Par Mufoncol Tshiyoyo
Qu’est-ce que le « Nous congolais conscient » propose à sa jeunesse quand l’Autre lui fait miroiter notamment nourriture, costumes, cravates, argent, son école, pouvoir, maison, voitures, téléphones ?
Chaque fois qu’il nous arrive de discuter ou bavarder avec des compatriotes, y compris, notez, la jeunesse, l’impression que tout ce beau monde donne est que seul le bonheur, la joie, la jouissance serait synonyme de vie et de vivre. Sinon toute cette jeunesse ne risquerait tout pour venir mourir dans des pirogues et dans des côtes italiennes en caressant l’idée d’un certain eldorado lointain et ailleurs que chez soi. Il n’y a rien de mal dans cette aspiration que d’aucun qualifierait de naturelle et propre à l’homme.
La sueur, les privilèges et les pièges
Pour eux, l’homme ne chercherait ou ne viserait que le bonheur, la joie. Mais quand nous comparons cela avec la formation militaire que plusieurs sociétés qui veulent dominer accorde à leur jeunesse, on y découvre l’importance et la place réservée à la souffrance, à l’endurance, à la formation. Il y a peu de joie en marge de la sueur. Les bâtisseurs, la jeunesse qui est expédiée ailleurs est formée à l’épreuve pendant que le cœur de la nôtre bat pour passer une nuit, un quart d’heures, et ce même debout, sur les Champs Elysée, à Manhattan.
On envie l’Autre sans être de mesure de payer son prix, celui que lui paye pour être envié.
Nous nous demandons s’il faille, et à notre tour, alors que notre société est confrontée à une situation de domination par autrui, accorder à notre jeunesse ces privilèges qui sonnent comme un piège, non seulement qui lui est tendu mais également qui opère comme un pouvoir, comme une attraction qui l’attire. N’est-ce pas une faute si nous excluons la souffrance, la privation, la mort, la sueur, la tristesse, le manque sur le chemin de notre jeunesse et que nous les jugions, nous aussi, comme le contraire de vie ? Ce texte s’adresse à nous tous, à ce « nous congolais et conscient » mais bâtisseur de sociétés. Combien élèvent et éduquent leurs enfants à accepter la souffrance pour le dépasser et devenir un homme et une femme sur qui la société peut compter et l’avenir se construire et reposer ? L’effort et la souffrance comme modalités de vie et éléments de formation.
De sociétés enviées, on ne retient souvent que la joie, que le bonheur, que la belle vie, que la richesse, que la belle femme, que le bel homme, que l’envie d’aller y habiter : mais ce bonheur supposé et présent cache l’histoire faite de sang et de sueur de ces peuples qui pour vivre tel qu’ils le font aujourd’hui tuent ailleurs, volent ailleurs, désolent ailleurs, souffrent, peinent, endurent. Ils se sont massacrés mutuellement pour séduire les faibles qui viennent avec espoir de trouver pitance et pitié chez eux. On envie l’Autre sans être de mesure de payer son prix, celui que lui paye pour être envié.
Quelle est notre politique ?
Nous avons entendu un homme politique congolais quémander de la pitié pour son peuple auprès de la « communauté internationale ». C’est le dernier texte de notre ami Abbé Mbelu Babanya, « Les candidats à la présidence au Congo-Kinshasa et leurs sorties médiatiques » qui nous l’apprend quand l’auteur cite les propos suivants, et nous citons : « Nous sommes convaincus que cette fois-ci la communauté internationale va avoir pitié du peuple congolais. Ce peuple qui a tant souffert qui constate que Mr untel ne veut pas partir ».
Vous demandez, quelle est notre politique ? Je peux vous dire : c’est d’engager le combat sur terre, sur mer et dans les airs, avec toute la puissance, la force que Dieu peut nous donner ; engager le combat contre une monstrueuse tyrannie, sans égale dans les sombres et désolantes annales du crime. Voilà notre politique.
