Source: Guylain Gustave Moke. Publié le 20 janvier 2012.
Une enquête réalisée auprés des services judiciaires européens révèle que les gouvernements européens ont accepté en principe, la proposition du gouvernement congolais d’arrêter unilatéralement et arbitrairement certains membres des dits « combattants » en flagrant délit de leurs droits de l’homme.
La République démocratique du Congo traverse une crise post-électorale inprédictible. Cette crise, a été née par un double scrutin chaotique, immoral aux standards démocratiques: d’une part, la présidentielle á la soviétique, donnant lieu á deux présidents diamétralement opposés, Joseph Kabila, élu par ses flatteurs mais rejeté par le peuple congolais et Étienne Tshisekedi, clamé haut et fort vainqueur incontesté de la présidentielle, d’autre part, le législatif á l’aveuglette , dont les résultats sont d’ores et déjà refoulés, récusés, contestés par les acteurs politiques et le peuple congolais.
Dés lors, la diaspora congolaise est montée sur ses grand-chevaux avec des ”marches pacifiques” mais qui dégénérèrent souvent au pire. L’agression de M. Léon Kengo wa Dondo, le président de Sénat Congolais, á Paris, était sans doute l’épicentre, la marque indélébile, laissée á la mémoire des acteurs politiques et aux autorités congolaises, de leur détermination.
Le Sénat congolais avait alors demandé aux gouvernements européens de rapatrier tous ceux qui seraient considérés comme ” instigateurs de marches pacifiques”, un droit acquis par la charte Universelle de ” Droit de l’homme”.
Les gouvernements européens complices de cette farce électorale en République démocratique du Congo, multiplient des circulaires, visant les étrangers, en particulier congolais.
L’allergie du gouvernement congolais
Le gouvernement congolais est allergique aux échos de marches pacifiques des ”combattants” en Europe. La possibilité d’une guerre civile, d’un coup d’état soumet le régime de Joseph Kabila á la vigilance tout azimuts.
De surcroît, une série de mesures conservatoires et impopulaires sont prises pour restreindre l’accès de l’influence extérieure.
Désormais, et à partir du 1er février 2012, tout laissez-passer, toute carte consulaire et tout visa ne portant pas l’hologramme de l’ambassade de la RDC en République du Congo sera déclaré faux et le porteur d’un tel document sera interpellé par la Direction générale de migration (DGM).
Ces nouvelles dispositions sécuritaires ont été révélées mercredi à la presse par l’ambassadeur de la RDC au Congo-Brazzaville, Christophe Muzungu, à l’issue de l’audience que lui a accordée le vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, de la sécurité, de la décentralisation et de l’aménagement du territoire, Adolphe Lumanu Mulenda Bwana N’Sefu. L’audience a eu lieu en présence du directeur général de la DGM, M. Beya.
Cette mesure servirait á scruter et contrôler toute entrée au sol congolais, á travers Brazzaville, la seule frontière de tension entre les deux Congo, une voie dont les anti-Kabila comptent sans doute exploiter.
Les analystes politiques qualifient cette mesure de ” tactique”. La ville de Brazzaville est considérée comme ” le tremplin” d’une possible guerre civile ou coup d’état en RDC; elle est la seule voie d’accès espérée par les ant-Kabila. Le gouvernement congolais, conscient de cette réalité cherche á rester ” maître de la situation” avec l’aide de cette mesure.
Les Combattants
Contrairement au portrait peint par les médias européennes, les combattants ne sont pas des radicaux, des extrémistes anti-Kabila. D’après un membre d’un groupe de résistance, basé en Bruxelles, les combattants seraient l’ensemble de groupes au sein de la diaspora congolaise, luttant pour la libération du Congo de l’emprise de Joseph Kabila et l’Occident.
Ils accusent l’occident de supporter le régime oppressif de Joseph Kabila, en vue de réaliser á bon sied la balkanisation du Congo.
Par manque d’homogénéité et structure au sein de ces groupes composants les dits ” combattants”, il est quasiment impossible de mieux les cerner. Chaque capitale européenne a ses propres combattants, les démarches entreprises dans leur lutte, sont cependant diverses.
Cette disparité de branches ” combattants” met les bois sur les roues pour leur survie. Alors que les uns prônent le dialogue, le débat ouvert, les autres prêchent la libération á tout prix.
La complicité de la France
L’Ambassadeur français á Kinshasa, M. Luc Hallade aurait affirmé que son gouvernement ne tarderait pas á rapatrier ” les combattants” qui commettreraient des actes de violence en France, comme l’aurait demandé le gouvernement congolais.
