Par Jean-Pierre Mbelu
Quand il arrive à certains amis Rwandais de vouloir nous dissuader de lire certains livres en arguant qu’il ne suffit pas qu’une thèse soit soutenue par un livre pour qu’il soit »vraie », ils oublient que certains auteurs de la tragédie des Grands Lacs ont échappé, à raison, à certains procès. Ces amis Rwandais jouent sur l’amnésie dont sont victimes plusieurs compatriotes Congolais. Ils refusent de relire l’histoire avec nous. Et quand ils voient She Okitundu, Lumanu ou Kikaya Bin Karubi au Rwanda pour discuter avec »leur chef » avant la publication du »gouvernement Tshibala », ils sont étonnés. Ils ne comprennent pas que »le véritable président du Congo-Kinshasa », c’est Paul Kagame. L’ex-secrétaire de l’ONU l’avait affirmé une fois par un lapsus linguae révélateur. Et l’une des conditions à laquelle »le conglomérat d’aventuriers » au pouvoir-os au Congo-Kinshasa doit répondre est la soumission à »l’homme fort de Kigali ». Sinon, pas de boulot. Oui. Nous avons notre part de responsabilité dans ce qui arrive au Congo-Kinshasa. Elle est liée à notre lâcheté, à notre paresse intellectuelle, à notre cupidité. Disons à la lâcheté, à la paresse intellectuelle, à la cupidité de plusieurs d’entre nous. Mais aussi à la haine de notre identité.
Le temps ne joue pas toujours en faveur des Congolais(es). Plusieurs compatriotes utilisant les réseaux sociaux finissent par croire que si le Congo-Kinshasa ne va pas bien aujourd’hui, ce n’est que de la faute des Congolais(es). Oui. Nous avons notre part de responsabilité. Notre cupidité, notre avarice, nos egos surdimensionnés, etc. ont fait de plusieurs d’entre nous des proies faciles dans un monde de requins. De là à croire que ce qui se passe chez nous depuis 1885 ne constitue pas ce qu’Honoré Ngbanda dénomme des »crimes organisés », il y a un pas que nous devrions nous garder de franchir. Pourquoi ? Pour une raison simple. Les Congolais(es) ayant étudié la question le savent. Les documents déclassifiés des pays organisant en permanence »ces crimes organisés l’attestent ». Les ONG des pays impliqués dans ces »crimes organisés » les ont documentés, étudiés et ont conclu qu’il en est ainsi. Voici un exemple.
Ce »jeune homme inoffensif » dont Paul Kagame avait besoin
A travers certains documentaires, les Congolais(es) en parlent. ‘‘Le conflit au Congo. La vérité dévoilé » est un exemple éloquent.
Souvent, qui culpabilise les Congolais(es) ? Ce sont certains voisins rwandais. Ils s’en prennent aux Congolais(es) en leur disant qu’ils (elles) veulent se présenter comme des victimes innocentes de tout ce qui leur arrive. Cette approche édulcorée de notre commune histoire pose problème. Elle nie certaines évidences. Quand le chef actuel du Rwanda se livre aux médias pour dire comment il tient »le conglomérat d’aventuriers » gouvernant le Congo-Kinshasa par défaut actuellement, c’est la faute des Congolais(es).
Prenons cette interview avec un journaliste de la BBC :
« Stephen Sackur de BBC. Permettez-moi de vous poser une question au sujet de la République Démocratique du Congo. Votre gouvernement a-t-il arrêté de se mêler dans les affaires du Congo ?
Le président Paul Kagame : Je suis sûr que vous obtiendriez une meilleure réponse au Congo parce que les Congolais ne se plaignent pas de nous du tout.
Stephen Sackur de BBC. Laurent Nkunda est un rebelle dans l’est de DRC. Il a été entraîné par les Rwandais, il est Tutsi, le soutenez-vous ?
Le président Paul Kagame ; Dans une certaine mesure même le Président Kabila qui est là-bas et beaucoup d’autres membre du Gouvernement ont été entraînés par le Rwanda. »
Souvent, qui culpabilise les Congolais(es) ? Ce sont certains voisins rwandais. Ils s’en prennent aux Congolais(es) en leur disant qu’ils (elles) veulent se présenter comme des victimes innocentes de tout ce qui leur arrive. Cette approche édulcorée de notre commune histoire pose problème. Elle nie certaines évidences.
