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Discours, décisions, concertations : Pourquoi Joseph Kabila a tout faux !

Discours, décisions, concertations : Pourquoi Joseph Kabila a tout faux !

Discours, décisions, concertations : Pourquoi Joseph Kabila a tout faux ! 750 500 Ingeta

L’analyste politique Jean-Pierre Mbelu expose les (manques de)fondements historique, politique et économique du discours de Kabila devant le congrès congolais, rappelle pourquoi en 1960, comme aujourd’hui, l’avenir de l’Afrique se joue au Congo.

Sur la position de Kabila, en tant qu’acteur politique, devant le congrès

Si vous lisez attentivement ce discours, vous vous rendrez compte qu’il se situe en marge de l’histoire. Ce discours est prononcé après tant d’autres… Il aurait été souhaitable que Joseph Kabila commence par rendre compte des œuvres qu’il a posées et réalisées depuis qu’il a usurpée le pouvoir en 2001. Mais au lieu de procéder à cet exercice là, on le voit passer d’un discours à un autre, et presque tous ces discours contiennent des promesses et des belles intentions qui ne sont jamais suivies d’évaluation.
Joseph Kabila a usurpé le pouvoir en 2001. Il a été imposé à la tête du Congo, par les chasseurs des matières premières, en 2006. Il a fraudé aux élections en 2011 : Joseph Kabila a tout faux. Il ne mérite même pas d’être pris au sérieux comme acteur politique.

Sur le fondement historico-politique du discours de Kabila

Si nous le replaçons comme acteur apparent de notre histoire tel quelle est en train de se faire depuis la guerre de l’AFDL, Joseph Kabila est venu dans les malles d’une guerre fomentée par le Rwanda et l’Ouganda, soutenus par leurs parrains extérieurs, anglo-saxons principalement. Ils ont fait croire qu’ils venaient libérer les Congolais et les Congolaises pendant qu’ils menaient une guerre d’agression et de prédation.
Comment peut-on prétendre, après avoir mené une guerre d’agression et de prédation, libérer un peuple ? Ils nous ont menti et on ne peut pas fonder un discours politique sur un mensonge.
Ensuite, les commanditaires de cette guerre d’agression ont été mis à nu. Il y a eu des rapports qui ont prouvé noir sur blanc que leurs proxis, Kagamé et Museveni, ont servi comme les nouveaux leaders de la renaissance africaine telle qu’elle a été conçue par Washington. Aujourd’hui, nous avons même des preuves écrites que c’est Kagamé qui a monté les forces négatives qu’il est censé combattre au Congo.
Du point de vue historique, Kabila n’a pas de fondements à donner à ce discours.

Sur l’absence de fondement économique du discours de Kabila

Du point de vue économique, Kabila n’a pas de fondements à donner à son discours. Il s’est engagé dans une guerre de prédation. C’est donc le capitalisme prédateur qui sert de matrice organisationnelle à la guerre Joseph Kabila et les membres de l’AFDL ont participé. On ne peut pas, à partir d’un fondement de prédation, tenir un discours qui annonce combattre la corruption, ou encore s’en prendre à ceux qui se sont enrichis illicitement. Parce que le capitalisme prédateur ou le néolibéralisme est fondamentalement un système économique corrompu, de prédation, de violence et ce système ne peut fonctionner qu’avec l’appui des élites compradores, élites auxquelles appartient Joseph Kabila et beaucoup de membres de la Kabilie.

Sur l’audience visée par le discours de Kabila

Le discours que Kabila a présenté est un discours sans fondement historique, politique et économique solide. C’est un discours servi aux amnésiques d’entre nous. Cela d’autant plus que, avec l’appui du capitalisme prédateur, il a usurpé le pouvoir en 2001 après l’assassinat de Laurent désiré kabila. Et quand il a été confirmé en 2006, c’était avec le soutien des chasseurs de matières premières. Il vient de tricher aux élections de 2011.
Depuis la guerre de l’AFDL, le pouvoir qui prétend gérer le Congo aujourd’hui ne jouit d’aucune légitimité politique. Comment pouvons-nous nous engager sur un discours d’un acteur apparent qui ne jouit d’aucune légitimité politique, un monsieur qui tient un discours dont les fondements politiques et économiques sont bidons.
Discuter sur le discours de Kabila devant le congrès, c’est faire le jeu de ceux qui voudraient prendre les congolais pour des amnésiques. Ceux qui ont applaudi, son discours des deux mains, sont les politiciens du ventre.

