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Discours économiciste et intérêts

Discours économiciste et intérêts

Discours économiciste et intérêts 1280 852 Ingeta

Par Jean-Pierre Mbelu

« La formation d’un ordre mondial multipolaire équitable, sans centre ni périphérie définis, s’est considérablement intensifiée ces dernières années. »
– P. ESCOBAR

Pourquoi, lorsqu’il est question d’intérêts, de « l’inter esse », de ce qu’il y a entre les êtres (humains), ils sont directement qualifiés d’économiques ? Pourquoi ne peuvent-ils pas être amicaux, familiaux, solidaires, politiques, sociaux ? Le discours économiste aurait-il violé, comme « soft power », les imaginaires, les aurait-il rigidifiés, au point de les mettre rapidement d’accord sur la qualification des intérêts ?

Là où les imaginaires violés excluent automatiquement les autres qualificatifs des intérêts, les accords géopolitiques et géostratégiques sont soupçonnés de n’être qu’à la merci des intérêts économiques. La normalisation de cette approche de « l’inter esse » pose un réel problème de l’usage du langage comme « soft power » et des dégâts que cela peut causer au niveau des alliances entre les peuples en lutte pour un monde polycentré. Le refus et/ou l’ignorance de la diversité des intérêts pouvant mettre les humains ensemble est souvent étonnant.

Etre averti au sujet des Etats-nations ayant rejeté ou nié l’altérité au nom du nihilisme ne devrait pas, en principe, conduire à la défaite de la raison magnifiant la relation, l’interaction et le minimum de consensus qu’elle peut induire.

Ceci sème la peur lorsqu’il s’agit de diversifier le partenariat. Cette peur engendre et/ou soutient une approche individualité de la relation à l’autre. Aller vers lui, nouer un relation de partenariat avec lui, est vite interprété comme être au service de ses « intérêts économiques ». Le débat au sujet de ces intérêts est d’office écarté. On se met sur ses gardes et on commence à croire que l’esseulement est la meilleure option.

Pourtant, basiquement, l’autre, dans sa diversité, participe de notre identité. Celle-ci est à la fois relationnelle et interactive. Tout se joue au niveau du relationnel et de l’interactionnel dans leur ouverture à l’impensable, à l’imprévisible et à l’inconnu.

Etre averti au sujet des Etats-nations ayant rejeté ou nié l’altérité au nom du nihilisme ne devrait pas, en principe, conduire à la défaite de la raison magnifiant la relation, l’interaction et le minimum de consensus qu’elle peut induire. Il est aussi souhaitable d’écouter ces voix réalistes convaincues que « nous ne sommes plus seuls au monde [1] ». L’esseulement, produit du dogme économiciste réduisant tous les intérêts aux intérêts économiques dominants, est un erreur.

Le Sud réinventant le monde [2] devrait l’éviter et mutualiser la diversité de ses intérêts avec tous les partenaires souverainistes et adeptes du monde multipolaire.

 

Babanya Kabudi
Génération Lumumba 1961

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[1] Lire B. BADIE, Nous ne sommes plus seuls au monde. Un regard sur l’ordre international, Paris, La Découverte, 2016.

[2] Lire B. BADIE, Quand le Sud réinvente le monde. Essai sur la puissance de la faiblesse, Paris, La Découverte, 2018.

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