Par Jean-Pierre Mbelu
« Le peuple gagne toujours » – R. Mukendi Tshimanga
Plusieurs lectures sont faites au sujet de l’arrestation d’ Eliezer Ntambwe. Certains compatriotes estiment qu’il s’agit d’un arrangement entre Ndeko Eliezer et »la police politique de la Kabilie » abusivement dénommée ANR en vue de lui créer une meilleure audience à sa sortie de la prison. D’autres, qualifiant cette lecture de fantaisiste, sont d’avis qu’il est question d’une arrestation arbitraire visant à obtenir des »insoumis congolais » et autres »ascètes du provisoire » un silence absolu sur les forfaits de la Kabilie. Et il y a là un signe annonçant le pire réservé à la campagne électorale des contradicteurs du régime en place. D’autres, enfin, croient que cette arrestation est un signal lancé à l’endroit de tous »les éveilleurs des consciences » dans cette »prison à ciel ouvert » pris en otage par des occupants, leurs collabos et autres »négriers des temps modernes ».
Un fait est vrai. Eliezer Ntambwe n’en est pas à sa première arrestation. Il n’est pas exclu, qu’après ses voyages en Afrique du Sud et en Europe, que »la police politique de la kabilie » puisse chercher à lui soutirer l’une ou l’autre information en montant un procès bidon.
Tout le monde soupçonne tout le monde…
Ces lectures trahissent la diversité d’approches auxquelles un fait peut prêter ou »le conflit des interprétations » qu’il peut provoquer. Dans un Etat normal, un tel conflit peut aboutir à un minimum de »consensus provisoire » au cours d’un débat ouvert et sans tabou. Pour cause. Une grande méfiance s’est installée entre les compatriotes depuis la guerre raciste de prédation et de basse intensité menée contre le Congo-Kinshasa par les anglo-saxons par leurs sous-fifres interposés. Tout le monde soupçonne tout le monde. Il est de plus en plus difficile d’être cru sur parole. Les faux libérateurs venus de l’extérieur et de l’intérieur du pays ont fini par dévoiler leur véritable face de »conglomérat d’aventuriers » et de »chevaux de Troie ». Sans des solidarités résistantes pouvant forcer une réponse idoine à la question de la direction du pays avant de proposer une éthique reconstructive accordant une place de choix à une Commission Vérité, Justice et Réconciliation, il sera difficile de refaire la confiance brisée.
Une grande méfiance s’est installée entre les compatriotes depuis la guerre raciste de prédation et de basse intensité menée contre le Congo-Kinshasa par les anglo-saxons par leurs sous-fifres interposés. Tout le monde soupçonne tout le monde. Il est de plus en plus difficile d’être cru sur parole.
En marge de ces différentes lectures, une poignée de collègues journalistes de Ndeko Eliezer n’a pas croisé les bras. Elle se bat pour qu’il puisse recouvrer sa liberté. Et Les Congolais Debout semblent avoir mis des avocats à sa disposition. Plusieurs activistes des droits de l’homme appellent à sa libération.
Ces efforts louables devraient être accompagnés d’une relecture de la lutte multiforme que des compatriotes »insoumis » et résistants mènent contre »les sous-fifres » des anglo-saxons opposés aux Congolais(es) sur la terre de leurs ancêtres depuis bientôt plus de deux décennies dans une guerre raciste et de basse intensité. Mépriser les Congolais(es), les violenter, les opprimer, les dominer et les réduire au rang de »non personnes », c’est l’un des objectifs de cette guerre au cours de laquelle la cupidité et l’avidité sont sans bornes.
La rhétorique officielle est trompeuse
L’illusion d’une res publica née d’un »pacte républicain » signée en Afrique du Sud avant »les élections-pièges-à-cons » de 2006 se dissipe de plus en plus. Et le Congo-Kinshasa transformé en une jungle, en une »prison à ciel ouvert » ne cesse de voir plusieurs de ses filles et fils tenu(e)s en esclavage sur ses propres terres. »Le réseau de prédation » transnational auquel participe »les négriers des temps modernes » congolais et ceux venus des pays voisins se corse, fort de l’impunité dont il jouit depuis le début de cette guerre raciste de prédation.
Un « non-Etat » fonctionne sur fond de l’arbitraire. Un « Etat manqué » a des institutions vides de contenu. Parler de la justice, du Procureur de la République, des Cours et Tribunaux, c’est nier que le Congo actuel est »une prison à ciel ouvert » où l’arbitraire est au service de la kleptocratie.
Dans ce contexte de prise en otage du pays par »un conglomérat d’aventuriers » et de »chevaux de Troie », la rhétorique officielle est trompeuse. Elle pousse à poser de fausses questions du genre : »Comment peut-on arrêter quelqu’un sans l’avoir écouté ? » ; ou encore : »N’est-ce pas là jeter un discrédit sur la justice du pays et sur les autres institutions ? » Un »non-Etat » fonctionne sur fond de l’arbitraire. Un »Etat manqué » a des institutions vides de contenu. Parler de la justice, du Procureur de la République, des Cours et Tribunaux, c’est nier que le Congo actuel est »une prison à ciel ouvert » où l’arbitraire est au service de la kleptocratie. Cela constitue des entorses à la lutte et à l’imagination créatrice d’un autre Congo-Kinshasa.
Une bonne compréhension de la lutte peut contribuer à son avancée. Elle nécessite un effort constant de déconstruction sémantique de la rhétorique officialisée pour le besoin du décervelage.
Une déconstruction faite en bonne et due forme facilite la compréhension de l’enjeu majeur de cette guerre à laquelle la kabilie participe : détruire l’identité et l’intelligence congolaises. Elle permet d’identifier l’adversaire et ses sous-fifres, de connaître leur mode opératoire, de maîtriser l’usage qu’ils font de l’arbitraire dans un Congo-Kinshasa transformé en jungle en vue de lutter en connaissance de cause. Les éveilleurs des consciences, les »ascètes du provisoire » et les autres »insoumis » luttant sur le terrain-Congo ont besoin de procéder en permanence à cette déconstruction afin d’éviter certains pièges tendus par les initiateurs de la guerre raciste de prédation et de basse intensité imposée aux filles et fils de notre peuple. (à suivre)
Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961