Churchill, et comme nous avons affaire à son élite, dans pareille circonstance, il aurait dit à son peuple, c’est la teneur de son discours prononcé le 13 mai 1940 devant la Chambre des Communes, nous citons notamment : « […] Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, de la peine, des larmes et de la sueur. […] Nous avons devant nous une épreuve des plus douloureuses. Nous avons devant nous de nombreux et longs mois de combat et de souffrance.
Vous demandez, quelle est notre politique ? Je peux vous dire : c’est d’engager le combat sur terre, sur mer et dans les airs, avec toute la puissance, la force que Dieu peut nous donner ; engager le combat contre une monstrueuse tyrannie, sans égale dans les sombres et désolantes annales du crime. Voilà notre politique. Vous demandez, quel est notre but ? Je peux répondre en un mot : la victoire, la victoire à tout prix, la victoire en dépit de la terreur, la victoire aussi long et dur que soit le chemin qui nous y mènera ; car sans victoire, il n’y a pas de survie », fin de citation. Et ce combat de Churchill, personne n’en veut pas ceux qui veulent le pouvoir tout de suite et maintenant. Mais quel pouvoir alors que ceux qui se contentent de ce type de pouvoir-os n’ont jamais rien accompli sauf la distraction.
« La pitié est une faiblesse que ton ennemi ne partage pas ! »
Chez nous, les mêmes politiques nous disaient hier, et ce après avoir rencontré le ministre des affaires britanniques de l’époque, nous étions encore en 2011, que « cette fois-ci l’Occident a décidé de nous laisser gouverner le pays ». C’était à Londres. Et des vidéos existent pour l’attester. En 2011, l’opinion s’est rendue compte que ces hommes politiques ont été trompés et naïfs d’avoir cru aux mirages de leurs bienfaiteurs en paroles. Le plus grave est que personne n’est rentré à Londres auprès de ce même peuple devant lesquels ils se sont exprimés pour demander pardon du fait de les avoir induits en erreur. Aujourd’hui, on refait la même chose sans montrer un peu de respect à ce peuple à qui il est toujours demandé de faire un effort.
Admettons que ladite communauté soit coupable de notre souffrance, il y a lieu alors de s’interroger quand elle devrait se montrer miséricordieuse vis-à-vis de notre peuple. Avant de lui infliger sa souffrance ou après son forfait ? Mais on constate que la demande de pitié est introduite après la souffrance endurée par le peuple du Congo-Kinshasa. Ce qui voudrait dire que la pitié n’a jamais été à l’ordre du jour chez elle.
La communauté internationale est appelée, et selon les hommes politiques congolais, à manifester sa pitié au motif que le peuple congolais a longtemps souffert. Cette demande est adressée à la communauté internationale sans avoir le courage de spécifier si c’est elle qui serait et est à l’origine de la souffrance de notre peuple. Et admettons que ladite communauté soit coupable de notre souffrance, il y a lieu alors de s’interroger quand elle devrait se montrer miséricordieuse vis-à-vis de notre peuple. Avant de lui infliger sa souffrance ou après son forfait ? Mais on constate que la demande de pitié est introduite après la souffrance endurée par le peuple du Congo-Kinshasa. Ce qui voudrait dire que la pitié n’a jamais été à l’ordre du jour chez elle. « La pitié est une faiblesse que ton ennemi ne partage pas ! », aurait déclaré un général conquérant. Sinon, nous ne serions pas là tous en train de quémander pitié.
Nous proclamons notre foi en l’homme congolais, en la femme congolaise et e la jeunesse congolaise. Ce qui nous attend est plus dure que la vie. Il n’y aura de survie qu’en le dépassant par l’effort et la souffrance. Nous avons une certaine idée de notre devenir en commun. C’est de croire en nous. C’est-à-dire être capable de relever le défi que les autres ont assumé pour conquérir le Congo-Kinshasa. Nous fondons notre foi en notre jeunesse.
Mufoncol Tshiyoyo