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Kinshasa dans les bras de Kigali à l’issue du huis-clos de Kampala

Kinshasa dans les bras de Kigali à l’issue du huis-clos de Kampala

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Par Jean-Pierre Mbelu

Plus de deux décennies après la chute du mur de Berlin et le début de la guerre de basse intensité menée contre la RDC , croire qu’il y a encore des agendas cachés relèverait, pour une large part, du refus d’apprendre. Les documents et les témoignages de terrain sont pléthoriques. Les étudier et les partager avec « les minorités organisées et agissantes » ainsi qu’avec les masses populaires de la RDC aiderait à reculer l’ignorance et à militer efficacement pour la cause de la révolution idéologique indispensable à la refondation d’un autre Congo.

Le huis-clos décrété à Kampala, là où les gouvernants de pacotille de Kinshasa négocient avec les mercenaires rwandais du M23, sous l’œil vigilant de Kaguta  Museveni, va réserver des surprises aux plus  naïfs d’entre nous ; c’est-à-dire  à ceux qui, depuis la guerre de l’AFDL, n’ont rien compris la stratégie des trois « Ka » (Kaguta Museveni,  Kagame Paul et  Kabila Joseph). Quand, par  Mende interposé, le gouvernement de Kinshasa soutient qu’il n’y aura pas d’amnistie pour « les rebelles » inscrits sur la liste de (100) criminels, il prépare les plus naïfs d’entre nous à accepter l’issue des pourparlers de Kampala ; c’est-à-dire le déversement dans l’armée et dans les autres institutions du pays  de « bons mercenaires ».

Le modus operendi du  « kind of Guy » des  Etasuniens n’aura pas changé d’un seul iota. « A travers des mouvements comme le CNDP, le Rwanda, écrit Bernard Lugan, pratiquait une véritable stratégie du chaos destinée à interdire le retour de la région dans le giron de Kinshasa. Cette stratégie est double :
–               durant les phases de paix, Kigali faisait intégrer un maximum de tutsi dans les FARDC, sa main-mise s’opérant ainsi à travers l’armée congolaise ;
–               quand Kinshasa tentait de reprendre le contrôle de la région en déplaçant les unités tutsi ailleurs dans le pays, ces derniers se mutinaient.[1] »

Dans sa description de la stratégie de Kigali, Bernard Lugan ne nous semble pas être sensible  au fonctionnement du réseau d’élite ougando-rwando-congolais ; c’est-à-dire à la complicité entre les trois « Ka » et « leurs clans ». (Le 27 septembre 2013, ils se rencontrent à New-York.)Il  nous semble être encore prisonnier de  la stratégie des guerres classiques.  Dans le cas de la RDC , la guerre de basse intensité menée en réseau  entretient le chaos dans une large partie de l’Afrique centrale avec la complicité de Kinshasa. En écoutant la BBC de ce 20 septembre 2013, voici ce que nous apprenons : « L’issue des pourparlers est en principe prévue la semaine prochaine. La RDC n’appliquera pas un principe de « responsabilité collective » contre la rébellion du M23, a déclaré à Kinshasa le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende. « Le gouvernement de la RDC s’interdit toute chasse aux sorcières. Le gouvernement n’appliquera donc pas le principe inique d’une responsabilité collective qui n’existe pas dans notre ordre juridique », a déclaré M. Mende. L’amnistie de rebelles et leur intégration dans l’armée se feront « au cas par cas », a dit le ministre, mais d’ores et déjà, la liste d’une centaine d’individus, dont les noms n’ont pas été révélés, sur un total de 1.700 combattants, a été établie par le gouvernement. » Encore une fois, nos populations, victimes des accords secrets souvent signés par les gouvernants  de pacotille de Kinshasa risquent  d’être, pour la énième fois, roulées dans la farine : leurs bourreaux risquent de se retrouver dans l’armée et les institutions du pays et un éventuel M24 risque de naître deux ou trois mois après le huis-clos de Kampala.

Admettons que « le gouvernement de Kinshasa » ne veuille pas se livrer à « la chasse aux sorcières » et  à « la responsabilisation collective », pourquoi ne rend-il pas ses pourparlers avec les mercenaires de Kigali publics ? Pourquoi en fait-il une rébellion congolaise tout en reconnaissant qu’elle est menée par Kigali (et majoritairement infiltrée par l’armée rwandaise) ?

Nous ne le dirons jamais assez : la guerre de basse intensité orchestrée  par le réseau d’élite ougando-rwando-congolais et transnational n’est pas une guerre identitaire. Non. Elle  est une guerre de prédation menée par un groupe d’individus sans foi ni loi travaillant de manière interconnectée et instrumentalisant  « les escadrons de la mort » au sein des armées ougandaises, rwandaises et congolaises pour servir ses intérêts : l’accaparement des matières premières stratégiques pour « les cosmocrates », l’enrichissement rapide et illicite et le pouvoir de domination. Ce réseau opère sur fond de la tolérance à la violence et au meurtre devenue pratiquement « une culture » en son sein. Il opère et à partir de ce qui est dénommé  « majorité présidentielle » et à partir de « l’opposition ». Ses membres présents dans « l’opposition » préparent la protection de ceux qui sont dans « la majorité » à l’issue de leur mandat. Le jeu est fin et  subtil. Tous les membres de ce réseau excluent souvent la vérité et « la justice juste » comme des préalables nécessaires à la thérapie de guérison collective et à la  refondation d’un autre Congo. La  protection mutuelle au sein de ce réseau participe de  la prise de conscience de ses membres du fait de  partager des objectifs communs. (Et pour qu’il les atteigne, il a besoin des applaudisseurs, de nouveaux membres et des perdiémistes  inconscients.)

C’est vrai : « Oyo ezali lisusu tango ya kolelalela te, nous conseille Alain Moloto. »  Et si nous écrivons, c’est pour éveiller l’attention des «  minorités organisées et agissantes »  au danger de l’apparition, demain, du M24 : le ver étant déjà dans le fruit. Nous écrivons aussi pour vaincre  notre naïveté  nous poussant à croire qu’il y a encore des agendas cachés. Non. Tous les agendas sont désormais connus. Le modus operandi  du « kind of guy » des Yankees  et de ses complices est resté le même pendant plus de deux décennies.

Mbelu Babanya Kabudi

[1] B. LUGAN, Les guerres d’Afrique. Des origines à nos jours, Paris, Rocher, 2013, p. 327.

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