Par Jean-Pierre Mbelu
Le 24 janvier 2006, un groupe d’organisations de la société civile congolaises a publié un article intitulé : « Référendum Constitutionnel du 18 et 19 décembre 2005 en R.D. Congo : un scrutin biaisé ? »[1]. Les preuves attestant que ce référendum a été effectivement biaisé n’ont jamais été démenties jusqu’à ce jour. Les recommandations formulées n’ont pas été suivies par ‘’les gouvernants’’ en place à Kinshasa. Relire cet article peut aider à comprendre pourquoi Apollinaire Malumalu est prêt à récidiver. C’est lui, en effet, qui était aux commandes de la CEI en 2005-2006. Avant de poursuivre ce boulot, il est en train de chercher le quitus de ‘’ses amis d’hier’’.
Des sources bien informées, nous apprenons qu’après son séjour tumultueux à Londres, il y a une semaine, Apollinaire Malumalu a rasé les murs à Bruxelles. Ici, il est venu dire à qui voudrait l’entendre qu’il serait prêt pour la révision constitutionnelle. Il n’attendrait plus que le feu vert de l’Assemblée nationale.
Quelle serait la signification profonde du séjour européen de Malumalu ?
Pour répondre à cette question, il est souhaitable de se référer à ‘’ses amis’’ impliqués dans la fabrication de ‘’la Constitution de Liège’’ et au coup que l’Europe a assené aux Congolais(es) aux ‘’élections piège à cons’’ de 2006. Il est triste de constater que plusieurs compatriotes Congolais sont en train d’oublier l’histoire de cette Constitution et de la façon dont elle a été imposée au référendum populaire sans le moindre respect de règles démocratiques. Il est aberrant d’entendre certains compatriotes soutenir faussement que cette Constitution fut le fruit d’un compromis entre ‘’les belligérants’’.
Nous défions quiconque soutient cette hypothèse de nous indiquer le lieu et la date où les dignes filles et fils du Congo-Kinshasa se sont rencontrés autour d’une table pour discuter avec les véritables initiateurs et les commanditaires de la guerre de basse intensité et de prédation imposée à leur pays depuis 1996. Ceux que ces compatriotes estiment être ‘’les belligérants’’ sont les sous-fifres des ‘’organisateurs de la sauvagerie’’. Les arrangements trouvés entre eux leur ont permis de bien coordonner ensemble le projet de l’implosion et de la balkanisation du Congo-Kinshasa toujours en cours. Des rencontres régulières entre les acteurs mineurs et les autres ‘’proxies’’ de cette guerre ensauvageante ne peuvent pas être considérées comme des voies menant à des ‘’compromis’’ heureux pour le Congo-Kinshasa. A ce point nommé, une certaine classe politique congolaise et plusieurs acteurs de la société civile se trompent ; par action, par omission ou simplement par ignorance de l’histoire immédiate du Congo-Kinshasa.
Dieu merci ! Ce pays dispose aujourd’hui d’une documentation pouvant aider à remettre les pendules à l’heure. Un livre intitulé ‘’Guerre et droits de l’homme en République Démocratique du Congo. Regard du Groupe Justice et Libération’’[2] peut, dans ce débat, aider à identifier les réseaux d’acteurs interférant dans cette guerre de basse intensité et pousser à comprendre que ses ‘’acteurs majeurs’’ ne se sont jamais présentés à une quelconque table de négociations. Au contraire, comme en Irak[3] et dans d’autres pays du monde, après avoir détruit les vies et les valeurs de civilisation millénaires, ils reviennent sur leurs lieux de leurs crimes en ‘’sauveurs’’ pour prêcher ‘’la bonne parole de la liberté et de la démocratie’’ qu’ils considèrent eux-mêmes comme des ‘’objectifs illusoires’’.
Disons que le passage de Malumalu dans certaines capitales européennes avant qu’il n’organise ‘’un référendum populaire’’ au Congo-Kinshasa n’est pas un fait anodin. Il sait, lui, que l’Europe (et son surgeon américain) a participé à la censure et aux crimes de guerre et aux crimes contre l’humanité dans son pays natal[4]. Devenu complice des forces de la mort, il a besoin de leur assurance permanente.
Malumalu sait aussi que plusieurs de ses compatriotes ont perdu le sens de la mémoire historique et qu’ils s’abandonnent au folklore accompagnant ‘’la fausse jeune démocratie congolaise’’. Pour preuve. Rares sont ses compatriotes capables de renvoyer au rapport rédigé par plusieurs membres de différentes organisations de la société civile congolaise indiquant que le référendum de 2005 fut un biaisé. Les lecteurs de Charles Onana et Raf Custers[5] diraient tout simplement que ce référendum fut une couverture ‘’civilisée’’ au coup monté par l’Europe et son surgeon américain pour faire main basse sur les ressources stratégiques du sol et du sous-sol congolais en confirmant ‘’un Seigneur de la guerre’’ comme leur marionnette au poste de ‘’Président de la République’’.
Face à toute cette tragédie, il serait souhaitable de se rendre à l’évidence que plusieurs ‘’acteurs majeurs’’ de la guerre de basse intensité sévissant au Congo-Kinshasa et leurs marionnettes sont tombés soit dans la sociopathie, soit dans la psychopathie, soit dans les deux à la fois. La cupidité et le goût du lucre ont mangé leurs cœurs et leurs esprits. Ils ont perdu le sens des limites morales et éthiques. Pour eux, ‘’rien n’est impossible en politique’’ ; en une politique conçue comme ‘’business’’ pour ‘’la survie’’ et l’exercice de ‘’l’instinct de conservation’’. Ils opèrent par-delà le bien et le mal. Ils ont perdu le sens de l’humanité. Croire que les référer aux règles éthiques, à la justice et au droit pour les faire revenir ‘’aux bons sentiments’’, c’est oublier qu’ils sont ‘’malades’’. La sociopathie et la psychopathie ne peuvent pas être guéries à coup de simples appels au respect du droit ou de la justice. Elles requièrent une thérapeutique adaptée et une bonne mobilisation (et organisation efficace et) permanente des imaginaires alternatifs.
Mbelu Babanya Kabadi