Par Mufoncol Tshiyoyo
Ma réponse à celles et à ceux qui font le procès à la Chine et à la Russie pour le Congo. Apprenons à distinguer la scène du théâtre de l’arrière-salle des négociations. Cessons de confondre le bruit avec la victoire. Et le mouvement avec le sens.
Oui, la Chine avance prudemment. Parce qu’elle joue une longue partie. Contrairement aux autres, elle ne s’émeut pas des impatiences de ceux qui confondent stratégie et précipitation.
Quant à la Russie, elle est peut-être embourbée, mais encore debout, et armée d’une certitude historique que d’autres ont perdue. Le temps est plus fort que l’arrogance des puissants. Oui, le temps. Encore et toujours le temps, voilà qui explique la durée imposée à sa manière de conduire ses guerres. Aujourd’hui, si l’Amérique peut frapper, elle ne convainc plus. Samuel Huntington, le théoricien américain de la notion de soft, hard et smart power, reconnait que l’Amérique (à la tête de l’Occident collectif) impose par la force, mais n’a jamais rallié par la justice. Pour la suite, je vous renvoie à la lecture de son livre Le Choc des civilisations (The Clash of Civilizations) 1996.
Une laisse invisible
Mais venons-en au cœur : le Congo. Vous dites : « Ni la Chine ni la Russie n’ont levé le petit doigt pour nous. » Mais avez-vous levé la tête vous-mêmes ? Car ce sont des Congolais, et je dis bien des Congolais, oui des Congolais qui font asseoir des Rwandais dans leur gouvernement ; qui accompagnent Paul Kagame dans les stades de Kinshasa ; qui vont quémander le pouvoir-OS à Kigali ; qui choisissent de se rendre à Canossa à Washington, à Paris, à Bruxelles, à Londres. Et ces mêmes Congolais tremblent à l’idée de solliciter ouvertement Pékin ou Moscou. Alors allons-y comprendre quelque chose.
Vous vous étonnez que la Chine et la Russie ne fassent rien ? Mais que voulez-vous qu’ils fassent ? Gouverner le Congo à la place des Congolais ? Le protéger même s’il ne se protège pas lui-même ? S’allier à ceux qui se livrent volontairement à leurs adversaires ? Non, les Russes et les Chinois ne sont pas si bêtes. Ils observent. Et ce qu’ils voient, ce sont des Congolais agenouillés, non pas devant leurs alliés, mais devant leurs fossoyeurs.
Cette peur n’est pas naturelle. Elle a été semée. Cultivée. Médiatisée. On a appris à la femme et à l’homme congolais à craindre tout ce qui n’est pas estampillé « Occident autorisé ». Et cette peur est devenue une stratégie de domestication. Une laisse invisible.
Alors, vous vous étonnez que la Chine et la Russie ne fassent rien ? Mais que voulez-vous qu’ils fassent ? Gouverner le Congo à la place des Congolais ? Le protéger même s’il ne se protège pas lui-même ? S’allier à ceux qui se livrent volontairement à leurs adversaires ? Non, les Russes et les Chinois ne sont pas si bêtes. Ils observent. Et ce qu’ils voient, ce sont des Congolais agenouillés, non pas devant leurs alliés, mais devant leurs fossoyeurs. Et ce ne sont pas tous les Congolais. Ce sont des « élites », des « chefs », des « décideurs », des « journalistes » à genoux devant l’ordre ancien, à genoux devant l’ennemi, à genoux devant l’humiliation.
Le drame…
Vous attendez que la Russie ou la Chine se substituent à la volonté populaire congolaise. Mais elles ne sont pas là pour jouer au Père Noël. Encore moins pour défendre un peuple qui ne se défend pas lui-même. Pendant ce temps, la Russie combat l’Occident collectif, vos « amis » si attentionnés, financent la guerre contre le Congo tout en jouant aux médiateurs.
Vous attendez que la Russie ou la Chine se substituent à la volonté populaire congolaise. Mais elles ne sont pas là pour jouer au Père Noël. Encore moins pour défendre un peuple qui ne se défend pas lui-même.
Le problème n’est pas que la Russie et la Chine n’ont rien fait. Le drame, c’est que les Congolais eux-mêmes ont tout livré. Et qu’ils continuent de le faire, en appelant cela diplomatie. Bien sûr, les puissances sont hypocrites. Je suis tout sauf naïf. Mais il est faux et lâche de croire que notre salut dépend d’elles.
Tant que l’esclave ne renonce pas à ses chaînes, nul libérateur ne pourra le libérer.
[Extrait de mon recueil Les Lois invisibles – Anatomie des puissances et du chaos exporté, à publier ultérieurement.]
Mufoncol Tshiyoyo, M. T.
L’Étincelle – un homme libre
Pour ceux qui n’attendent plus la permission de vivre debout.