Sur Kabila et le sénat mobutiste congolais

Le sénat n’a pas été renouvelé après les élections bidons de 2011. Chercher à travailler avec les mobutistes qui sont au sénat, c’est affirmer, 16 ans après la guerre de l’AFDL que la question n’était pas de chasser les mobutistes du pouvoir. Comment voulez-vous, après nous avoir convaincu que l’AFDL avait pris les armes pour chasser les mobutistes du pouvoir, on puisse aujourd’hui travailler avec un sénat géré par un mobutiste pur et dur et beaucoup d’autres de ses amis. Et on nous fait croire que le sénat, et le parlement, vont assurer le suivi des décisions qui auraient été prises aux concertations nationales. Non, c’est une façon de se moquer des congolais et des congolaises.

Sur les discours de cohésion, leur suivi et la guerre d’usure

Il n’y a pas de cohésion au Congo. La guerre sévit toujours entre le M23 et les FARDC soutenus par la brigade d’intervention de la MONUSCO. Tous les discours, toutes les décisions de ces concertations nationales participent de la guerre d’usure. N’oublions jamais que la guerre dans laquelle notre pays est engagé, est aussi une guerre d’usure. Elle dure, elle déstructure les esprits et les cœurs, elle détruit les familles, elle chasse les populations de leur terre pour en faire les bénéficiaires de la charité des ONG internationales et les entreprises multinationales qui sont en train de voler nos matières premières, viennent les prendre comme des biens sans maîtres. Il ne faut donc pas se laisser berner par ces fameuses décisions qui nous parlent d’un comité de suivi.

Sur le rapatriement des corps de Mobutu et de Tshombé

En quoi le rapatriement de cadavres va œuvrer pour la cohésion nationale, pendant que la justice sociale n’est pas assurée, pendant que le pluralisme politique n’est pas promu, pendant que les terres congolaises sont vendues chaque jour comme carré minier, pendant que l’enrichissement illicite et sans cause se poursuit.
Ce sont des mesures prises pour élargir la majorité prédatrice. C’est une manière pour les partisans de la Kabilie de dire qu’ils ne sont pas venus au Congo pour chasser les mobutistes. Ils venaient pour reproduire et même aller au-delà de ce que ce système avait pu faire pendant 32 ans.

Sur le MLC et les concertations nationales

Il ne faut pas oublier que le MLC est un mouvement créé par l’Ouganda, comme l’AFDL, comme le RCD, comme le CNDP, comme le M23 ont été créés par le Rwanda. Il s’agit de milices créées par les marionnettes instrumentalisées par les oligarchies d’argent qui nous mènent la guerre.
Qu’il y ait une réconciliation entre le MLC et l’AFDL et affiliés (PPRD, CNDP, M23), il n’y a rien à redire. Et cela ne devrait pas nous étonner. Mais, même s’ils appliquaient la justice internationale, n’oubliez pas que les guerres qui sont menées chez nous sont aussi les guerres de la politique et de la justice internationales. Ce sont des arrangements qu’ils peuvent trouver avec leurs parrains. Même les chefs d’Etat impliqués dans les crimes en Afrique commencent à en avoir marre de la cour pénale internationale.

Sur l’implication de la communauté internationale aux concertations

Sassou est revenu au pouvoir par un coup d’Etat. Il ne peut qu’avaliser les méthodes d’autres présidents africains qui reviennent au pouvoir par un coup d’Etat.
Sur Mme Zuma? Il ne faut pas oublier les accointances entre Kabila et le président de l’Afrique du Sud.
Et n’oublions que l’Union Africaine est financée pour une grande part par l’union européenne, qui a participé aux crimes commis au Congo après les élections de 2006, comme des documents publiés dans le livre de Charles Onana l’attestent.

Sur le rôle de l’ONU au Congo

En 1960, l’ONU était au Congo sous le commandement des grandes puissances qui voulaient déjà à ce moment là, balkaniser le Congo, parce qu’elles se disaient, si le Congo prend son envol, c’est toute l’Afrique qui prend son envol. L’avenir de l’Afrique se joue au Congo, hier comme aujourd’hui. Beaucoup de congolais ont été utilisés comme marionnettes par les grandes puissances du monde qui avaient instrumentalisées l’ONU. Et, c’est ce qui joue encore une fois aujourd’hui.
Parce que ces grandes puissances sur le déclin se rendent compte que nous ne faisons aucune allusion à notre histoire. Nous naviguons à vue, sans boussole historique. C’est ainsi que Tshibanda, en tant que ministre des affaires étrangères, participe à la mort lente de notre pays et fait l’éloge de l’ONU, en oubliant qu’il y a au Congo, depuis plus de 10 ans, au moins 17000 casques bleus qui n’arrivent pas à en finir avec ceux qu’ils appellent les forces négatives et forcent le Congo à aller négocier à Kampala, tout en sachant que l’homme de Kampala, comme celui de Kigali, sont les instigateurs, leurs marionnettes dans la mise en coupe réglée du Congo. Les pays qui se respectent ne font plus appel à l’ONU.


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