Des sources judiciaires françaises auraient déjà arrêtés six personnes, en relation avec l’agression de Léon Kengo. Nous apprenons au prés de leurs avocats que ” ces derniers seraient victimes de la politisation de droit de l’homme en France, en particulier, en l’encontre des étrangers”.
En France le député UMP Jean-Paul Garraud a dévoilé, jeudi 12 janvier, une proposition de loi qui entend rendre systématique l’examen, par les juges, de la possibilité d’expulser les étrangers condamnés qui ne disposeraient pas d’attaches en France.
Ce texte propose également une extension des peines plancher des « récidivistes » aux « réitérants », soit les personnes condamnées pour d’autres faits initialement. La proposition de loi de M. Garraud répond à une demande du ministre de l’intérieur, Claude Guéant, qui avait souhaité, en décembre 2011, que soient prises « des mesures spécifiques » contre la « délinquance étrangère ».
Les sources judiciaires françaises qualifient bizarrement les actions de dits ” combattants”:de ” délinquance étrangère ” par conséquent ” susceptibles au traitement de la proposition de loi annoncée par Jean-Paul Garraud.
Le double jeu de la Belgique
En Belgique, la Sûreté de l’Etat tient à l’oeil plusieurs groupuscules, parfois infiltrés par des casseurs, dont certains ont participé aux émeutes de décembre dernier à Bruxelles. “Le noyau dur des radicaux, en Belgique, compte 25 à 30 membres”, selon un spécialiste du dossier au sein des forces de sécurité, interrogé par Le Vif.
“Ils se réunissent dans des cafés, ont désigné des responsables par zone et organisent des coups avec le soutien d’autres ‘combattants’ venus de Paris et de Londres. Il y a une certaine coordination entre ces ultras, même si le mouvement est une nébuleuse internationale pas très structurée.” rapporte la Libre.
Les combattants ne limitent pas leur champ d’action aux émeutes. Ils se livrent aussi à des agressions violentes contre des personnalités jugées proche du pouvoir.
M. Reynders, le vice-Premier ministre et ministre belge des Affaires étrangères, a présenté, entre autres, la position de Bruxelles sur le dossier de la RDCongo à cette occasion.
La Belgique souhaite qu’une “nouvelle Assemblée dans de meilleures conditions de compilation des résultats de l’élection présidentielle” soit installée à Kinshasa pour rassembler l’ensemble des acteurs et que lors des prochaines élections locales, le processus se déroule mieux pour le dépouillement, a déclaré M. Reynders.
En termes clairs et lucides: La Belgique supporte la réélection á la soviétique de Joseph Kabila et dansera désormais avec lui, même s’il faudrait abuser le droit de l’homme des ” combattants”.
La Charte de droit de l’homme
Les gouvernements européens signataires de ”Traité de droit de l’homme européen de Rome”, la forme élaborée de la charte universelle de droit de l’homme, doivent garantir une protection internationale á ceux qui seraient ”objects de torture” chez eux, mais aussi respecter le droit de la ”vie privée et familiale de ces derniers.
Selon l’article 3 ECHR, il est prohibé de rapatrier quiconque vers son pays d’origine, si seulement si le(la) rapatrié(e) serait ”object de torture”. Certains combattants ne bénéficieraient pas d’une justice impartiale, d’un traitement humain, de retour au Congo.
D’autres par contre ont établie l’existence d’une vie privée et familiale, conformément á l’article 8ECHR. Les dissociant arbitrairement, unilatéralement de leur famille, reviendrait á un abus de droit de l’homme.
Conclusion
Certes, la violence sous toutes ses formes á l’encontre d’une personne, contre les combattants, contre les acteurs politiques, encore moins les autorités, n’a pas une valeur démocratique dans une société civilisée.
Néanmoins, la détermination d’un peuple, groupe, mouvement, de lutter, manifester pacifiquement, ne doit cependant pas être coincée, manipulée, stigmatisée. La phraséologie des ” radicaux Anti-Kabila” pour décrire les combattants, membres de la diaspora congolaise ne convient pas. Elle ne facilite pas la compréhension requise de la réalité.
Une approche équilibrée, balancée devrait remporter sur la politisation, la criminalisation d’une action pacifique, dans une enveloppe de respect de droit de l’homme.
L’attitude, position adoptée par la France et Belgique de criminaliser et rapatrier ” manu militari” les combattants vers la gueule du loup, est un chantage politique, un abus de droit de l’homme de ”combattants”.
Idem, pour les ”combattants”, les actions de violence, de vandalisme dans leur lutte sacrée pourraient bien être ” á l’encontre des valeurs républicaines de leur pays de résidence, et terniraient l’image d’un combat patriotique.
Par Guylain Gustave Moke, Analyste Politique/Expert Aux Affaires Africaines.