont en train de s’en prendre à notre souveraineté nationale et à notre droit à l’autodétermination. Ils sont en train de tuer ce pays là pour en faire tout simplement, un marché autorégulé, avec des nègres qui peuvent à tout moment signer des traités, voter des lois, pour pouvoir faire avancer ce marché néolibéral.

Sur l’interdiction du film autour du Dr Mukwege au Congo

L’interdiction du film est un prétexte pour pouvoir s’en prendre à la mémoire collective congolaise. Il y a là, un enjeu de taille. Un pays qui se respecte aurait mis sur la place publique congolaise, plusieurs films allant dans le même sens. Parce que nous avons besoin de nous réapproprier notre histoire. Nous avons besoin d’analyser en profondeur, ce qui est arrivé à ce pays là ces 20 dernières années. Nous avons besoin de voir les victimes de la barbarie et du génocide perpétré sur notre territoire, de les voir réparés et de voir les criminels répondre de leurs forfaits. Or ce qui est vrai, c’est entre autres ceci, parmi ceux qui ont infiltré nos institutions, depuis les années 1990s, il y en a plusieurs qui sont impliqués dans ces forfaits là, dans le viol, dans les massacres de nos populations… Accepter la diffusion du film « L’homme qui réparait les femmes » aurait conduit, entre autres, à provoquer des débats autour de cette histoire, à poser la question de savoir pourquoi depuis ce génocide congolais le pays n’arrive pas à construire à mémorial pour entretenir le souvenir de ce qu’il y a eu.

 

INGETA.

REINVENTONS

LE CONGO

Informer. Inspirer. Impacter.

Notre travail consiste à :
Développer un laboratoire d’idées sur le passé, présent et futur du Congo-Kinshasa.

Proposer un lieu unique de décryptage, de discussion et de diffusion des réalités et perspectives du Congo-Kinshasa.

Aiguiser l’esprit critique et vulgariser les informations sur les enjeux du Congo, à travers une variété de supports et de contenus (analyses, entretiens, vidéos, verbatims, campagnes, livres, journal).