Prenons un deuxième exemple. Alias Joseph Kabila, lui-même, à un certain moment, »exaspéré » par les accusations du Rwanda contre les FDLR, dit ceci publiquement début décembre 2004 : « Depuis quelques jours, les forces armées du Rwanda ont violé notre territoire en traversant la frontière commune par plusieurs entrées, dans la province du Nord-Kivu. Pour justifier leur aventure criminelle les responsables rwandais avancent le prétexte de la chasse aux groupes armés rwandais sur le territoire de la République Démocratique du Congo. Chers compatriotes, je voudrais vous rappeler que ce problème des groupes armés, qui n’a pas été créé par le peuple congolais, a servi de prétexte à la guerre que le Rwanda a menée contre notre pays depuis 1998 et qui a contribué à déstabiliser dangereusement la région des Grands Lacs. » (C. ONANA, Ces tueurs tutsi. Au cœur de la tragédie congolais, Paris, Duboiris, 2009, p.162)
Relisons bien ce texte. Il constitue, à mon avis, un rare moment de lucidité d’alias Joseph Kabila. Ce texte dit tout. Il va lui coûter des pressions face auxquelles il ne pourra pas tenir. Ces pressions vont le lui rappeler et le pousser à rentrer dans le projet auquel il participait initialement, le projet du Tutsi Power de coloniser les Grands Lacs africains avec l’aide des anglo-saxons. Elles vont lui rappeler qu’il est ce »jeune homme inoffensif » dont Paul Kagame avait besoin pour jouer son rôle de nègre de service anglo-saxon. A ce point nommé, il est toujours utile de rappeler ces deux textes de Pierre Péan :« Pourtant, dix jours après la mort de son géniteur, il devient son successeur, et quatre jours plus tard il rencontre à Washington le président Bush et Pauk Kagame en marge du National Prayer Breakfast, après avoir été reçu par le président français.
Certains auteurs de la tragédie des Grands Lacs ont échappé, à raison, à certains procès
L’acceptation par Joseph Kabila d’une rencontre avec Paul Kagame, l’ennemi le plus acharné de son père, fournit un indice important pour lever un pan du mystère Joseph Kabila. D’autant que l’impacte de cette rencontre est rehaussé par une décision, en date du 1er février, d’abandonner la plainte que le défunt président avait déposée devant la Cour Internationale de justice à La Haye contre l’agression rwando-ougandaise de la RDC, après le 2 août 1998. » P. 413
« L’affirmation suivante du docteur Helmut Strizek me semble pertinente : « Après la mort de Laurent-Désiré Kabila, Kagame obtiendra de ses alliés américains et européens- l’intervention de l’Eufor au Congo est à situer dans ce contexte- que le Congo soit dirigé par »un jeune homme inoffensif », en la personne de Joseph Kabila. Ceci permettrait au Rwanda de faire main basse sur les richesses du Congo et à Kagame d’être sûr que le danger, dans la lutte contre le pouvoir dictatorial, ne viendra pas de la République Démocratique du Congo. » p. 418 (P. PEAN, Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique, Paris, Fayard, 2010).
Quand il arrive à certains amis Rwandais de vouloir nous dissuader de lire certains livres en arguant qu’il ne suffit pas qu’une thèse soit soutenue par un livre pour qu’il soit »vraie », ils oublient que certains auteurs de la tragédie des Grands Lacs ont échappé, à raison, à certains procès.
Abandonner les poursuites contre les proxies des agresseurs du Congo-Kinshasa et leur offrir une base-arrière corvéable à souhait fut l’une des conditions à laquelle alias Joseph Kabila et ses gouvernements successifs devaient obéir pour bénéficier du soutien de l’Occident. Charles Onana l’a bien compris en écrivant Europe, crimes et censure au Congo. Les documents qui accusent (Paris, Duboiris, 2012). Patrick Mbeko et Honoré Ngbanda, en écrivant, Stratégie du chaos et du mensonge. Poker menteur en Afrique des Grands Lacs (2014), essaient de situer tous ces crimes commis chez nous depuis 1885 dans un ensemble ayant pour matrice organisationnelle le mensonge et le chaos.
En effet, dès la début de la guerre dans les Grands Lacs africains, Pierre Péan avait déjà pointé du doigt cette stratégie en écrivant Noires fureurs, blancs menteurs (2005). Le procès intenté contre lui après la publication de se livre par »le mercenaire anglo-saxon de Kigali » n’avait pu aboutir. Il en va de même du procès intenté contre Charles Onana. Quand il arrive à certains amis Rwandais de vouloir nous dissuader de lire certains livres en arguant qu’il ne suffit pas qu’une thèse soit soutenue par un livre pour qu’il soit »vraie », ils oublient que certains auteurs de la tragédie des Grands Lacs ont échappé, à raison, à certains procès.
L’identité congolaise fortement affirmée dérange
Ces amis Rwandais jouent sur l’amnésie dont sont victimes plusieurs compatriotes Congolais. Ils refusent de relire l’histoire avec nous. Et quand ils voient She Okitundu, Lumanu ou Kikaya Bin Karubi au Rwanda pour discuter avec »leur chef » avant la publication du »gouvernement Tshibala », ils sont étonnés. Ils ne comprennent pas que »le véritable président du Congo-Kinshasa », c’est Paul Kagame. L’ex-secrétaire de l’ONU l’avait affirmé une fois par un lapsus linguae révélateur. Et l’une des conditions à laquelle »le conglomérat d’aventuriers » au pouvoir-os au Congo-Kinshasa doit répondre est la soumission à »l’homme fort de Kigali ». Sinon, pas de boulot.
Oui. Nous avons notre part de responsabilité dans ce qui arrive au Congo-Kinshasa. Elle est liée à notre lâcheté, à notre paresse intellectuelle, à notre cupidité. Disons à la lâcheté, à la paresse intellectuelle, à la cupidité de plusieurs d’entre nous. Mais aussi à la haine de notre identité.
L’identité congolaise fortement affirmée dérange. Les héritiers de Kimpa Vita, de Kimbangu, de Lumumba, de Mulele, de Munzihiriwa, de Kalamba Mukenge, de Kamwina Nsapu sont soupçonnés d’être capables de se souvenir de leurs vaillants aïeux. Ils seraient indomptables et insoumis. Ils pourraient renoncer à »la négritude de service » et vouloir être souverains, même sans costumes et cravates. Ceci fait peur. Leur capacité d’insoumission fait peur.
Sur ce point, bien qu’étant un peu en désaccord avec mon ami Mufoncol Tshiyoyo quand il soutient que la guerre de basse intensité menée contre notre pays ne vise pas nos matières premières, je le rejoins en soutenant que »la cupidité » ne justifie pas tout. Le mépris de l’autre, la mégalomanie, le refus de l’altérité sont des facteurs à prendre en compte dans la tragédie congolaise. L’identité congolaise fortement affirmée dérange. Les héritiers de Kimpa Vita, de Kimbangu, de Lumumba, de Mulele, de Munzihiriwa, de Kalamba Mukenge, de Kamwina Nsapu sont soupçonnés d’être capables de se souvenir de leurs vaillants aïeux. Ils seraient indomptables et insoumis. Ils pourraient renoncer à »la négritude de service » et vouloir être souverains, même sans costumes et cravates.
Ceci fait peur. Leur capacité d’insoumission fait peur. Ils pourraient être eux-mêmes : dansant, buvant et bossant dans un pays où le soleil est présent du 01 janvier au 31 décembre. Non. Ils font peur. Il fallait ‘les désorienter existentiellement » en tuant leurs vaillants aïeux. »Kasi baza koya ». Ils sont convaincus, pour un bon nombre, que ‘la rage ne va pas avoir raison des chiens ». Ils disent : »Mukupa kawutu wamana nyama ». Cela es d’autant vrai qu’ils ont survécu au »premier génocide ». Oui. Demain, ils danseront »somo trop »…
Babanya Kabudi
Génération Lumumba